Si les administrativistes français sont fiers du dualisme de juridictions caractérisant le système juridictionnel français, les difficultés qu'il engendre n'en sont pas pour autant négligeables. Aussi, la succession de condamnations par les juridictions de l'Union Européenne et la Cour européenne des droits de l'Homme tendent à mettre en exergue les délais grandissants et la complexification des procédures liées à ce dualisme, au point que certains juristes remettent en cause ce dédoublement, souhaitant au contraire revenir à un système moniste et dès lors, simplifié. Ce débat justifie ainsi le questionnement sur la légitimité de l'existence d'un juge administratif, et sur sa compétence pour juger des litiges mettant en cause l'Administration, d'autant plus que les systèmes de common law en sont pour la plupart dépourvus et qu'il est d'usage de parler à ce propos d' « exception française ».
[...] Ainsi, la première remplace, par décrets successifs, les anciens Conseils de préfecture par les tribunaux administratifs, compétents en premier ressort, tandis que la seconde, par une loi du 31 décembre 1987, crée les Cours administratives d'appel, compétentes par principe en appel des décisions des tribunaux administratifs. Le principal effet de cette double réforme est, comme le souligne Jean-Marc Sauvé, la création d'un ordre de juridictions administratif, par une hiérarchisation de ces trois juridictions. Ainsi, c'est à la suite de ces réformes que nait le triptyque : tribunal administratif cour administrative d'appel Conseil d'Etat, qui sera par la suite évoqué dans le premier article (L. du Code de justice administrative. [...]
[...] Le juge judiciaire a vu, tout d'abord, ses compétences assez largement élargies à l'égard des litiges mettant en cause la responsabilité publique. L'exemple le plus célèbre est la loi du 31 décembre 1957, transférant au juge judiciaire tout litige né du fait d'un dommage causé par un véhicule quelconque (le Tribunal des conflits définissant ce dernier comme tout engin susceptible de se mouvoir par un dispositif propre après de nombreux débats sur ce point) : le but de cette réforme est d'unifier le contentieux de la responsabilité du fait d'accidents de la circulation, et de le transférer tout entier à la juridiction judiciaire, dans un souci de rapidité et de simplicité procédurales. [...]
[...] La création et le développement de cet ordre de juridiction dérogatoire aux juridictions judicaires correspondent donc parfaitement à la volonté déjà présente dans l'esprit révolutionnaire de faire du juge administratif un juge extérieur à l'ordre juridictionnel judiciaire, afin de lui soumettre tout entier le contentieux de l'Administration. L'année 1987, parachevant les constructions formelle, avec la création des Cours administratives d'appel, dernière juridiction de l'ordre juridictionnel administratif, et matérielle, avec la constitutionnalisation des compétences du juge administratif par la décision Conseil de la Concurrence, de l'ordre juridique administratif, a été une année décisive dans la construction d'un juge administratif conçu historiquement comme l'unique juge de l'Administration. [...]
[...] Ces lois relèvent toutefois de domaines précis, et c'est la jurisprudence qui a réellement attribué au juge judiciaire de véritables compétences dérogatoires générales, en vertu de ses attributions propres, que ne possède pas le juge administratif. B La compétence du juge judiciaire en vertu de ses attributions spécifiques Le juge judiciaire est le juge de droit commun et dispose d'attributions spécifiques : à ce titre, il lui est permis de connaître de litiges intéressant normalement le juge administratif parce que mettant en cause l'Administration. Ainsi, en tant que juge pénal d'une part, et gardien de la propriété privée et de la liberté individuelle d'autre part, la jurisprudence lui a attribué la compétence sur certaines matières. [...]
[...] Le juge pénal, d'abord, peut connaître dans certaines circonstances de litiges intéressant des personnes publiques. En effet, l'article L. 111-5 du Code pénal l'autorise à interpréter mais également à apprécier la légalité d'actes administratifs dont cette appréciation dépend l'issue du procès. Son pouvoir est donc considérablement augmenté à cet égard, en ce que le juge judiciaire est normalement obligé de poser une question préjudicielle devant le juge administratif dans un tel cas, selon la jurisprudence constante de l'arrêt Septfonds du 16 juin 1923. [...]
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