Selon l'ancien président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer « notre législation est dans une large mesure composée d'initiatives européennes qu'elle n'a que le pouvoir d'entériner, combien de ces “paquets” législatifs selon la formule consacrée, nous parviennent-ils définitivement ficelés au point que nous ne puissions plus choisir la couleur du ruban ? ». Cette assertion illustrant l'évolution du droit français sous l'influence du droit de l'Union européenne et plus largement du droit international, contribue à relancer le débat sur l'internationalisation de notre droit administratif.
Dans les premiers temps néanmoins, force est de constater une certaine réticence de la doctrine à admettre qu'un phénomène d'internationalisation, c'est-à-dire d'ouverture sous l'influence du droit international, puisse affecter un droit aussi particulier que le droit administratif. En effet, le droit administratif étant, selon une conception du Doyen Vedel, autant le prolongement du droit constitutionnel que le droit régissant l'action de l'administration et de certaines personnes privées chargées d'une mission de service public, il serait autonome et ne tolérerait pas l'intrusion du droit international dans son domaine.
Toutefois, face à la montée en puissance du droit européen, notamment depuis une trentaine d'années, il ne fait nul doute que le droit français n'a pas échappé à son influence. Cette évolution a cependant pu sembler parfois moins brutale que dans d'autres branches du droit. En effet, la relation nouvelle d'interdépendance entre le droit administratif français et le droit européen impose de ne pas occulter le mouvement ascendant qui a favorisé la genèse du droit européen. Mais si elle a pu paraitre parfois moins directe, l'influence descendante du droit européen n'est pas moins réelle. Il est d'ailleurs intéressant de constater qu'à certains égards, les praticiens et la doctrine n'ont pas perçu toutes les virtualités intrinsèques des normes européennes.
[...] Dès lors, les juridictions nationales n'interviennent qu'à titre subsidiaire et sont fortement contraintes par le mécanisme de question préjudicielle prévu à l'article 234 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. En effet, la Cour estime que cette procédure est une obligation pesant sur les juridictions dont les décisions sont insusceptibles de recours, dans le cas contraire il ne s'agit que d'une simple faculté. En tout état de cause, le juge national est tenu par la réponse de la Cour et ne peut s'y soustraire. [...]
[...] : CEDH mars 1998, Reinhardt et Slimane-Kaïd. : La question s'est d'abord posée pour le Conseil d'Etat luxembourgeois dans l'arrêt CEDH septembre 1995, Procola contre Luxembourg. : CEDH novembre 2006, Sacilor-Lormines contre France. : CEDH octobre 2000, Kulda contre Pologne ; CEDH juin 2002, Lutz contre France. : CE juin 2002, Garde des Sceaux contre Magiera n°239575. : Le Conseil d'Etat ira plus loin en permettant l'engagement de la responsabilité de l'Etat sur ce seul fondement dans l'arrêt CE Sect juillet 2009, Ville de Brest n°195653. [...]
[...] Ainsi, la jurisprudence européenne fortement casuistique en l'espèce n'avait pas énoncé de position générale, se contentant souvent de déclarations de principes comme dans les décisions Ilse Koch contre RFA du 8 mars 1962[76], Golder contre Royaume Uni du 21 février 1975[77] et Campbell et Fell contre Royaume Uni du 28 juin 1984[78]. Le Conseil d'Etat est donc allé plus loin dans ses décisions, M. Boussouar, M. Planchenault et M. Payet du 14 décembre 2007[79], en identifiant toute une catégorie d'actes, pris par l'administration pénitentiaire, qui bénéficient d'une présomption irréfragable de justiciabilité. Faisant écho à la jurisprudence européenne, le contrôle exercé par le juge est donc substantiellement renforcé. [...]
[...] Pour le Conseil d'Etat, la question se pose en des termes similaires en 2007. C'est pourquoi, dans le célèbre triptyque Arcelor[20], le Conseil d'Etat retiendra une analyse fortement inspirée de celle du Conseil constitutionnel et autorisera la censure d'un acte transposant les dispositions claires et inconditionnelles d'une directive communautaire en cas de contrariété à un principe inhérent à l'identité constitutionnelle française. Les juridictions françaises n'ont donc pas hésité à s'appuyer sur la hiérarchie des normes[21] pour encadrer l'influence des nouvelles sources de la légalité administrative. [...]
[...] Georges VEDEL, Le droit administratif doit-il demeurer jurisprudentiel ? EDCE, 1979-1980, page 31 JURISPRUDENCES CC janvier 1975, 74-54 DC CC décembre 1975, 75-59 DC CC février 1982, 82-139 DC CC octobre 1988, Assemblée nationale Val d'Oise CC avril 1992, 92-308 DC CC septembre, 92-312 DC CC juillet 1993, 93-321 DC CC mai 1998, 98-400 DC CC juin 2004, 2004-496 DC CC novembre 2004, 2004-505 DC CC juillet 2006, 2006-540 DC CC mai 610, 2010-605 DC CC août 2012, 2012-653 DC CEDH, 1er juillet 1961, Lawless CEDH mars 1962, Ilse Koch contre RFA CEDH février 1975, Golder contre Royaume Uni CEDH décembre 1976, Handyside CEDH juin 1984, Campbell et Fell contre Royaume Uni CEDH novembre 1984, Rasmussen CEDH 30 novembre 1987, H contre Belgique CEDH 27 août 1991, Demicoli contre Malte CEDH mars 1992, Beldjoudi contre France CEDH septembre 1995, Procola contre Luxembourg CEDH septembre 1996, Gaygusuz CEDH mars 1998, Reinhardt et Slimane-Kaïd CEDH octobre 2000, Kulda contre Pologne CEDH juin 2001, Kress contre France CEDH juillet 2001, Association Ekin CEDH juin 2002, Lutz contre France CEDH février 2003, Chevrol contre France CEDH juin 2005, Bosphorus CEDH mars 2006, Flament contre France CEDH avril 2006, Martinie contre France CEDH novembre 2006, Sacilor-Lormines contre France CEDH février 2008, Association avenir Alet contre France CEDH juin 2009, UFC Que choisir Cote d'Or contre France CJCE juillet 1957, Algera (7/56 et 7/57) CJCE juillet 1964, Costa contre Enel CJCE décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft, (C-11/70) CJCE, Nold mai 1974 CJCE décembre 1974, Van Duyn contre home office (41/74) CJCE avril 1976, Melle Defrenne (43/75) CJCE mars 1978, Simmenthal (106/77) CJCE avril 1979, Ratti (148/78) CJCE 13 décembre 1979, Hauer (C-44/79) CJCE octobre 1980, Roquette frères (145/79) CJCE octobre 1982, Cilfit (283/81) CJCE septembre 1983, Auer (271/82) CJCE octobre 1987, Foto-Frost (314/85) CJCE février 1993, Poucet et Pistre (C-159 et C-160/91) CJCE, SAT contre Eurocontrol janvier 1994 (C-364/92) CJCE 28 octobre 1995, Rutili c. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture