Dans le contentieux de l'excès de pouvoir, l'intérêt à agir équivaut au fait d'être suffisamment concerné par l'acte. Mais si la reconnaissance d'un tel intérêt paraît aisée dans les contentieux de pleine juridiction lorsqu'un droit subjectif a été mis en cause, la question est plus délicate pour le plein contentieux de l'excès de pouvoir, touchant le droit objectif de la légalité. Cette notion apparaît comme l'un des éléments essentiels des conditions d'admission d'un recours pour excès de pouvoir.
Ces conditions sont nombreuses et touchent tant la compétence de la juridiction administrative que la nature de l'acte ou la qualité du requérant. Ce dernier point a été très tôt exigé et développé par le Conseil d'État. Si la capacité d'ester en justice du requérant, inspirée du droit civil, n'a pas changé, l'intérêt à agir a été amené à évoluer au fil de la jurisprudence du Conseil d'État. D'abord peu admis il a été petit à petit élargi.
Ainsi, il conviendra de s'interroger sur cette évolution et finalement sur ce que représente l'intérêt pour agir dans le recours pour excès de pouvoir. De quelle manière la notion d'intérêt du requérant lui donnant qualité pour agir dans le recours pour excès de pouvoir a-t-elle été admise par le Conseil d'État ?
[...] On retiendra à cet égard la définition d'Hauriou de l'intérêt donnant qualité pour agir comme simple intérêt froissé». Ainsi, il s'agira de révéler ici, que le CE a toujours admis relativement largement l'intérêt pour agir, mais également qu'il se place dans une optique visant à l'admettre de plus en plus Le CE a admis, à côté de l'action individuelle, la recevabilité d'actions corporatives. Un recours pour excès de pouvoir peut ainsi être invoqué par un particulier ou une personne morale. [...]
[...] À ce titre, le recours pour excès de pouvoir devrait être ouvert à tous. Seulement, et comme nous venons de le voir, le juge est contraint, pour ne pas engorger les prétoires, de limiter son accès aux seules personnes présentant les qualités nécessaires. Mais, et nous allons le voir, le juge est amené à admettre très largement et de plus en plus cette qualité au requérant afin de restreindre cette limite et de reconnaître quasiment le recours pour excès de pouvoir comme une action populaire, ce qu'avait remarqué Chapus «l'intérêt personnel dont le requérant doit justifier est libéralement apprécié, au point qu'à certains égards le recours pour excès de pouvoir est proche que ce que serait une action populaire». [...]
[...] Il faut également qu'il y ait un lien entre la mesure attaquée et l'objet social de l'organisme. En effet, tel que mentionné par l'arrêt Brouste du CE en 1987 et à titre d'exemple, une association de commerçants ne peut s'attaquer à un permis de construire le lien ici n'a pas été démontré. C'est suivant cette optique que le CE a admis le recours de la ligue nationale de parents d'élève pour défendre la liberté d'enseignement, ou d'un syndicat vis-à-vis d'un acte sur les conditions des travailleurs étrangers. [...]
[...] À titre d'exemple on rappellera l'arrêt Norlevo du CE, en l'espèce des parents agissaient à l'encontre d'un acte ayant pour vocation la distribution de pilules du lendemain dans le cadre d'établissements scolaires publics. Les parents ayant leur enfant dans un établissement privé la Cour a décidé de les débouter au motif qu'ils n'avaient pas d'intérêt pour agir. On pourrait également rappeler la décision Hoffer de 2005. Ensuite, l'intérêt doit être direct en ce sens que le grief subi par le requérant doit émaner directement de l'acte incriminé. [...]
[...] Mais, au regard de la jurisprudence, et notamment de l'arrêt Goubert de 1938, le juge admet que son défaut lors de l'introduction de l'instance ne constitue pas une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance. Ainsi, l'intérêt donnant qualité pour agir dans le recours pour excès de pouvoir a été admis de plus en plus largement par le juge en vue de garantir à un maximum de personne le droit de soulever une illégalité, et donc de préserver l'état de Droit mis à mal par l'administration. [...]
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