Connaître le droit des travaux publics, ne peut se faire sans avoir au préalable passé plusieurs heures sur le principe d'intangibilité des ouvrages publics. D'après cette notion, le juge ne peut porter atteinte à l'intégrité d'un ouvrage public. Le terme ouvrage public ne fait pas l'objet d'une définition précise la jurisprudence. Il entretient des liens étroits avec d'autres éléments importants du droit administratif des biens. L'ouvrage public se superpose aux travaux publics, sans pour autant s'y confondre, et si dans la plupart des cas ces deux concepts représenteront la même chose, il existe des variations qui empêchent de faire « fusionner » ces notions. Un ouvrage public doit d'abord avoir le caractère d'un bien immobilier. Ensuite, il nécessite l'intervention humaine pour sa réalisation. Enfin il faut comprendre qu'un ouvrage public est en grande partie guidé par un but d'intérêt général. Ce faisceau d'indices permet de comprendre, autant que faire ce peu, cet élément prétorien du droit public. Le plus souvent l'ouvrage public est implanté sur le domaine public.
[...] Ensuite la Haute juridiction Judiciaire, constatant dans la jurisprudence du Conseil d'Etat Epoux Denard et Martin, du 19 avril 1991 les prémices de l'effritement de l'intangibilité de l'ouvrage public, décide de revenir sur sa jurisprudence du 17 février 1965 et condamne la théorie de l'expropriation de fait Elle le fait grâce à un arrêt du 6 janvier 1994 Consorts Baudon de Mony contre EDF. Mais si le juge judiciaire prend la parole dans certaines circonstances spéciales il se tait lorsque des décisions de principe doivent être prises. En effet, même lorsque toutes les conditions nécessaires pour un revirement de jurisprudence sont réunies, la Cour de Cassation ne se prononce pas sur la question de la remise en cause du principe de l'intangibilité des ouvrages publics. Elle préfère adopter une position d'attente, par respect de la séparation des autorités administratives et judiciaires. [...]
[...] C'est plus vers cette possibilité que le Conseil se serait porté s'il avait entendu protéger l'intangibilité des ouvrages publics contre le pouvoir d'injonction dont dispose le juge administratif. Cependant il ne semble pas que le Conseil Constitutionnel ait été saisi d'une de ces deux lois. Mais cela ne l'empêcherait pas d'intervenir sur leur contenu, en effet il suffit qu'il soit saisi d'une loi qui s'y réfère même implicitement comme en témoigne une décision du 25 juillet 1989 "considérant que la régularité, au regard de la constitution, des termes d'une loi promulguée peut être utilement contestée à l'occasion de la soumission au Conseil constitutionnel de dispositions législatives qui la modifient, la complètent, ou affectent son domaine". [...]
[...] Le plus souvent l'ouvrage public est implanté sur le domaine public. L'intangibilité, d'après la définition classique d'un dictionnaire profane représente le caractère quelque chose qui n'est pas perceptible par le toucher C'est en 1853, que le principe de l'intangibilité de l'ouvrage public a été dégagé par le conseil d'Etat, dans sa jurisprudence, Robin de Grimaudière, par le truchement de laquelle il interdisait au juge de porter atteinte à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public. Il tire sa légitimité de l'ancien adage ouvrage public mal planté ne se détruit pas L'intangibilité de l'ouvrage public a depuis évolué sous l'égide des juges et désormais il s'accommode de deux propositions. [...]
[...] Mais parce qu'il est aussi le juge de la voie de fait, et que l'emprise irrégulière d'une propriété privée en est constitutive d'une, le juge judiciaire ne peut rester muet, et il intervient de manières impromptues lorsque l'occasion lui est donnée. Tout d'abord par le truchement de plusieurs dérogations le juge judiciaire intervient directement sur l'intangibilité de l'ouvrage public. Si les travaux sont encore en cours, le juge judiciaire s'autorise à les interrompre, comme en témoigne une jurisprudence ancienne du 28 janvier 1924, de la Cour de Cassation. [...]
[...] Mais l'avènement de la charte des droits fondamentaux annexé au traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007, risque de remédier à cela. Le CJCE serait alors beaucoup moins timoré que la CEDH pour garantir l'effectivité du droit de propriété. En effet alors que la CEDH doit faire des concessions et statuer en considérant les nombreux pays, souvent juridiquement différents, qui seront soumis a ses décisions, le CJCE devrait être beaucoup plus autoritaire. Ainsi si les modifications apportées par les juges nationaux auraient pu satisfaire la CEDH, la CJCE pourrait se montrer moins clémente et quand même sanctionner l'intangibilité de l'ouvrage public. [...]
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