Les actes administratifs unilatéraux, par opposition aux actes administratifs contractuels, manifestent l'expression de la volonté unilatérale de l'administration. Celle-ci, en vertu du privilège du préalable (CE Ass, 2 juillet 1982, Huglo) peut imposer sa volonté aux administrés sans leur consentement. Ces actes administratifs unilatéraux peuvent émaner de personnes publiques ou de personnes privées gérant un service public. Ils constituent donc une catégorie d'actes très diversifiés. En effet, tous ne sont pas normatifs.
Il convient donc, classiquement, d'opposer les actes administratifs décisoires qui produisent des effets de droit, aux actes administratifs non décisoires tels que les circulaires ou les directives qui, en théorie, n'en produisent pas. Par ailleurs, depuis les années 1970, une nouvelle distinction est apparue entre les actes réglementaires et les actes non réglementaires. Au regard de ces différentes distinctions, il convient de s'interroger sur le régime de ces actes administratifs unilatéraux, et plus particulièrement sur leur intangibilité.
L'intangibilité renvoie au maintien de l'acte, à sa non modification ou suppression. Dès lors, les actes administratifs unilatéraux sont-ils susceptibles d'être modifiés, ou sont-ils intangibles, c'est-à-dire figés dans l'ordonnancement juridique ? Plus un acte est susceptible d'être contesté, plus sa valeur est faible. L'intangibilité semble donc bénéfique, dans la mesure où elle garantit la stabilité juridique. Toutefois, ne pas modifier les actes administratifs unilatéraux revient à figer le droit, et à l'empêcher d'évoluer. Par conséquent, le législateur et la jurisprudence ont admis la mutabilité de certains actes administratifs unilatéraux. Qu'ils soient à portée individuelle ou réglementaire, ils sont susceptibles d'en être expulsés par plusieurs techniques : le juge administratif saisi d'un recours pour excès de pouvoir contre un acte administratif illégal pour annuler cet acte. Par ailleurs, l'autorité administrative peut abroger l'acte ou le retirer, sous conditions. Quels effets produiront alors l'abrogation ou le retrait de l'acte ? Quelles seront les conséquences pour les bénéficiaires ? Pour les tiers ? Qui peut modifier, et dans quel délai ?
En outre, quels sont les actes administratifs unilatéraux susceptibles d'être contestés ? L'étude des actes non décisoires sera exclue de la démonstration puisque ces actes ne contiennent aucune décision susceptible d'être remise en cause, ne font pas grief. Au sein des actes décisoires, on oppose les actes réglementaires et les actes non réglementaires. En effet, les actes réglementaires (et certaines décisions d'espèce) créent des droits, mais ceux-ci ne sont pas susceptibles de devenir acquis, c'est-à-dire de s'opposer à une suppression. Les droits créés ne valent que tant que ces actes sont en vigueur, et les administrés n'ont pas de droit à leur maintien. En revanche, les actes individuels qui représentent la grande majorité des actes non réglementaires, créent des droits susceptibles d'être acquis pour leurs bénéficiaires. Ils sont donc par principe intangibles.
Il conviendra donc de présenter l'intangibilité des actes réglementaires (I), avant d'étudier celle des actes individuels (II).
[...] Cette possibilité d'abrogation permet, en définitive, d'éviter un recours contentieux. Toutefois, toutes ces facultés pour l'administration de procéder elle-même à la modification ou à l'abrogation de ses actes (spontanément ou à la demande d'un administré) méconnaissent gravement le principe d'intangibilité, et la sécurité juridique qui lui est inhérente. La jurisprudence a donc posé des limites pour freiner l'action de l'administration en ce domaine Les conditions posées par la jurisprudence Tout d'abord, il convient de rappeler les effets de l'abrogation. Elle est la disparition pour le futur des effets d'un acte. [...]
[...] Il existe aussi une obligation d'abroger, comme pour les actes réglementaires, lorsque leur illégalité est apparue postérieurement à leur édiction (CE sect novembre 1990, Association les verts) En définitive, le principe du respect des droits acquis s'incarne dans l'énoncé suivant : Les autorités administratives ne peuvent pas retirer ou abroger les actes ayant légalement permis la constitution de droits acquis Toutefois, le juge administratif, suivi par le législateur, ont admis des tempéraments à ce principe d'intangibilité. Les possibilités d'abrogation ou de retrait Les actes qui créent des droits à leur maintien semblent s'opposer à ce que l'administration les abroge. Celle-ci a été admise par le juge administratif, sous de très strictes conditions. L'abrogation ne sera pas possible pour un motif d'inopportunité ; l'illégalité peut seule justifier l'abrogation. [...]
[...] Enfin, le retrait des actes réglementaires illégaux est impossible lorsque des actes individuels ont été pris sur le fondement de ce règlement illégal. Le retrait du règlement entraînerait un vide juridique, puisque l'acte individuel créateur de droits ne reposerait sur aucun texte. Par conséquent, l'administration peut retirer l'acte pour illégalité ou opportunité, à la seule condition qu'aucune décision créatrice de droit n'ait été prise sur ce fondement (CE avril 1988, Société civile Le Tahiti). La pratique du retrait est donc strictement encadrée pour protéger les droits nés des actes administratifs. [...]
[...] Enfin, les décisions non publiées peuvent être retirées dans les deux mois de la signature, solution que reprendra la jurisprudence Ternon. La loi tempère donc l'impossible retrait de la jurisprudence Eve, pour l'autoriser dans des conditions de délai. Ces possibilités de retrait et d'abrogation visent à permettre la conciliation entre la préoccupation de l'administration d'annuler ses décisions illégales, et le respect des droits conférés, la sécurité juridique des titulaires de ces droits même illégalement créés, conformément au principe de l'intangibilité des effets des décisions. [...]
[...] Il fait en effet disparaître l'acte pour l'avenir, mais également pour le passé. Les possibilités de retrait des décisions créatrices de droit ont été posées par le législateur et la jurisprudence, au terme d'une évolution. A l'origine, le retrait fortiori l'abrogation) des actes créateurs de droit n'était possible qu'en raison de leur illégalité et tant qu'ils n'étaient pas devenus définitifs (CE novembre 1922, Dame Cachet). Cela signifie que l'administration ne pouvait pas annuler son acte tant que le juge pouvait le faire. [...]
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