Dissertation, acte, administratif, unilatéral, droit, retrait, abrogation, droits acquis, règlement, individuel, espèce, intangibilité
« Les cents dernières années nous ont permis d'accroître infiniment notre connaissance […], mais de là s'en suit que tout l'ordre que nous gagnons dans les détails, nous le reperdrons dans l'ensemble, de sorte que nous disposons de toujours plus d'ordres et de moins en moins d'ordre » Robert Musil dans L'homme sans qualités (1930). En effet, face au renforcement exponentiel de notre savoir et des techniques, l'administration doit sans cesse se renouveler, recréer, intervenir là où elle n'est pas encore intervenue, mais aussi revenir sur les actes qu'elle a pu édicter, mais qui sont devenus obsolètes voire illégaux du fait de l'évolution des circonstances de fait ou de droit. Toutefois, elle ne saurait le faire sans tenir compte des droits qu'elle confère aux particuliers par l'édiction de certains actes ; il y a là un impératif de sécurité juridique qu'il faut à tout prix préserver.
En effet, l'administration bénéficie du « privilège du préalable » (règle fondamentale de droit public depuis l'arrêt Huglo du Conseil d'Etat (CE, Ass., 2 juillet 1982)) qui lui permet de prendre des décisions par le biais d'actes unilatéraux qui vont modifier l'ordre juridique conférant des prérogatives aux particuliers ou mettant à leur charge des obligations sans leur consentement.
[...] Enfin, le retrait de ces actes est possible à tout moment pour les actes individuels. Pour les actes réglementaires, le retrait sticto sensu n'est envisageable qu'en tant que celui-ci n'est pas devenu définitif et ce pour motifs d'opportunité ou de légalité. Toutefois, il faudra veiller à ce qu'aucun acte susceptible de créer des droits acquis n'ait été pris sur le fondement de ce règlement. On voit ainsi que les conditions d'abrogation et de retrait des actes non créateurs de droit sont plutôt souples favorisant ainsi l'impératif de mutabilité et d'adaptabilité des règlements au détriment du principe d'intangibilité de l'acte administratif. [...]
[...] Santulli, Les droits acquis, RFDA 2001, pp. 87-92). Aussi, le professeur Seiller considère qu'il serait plus satisfaisant de se référer aux droits susceptibles d'être acquis Pour lui, les actes créateurs de droits susceptibles d'être acquis présentent un caractère individuel, mais toutes les décisions individuelles prises dans l'exercice d'un pouvoir d'appréciation sont susceptibles de créer des droits (CE 20 février 2008, Gener), toutes les décisions prises dans ce cadre n'en créent pas et ne créent pas les mêmes. C'est ainsi que le juge administratif distinguera les actes qui doivent bénéficier d'une intangibilité à brève échéance (permis de construire) et ceux qui doivent bénéficier d'une intangibilité continue (nomination, décorations C'est en effet lorsque l'exigence de légalité sur le besoin de stabilité juridique que le juge administratif sera amené à envisager les conditions de disparition de tels actes et ce dans la bienveillance de la sécurité juridique des administrés. [...]
[...] En outre, on distinguera les actes administratifs réglementaires et les actes administratifs non réglementaires. Ces premiers se caractérisant par des dispositions à portée normative et à caractère général, tandis que les seconds se réfèrent à des actes individuels s'adressant à des personnes nominativement désignées. C'est alors qu'on relèvera que les premiers ne créent pas de droits acquis Nul n'a le droit acquis au maintien d'un règlement tandis que les seconds le peuvent. C'est là que l'intangibilité de l'acte administratif et la nécessité d'une sécurité juridique trouvent tout leur sens ; ne serait-ce que pour des raisons pratiques et plus fondamentalement il en va des libertés de chacun. [...]
[...] L'abrogation constitue une forme de modulation dans le temps des effets des actes administratifs. C'est ainsi qu'il peut arriver que dans des circonstances de fait ou de droit nouvelles, l'abrogation devient une véritable obligation. Ce principe fut posé par l'arrêt Despujol du Conseil d'Etat du 10 janvier 1930 : il appartient à tout intéressé, dans le cas où les circonstances qui ont pu motiver légalement un règlement municipal ont disparu, de saisir à toute époque le maire d'une demande tendant à la modification ou à la suppression de ce règlement Ce principe sera complété un peu plus tard par l'arrêt Compagnie Alitalia du Conseil d'Etat du 3 février 1989 qui permet l'abrogation d'un règlement illégal ab initio : l'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenu d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date. [...]
[...] Aussi en présence d'une décision individuelle tacite créatrice de droits acquis illégale : il y a une incertitude (Le professeur Seiller envisage le maintien du régime juridique antérieur, qui admettait leur abrogation tant qu'elles n'étaient pas devenues définitives Quant aux conditions de leur retrait, celui-ci est systématiquement conditionné par l'illégalité de l'acte en question. Celui-ci, par son importance du fait de ses effets, ne saurait être malmené, il en va de la sécurité juridique des administrés. Les deux conditions quant au retrait de tels actes ont été posées par un arrêt du Conseil d'Etat, Dame Cachet, du 3 novembre 1922 : soit l'illégalité et le délai de recours contentieux mois). [...]
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