L'acte administratif s'applique sans limitation de durée et la désuétude n'existe pas en droit administratif. Cela signifie-t-il que l'acte administratif est placé « hors du temps » et produit ses effets indépendamment des circonstances de droit et de fait qui l'ont engendré ?
Les effets du temps sur les actes administratifs sont en réalité plus complexes car ils dépendent d'exigences contradictoires :
D'une part l'exigence d'adaptation qui vise à garantir la pertinence des actes administratifs et leur légalité, d'autre part l'exigence de sécurité juridique qui suppose la permanence des droits des administrés.
Cette conciliation entre pertinence et permanence se fait à travers une différenciation entre les actes administratifs. Il apparaît nécessaire de définir ces notions.
Globalement, par acte administratif on se réfère à l'ensemble des actes unilatéraux de l'administration. Il convient donc d'ores et déjà d'écarter les contrats administratifs de la question.
Parmi ces actes unilatéraux, on distingue les actes réglementaires qui ont une portée générale et impersonnelle, des actes non réglementaires dont les destinataires sont clairement identifiés.
L'objectif de permanence suppose l'intangibilité des droits acquis. On opère donc une distinction entre les actes non créateurs de droits et les autres. Tous les règlements sont des actes créateurs de droits. Les actes individuels sont en règle générale des actes créateurs de droits mais il y a de nombreuses exceptions.
Quant à l'objectif de pertinence, il suppose la disparition des actes irréguliers dès l'origine ou devenu irréguliers à la suite d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait. La régularité de l'acte est donc un élément central de l'arbitrage.
Il faut enfin distinguer le retrait de l'abrogation des actes administratifs. Le retrait est un mode de disparition rétroactif des actes. Cela explique qu'il soit en principe interdit. A l'inverse, l'abrogation ne vaut que pour l'avenir et laisse subsister les effets passés de l'acte. Elle est donc plus largement admise. En somme, l'abrogation d'un acte (pour l'avenir) ne se heurte pas, comme le retrait, au principe de non-rétroactivité des actes administratifs.
[...] Ce principe a un champ d'application général. Dans l'arrêt Despujol du 10 janvier 1930, le Conseil d'Etat a admis qu'en cas de changement des circonstances qui avaient motivé un règlement, tout intéressé pouvait demander à son auteur de le modifier ou de l'abroger et, en cas de refus, saisir le juge de l'excès de pouvoir. Dans l'arrêt Alitalia, le décret de 1983 était invoqué. Ce décret cherche à obliger l'administration à faire droit, sans condition de délai, à toute demande d'abrogation d'un règlement illégal, que cette illégalité ait existé dès l'origine ou qu'elle résulte d'un changement de circonstances. [...]
[...] Ces principes cadrent mal la règle de la décision implicite. La loi du 17 juillet 1900 modifiée par la loi du 12 avril 2000 prévoit que lorsque l'administration garde le silence pendant deux mois sur la demande d'un administré, à l'expiration de ce délai, le silence de l'administration équivaut à une décision implicite de rejet. Le Conseil d'Etat a considéré que le requérant dispose d'un nouveau délai de deux mois pour former son recours en excès de pouvoir à compter de l'expiration du délai de formation de la décision implicite. [...]
[...] En droit civil, la question de l'influence du temps sur la légalité d'un acte amène à traiter des effets futurs et des effets rétroactifs. Voyons comment cette distinction entre avenir et rétroactivité se caractérise pour les actes administratifs. L'acte administratif ne dispose que pour l'avenir : l'abrogation L'action administrative doit s'adapter constamment à la satisfaction de l'intérêt général et à son évolution. De cette nécessité découle deux règles : l'administration est d'une part libre d'abroger les effets futurs de ses actes pour des considérations d'opportunité d'autre part contrainte d'abroger les effets futurs de ses actes en cas de changement des circonstances de fait ou de droit L'abrogation possible par l'administration des effets futurs de ses actes pour des considérations d'opportunité L'administration est libre d'abroger ses actes sous réserve de la règle du parallélisme des formes selon laquelle la décision d'abrogation doit être prise par l'autorité qui a édicté l'acte abrogé ou son supérieur hiérarchique et selon la même procédure. [...]
[...] CHAPUS -CE 9/06/1978, SCI bd Arago, Leb 237, aussi dans GAJA -CE 14/01/1916, Camino, in GAJA -Droit du contentieux administratif, 10è édition, R. [...]
[...] Elle doit être facilitée pour permettre à l'administration de s'adapter à des situations nouvelles. Elle ne peut être entravée que par la considération des droits acquis. Elle est toujours possible pour les actes à simple effet de droit, sans condition de légalité, pour simple opportunité. La solution est constante pour les règlements : si les intéressés ont droit à leur application tant qu'ils sont en vigueur, il n'ont pas droit à leur maintien. Un règlement peut même être abrogé avant le terme qu'il s'est fixé, sans qu'un principe de confiance légitime puisse s'y opposer au regard du droit interne (CE 27 janvier 1961, Vannier). [...]
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