L'activité administrative , comme toute activité, peut être génératrice de dommages. Les victimes désireront que ces dommages soient réparés, mais dans quelles conditions. La théorie de la responsabilité présente une extrême importance, pratique et théorique. La possibilité d'obtenir réparation des dommages imputables à la puissance publique est une pierre essentielle à l'Etat de droit.
L'irresponsabilité de la puissance publique apparaissait dans la première moitié du 20° siècle comme un corollaire de la souveraineté. Elle ne fut admise par le Tribunal des Conflits qu'à partir de sa décision « Blanco » (TC 8 février 1873 Blanco). Cette responsabilité n'est d'ailleurs, « ni générale ni absolue, elle a ses règles spéciales ». Elle est l'œuvre de la jurisprudence qui va lui donner des solutions originales, dérogatoires au droit commun. L'arrêt « Blanco » va, outre admettre la responsabilité autonome de l'Etat, préciser qu'elle ne peut être engagée que devant les juridictions administratives.
Notre problématique est ici plus particulière. Nous devons nous interroger sur les fondements de la responsabilité de la police administrative . Il nous faut donc étudier comment la responsabilité de la puissance publique peut être engagée du fait des activités de police, quels sont les éléments nécessaires à sa mise en cause. Les actions et inactions de police administrative causent fréquemment de dommages aux personnes et aux biens. Il convient de préciser comment les victimes du fonctionnement défectueux des services de police peuvent obtenir réparation.
De plus notre démarche doit se limiter à la responsabilité de la police, excluant par la même la responsabilité personnelle de l'agent fautif. C'est la décision « Pelletier » (TC 30 juillet 1873) qui distingue des faits dommageables, ceux qui peuvent être appréciés en dehors du comportement de l'administration constituant des fautes personnelles, et les fait dommageables non détachables constituant alors des fautes de service ; à l'exclusion des hypothèses de cumul des responsabilités ( CE 26 juillet 1918 « Epoux Lemonnier »). C'est par l'arrêt « Tomaso Gréco » (CE 10 janvier 1905), que les vestiges de l'irresponsabilité ont disparu pour la police. L'Etat doit être déclaré pécuniairement responsable des fautes de services commises par ses agents. Depuis son admission, la responsabilité de la police administrative ne va cesser de se développer. Limitée à l'origine aux hypothèses d'intervention dommageables, elle est actuellement admise aussi bien pour les dommages causés par les actions positives que par les inactions du service de police. La décision « Doublet » ( CE section, 14 décembre 1962) précise que l'inaction d'une autorité de police n'est entachée d'illégalité que dans la mesure ou « en raison de la gravité du péril résultant d'une situation particulièrement dangereuse pour l'ordre public, cette autorité en n'ordonnant pas les mesures indispensables pour faire cesser ce péril grave méconnaît ses obligations légales». Cette tendance favorable au principe de la responsabilité de la police du fait de ses inactions ou déficiences allait s'accentuer.
De ce rappel historique il faut constater la constance du fait générateur de cette responsabilité.
Celle-ci était dépendante de la commission d'une faute lourde, d'un manquement à une obligation préexistante. Cette tendance s'expliquait principalement par la difficulté des taches accomplies. Dès lors qu'une mission est délicate en raison de sa nature, du risque encouru de l'urgence ,de l'imprévisibilité de la menace, la jurisprudence consacre le principe selon lequel la responsabilité ne peut être engagée que pour une faute lourde. Pourtant dés 1895 (CE 21 juillet 1895 « Cames ») Le Conseil d'Etat admet que la puissance publique puisse voir sa responsabilité engagée du fait du risque, et même du fait de la rupture du principe d'égalité devant les charges publiques (CE 30 novembre 1923 « Couitéas »). Ces décisions devaient permettre le développement d'une responsabilité sans faute de l'administration, qui tend a se généraliser. Il faut cependant indiquer que l'abandon de la faute lourde n'entraîne pas nécessairement un bouleversement de l'état du droit . Car dans les domaines ou une faute lourde a été abandonnée, le juge continue de prendre en compte les difficultés particulières de l'activité en cause. « Le passage à un régime de responsabilité pour faute non qualifiée n'est pas un passage à un système d'obligation de résultat. »1
Au delà de la dualité des régimes de responsabilité pour faute lourde et sans faute, il importe de noter que le régime contentieux est commandé essentiellement par la spécificité des taches confiées à la police. La condition technique de mise en œuvre de la responsabilité varie en fonction de la plus ou moins grande difficulté des missions accomplies par le service de police. Le juge distingue les activités effectuées dans des conditions difficiles où la faute lourde est requise et les activités ne présentant pas de difficultés où une faute simple suffit.
Le Conseil d'Etat dans sa décision « Société européenne location service » du 5 avril 1991 applique ce principe.
Pourtant, nonobstant cette « summa divisio », la jurisprudence actuelle tend a généraliser le recours à un régime de responsabilité sans faute. L'exigence d'une faute lourde a été successivement abandonnée en matière médicale ( CE Assemblée 10 avril 1992 Epoux V), en matière de transport médical d'urgence (CE Section 13 juillet 1997 Theux), de services de secours et de sauvetage en mer (CE 13 mars 1998 M. Amenon et autres).
Notre problématique est dès lors posée.
Il nous faudra étudier comment, au travers la distinction de l'intervention de la police administrative au cours d'activités présentant ou non des difficultés, la jurisprudence va réciproquent et initialement exiger une faute lourde et une faute simple, pour tendre a systématiser une responsabilité sans faute.
La responsabilité de la puissance publique pour les missions de police effectuées dans des conditions difficiles appelle à un déclin de la faute lourde (I) , mouvement identique en l'absence de difficultés, la responsabilité sans faute se substituant à la nécessite d'une faute simple. (II)
[...] Mais ce régime de responsabilité ne va bénéficier qu'à une catégorie de victime : les tiers. C'est à dire des personnes étrangères à l'opération qui a occasionné l'accident. C'est d'ailleurs le cas dans l'arrêt Tomaso Greco. Les victimes doivent pour être indemnisés établir l'existence d'une faute à l'encontre du service de police, mais le Conseil d'Etat n'exige pas la preuve d'une faute lourde (CE 27 juillet 1951 D. Auberge et Dumont). La notion d'armes dangereuses a été interprétée de manière large. [...]
[...] Un rapprochement entre la responsabilité pour faute simple et sans faute va être opérer. Nous considérons que le critère d'appréciation est identique : la constatation du dommage ou de la faute. Cette démarche semble également justifiée pour une meilleure présentation de la rupture avec le régime de la faute lourde. Différentes hypothèses de responsabilité sans faute doivent être abordées, les plus classiques jusqu'aux actuelles interrogations de la jurisprudence. Le refus d'intervention de la police, sil est justifié par des menaces graves à l'ordre public ne peut être fautif. [...]
[...] Nous devons nous interroger sur les fondements de la responsabilité de la police administrative. Il nous faut donc étudier comment la responsabilité de la puissance publique peut être engagée du fait des activités de police, quels sont les éléments nécessaires à sa mise en cause. Les actions et inactions de police administrative causent fréquemment de dommages aux personnes et aux biens. Il convient de préciser comment les victimes du fonctionnement défectueux des services de police peuvent obtenir réparation. De plus notre démarche doit se limiter à la responsabilité de la police, excluant par la même la responsabilité personnelle de l'agent fautif. [...]
[...] Depuis son admission, la responsabilité de la police administrative ne va cesser de se développer. Limitée à l'origine aux hypothèses d'intervention dommageables, elle est actuellement admise aussi bien pour les dommages causés par les actions positives que par les inactions du service de police. La décision Doublet ( CE section décembre 1962) précise que l'inaction d'une autorité de police n'est entachée d'illégalité que dans la mesure ou en raison de la gravité du péril résultant d'une situation particulièrement dangereuse pour l'ordre public, cette autorité en n'ordonnant pas les mesures indispensables pour faire cesser ce péril grave méconnaît ses obligations légales». [...]
[...] Egalement lorsque l'autorité de police s'est abstenue d'exercer son pouvoir de contrôle. (CE 13 février 1942 Ville de Dole »).Une faute simple peut aussi découler d'une autorisation de police contraire aux règles de la sécurité. Mais la faute de la victime joue un rôle exonératoire important. L'obligation de prévention de signalisation, d'édiction, n'existe que pour les dangers excédant ceux contre lesquels les intéressés doivent personnellement se prémunir. Dans sa décision Amoudruz (CE 23 mai 1958), le Conseil d'Etat devait considérer que les graves imprudences commises par les frères alors même qu'ils ne pouvaient ignorer le danger, ne saurait engager la responsabilité de la commune de Houlgate sur le fondement de la faute simple. [...]
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