« Le propre de la souveraineté est de s'imposer à tous sans qu'on puisse réclamer d'elle aucune compensation ». M. LAFERRIERE justifiait ainsi dans son Traité de 1887 du principe d'irresponsabilité de l'Administration qui, ayant succédé au roi, ne pouvait comme lui mal faire, aucun tribunal n'était alors nécessaire pour juger cette dernière. Mais cette irresponsabilité connaissait déjà à l'époque des limites. Il était ainsi traditionnellement reconnu la réparation des dommages causés aux propriétés par des travaux publics . C'est à la fin du XIXème siècle que l'on assiste à la reconnaissance de la responsabilité de l'Etat, phénomène en perpétuel essor. Le développement de l'Etat-Providence faisant s'accroître les éventualités de dommages du fait de l'interventionnisme grandissant de l'Etat. En 1873 le Tribunal des Conflits lors de son célèbre arrêt BLANCO énonçait enfin le principe selon lequel « la responsabilité que peut incomber à l'Etat pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu'il emploi dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil […] cette responsabilité n'est ni générale ni absolue ; elle a ses règles spéciales qui varient. […] » Dès lors, « l'autorité administrative est seule compétente pour en connaître. » Le droit administratif devenant alors autonome depuis cette décision. Cependant, le régime de la responsabilité administrative a continué à se développer et à se modifier, suivant un principe de juste indemnisation des victimes, phénomène régissant actuellement d'autres domaines du Droit comme le Droit civil . La responsabilité administrative est en principe une responsabilité pour faute, ne pouvant donc être engagée que lorsque la victime rapporte la preuve d'une faute de l'Administration. Le Conseil d'Etat et le Tribunal des Conflits (deux plus hautes instances ayant compétence pour juger l'Administration) ont vite distingué les notions de faute personnelle et de faute de service, technique leur permettant de cumuler les responsabilités de l'Administration et de ses fonctionnaires toujours dans un souci de juste indemnisation des victimes. La possibilité étant laissée à l'Administration d'engager au civil une action récursoire à l'encontre de ses employés dans certains cas. Mais les tribunaux appliquent une autre distinction cette fois-ci lors de la qualification de la faute, ils estiment en effet que de manière générale une faute simple de l'administration suffit à engager la responsabilité de cette dernière, à l'exception des activités particulièrement délicates à exercer pour lesquelles une faute lourde peut être requise. Il existe en outre un régime de responsabilité sans faute de l'Administration, plus étendu qu'en matière civile, et fondé sur les notions de risque et de rupture de l'égalité devant les charges publiques, le Législateur étant déjà intervenu dans des domaines bien précis pour instaurer des régimes législatifs de responsabilité. Il s'agit dès lors de savoir dans quelle mesure à l'heure actuelle est-il encore possible de parler d'une responsabilité de l'Administration fondée sur la faute, comme celle-ci était traditionnellement reconnue ? Pour cela nous étudierons tout d'abord le principe selon lequel la responsabilité de l'Administration est une responsabilité pour faute, cette dernière pouvant recouvrir plusieurs qualifications juridiques (I), puis nous envisagerons au-travers des travaux publics et des actes médicaux, sa responsabilité pour faute présumée et l'ouverture à un régime de responsabilité sans faute (II).
[...] La faute lourde est ainsi encore nécessaire, outre le service des postes et télécommunications dont le contentieux relève du judiciaire depuis la loi du deux juillet 1990, dans le domaine des activités, de police administrative, de contrôle et de tutelle et des juridictions administratives. Ainsi, concernant les activités de police administrative, la jurisprudence distingue entre les opérations juridiques de police générale (mesures prises dans des bureaux et ne présentant pas de difficultés particulières, la faute simple suffisant ici) et les opérations matérielles de terrain en vue du maintien de l'ordre qui exigent la faute lourde lorsqu'elles rencontrent des difficultés particulières (CE 13 mars 1925, Clef). [...]
[...] La responsabilité de l'Administration est engagée sans faute dans l'exercice des activités de travaux publics pour deux raisons, l'existence d'un risque ou bien la rupture de l'égalité devant les charges publiques. La responsabilité sans faute de l'Administration fondée sur le risque concerne les tiers victimes d'accidents de travaux publics. Par principe, ceux-ci sont privilégiés dans leur droit à indemnisation puisque soumis à un régime de responsabilité sans faute, l'Administration devra les rembourser sans possibilité d'exonération (CE 1971, Département du Var). [...]
[...] CE 11 février 2005, GIE Axa Courtage : responsabilité de l'Etat gardien du mineur. CE 1er février 2006, Garde des Sceaux contre MAIF : responsabilité cumulative de l'association gardienne et de l'Etat à l'origine des mesures libérales à l'origine du dommage. Notamment CE 27 juillet 1990, Bridet : qualité de collaborateur appliquée aux appelés du contingent. Principe mis en place dans le Préambule de 1946 : solidarité de tous les Français CE 14 janvier 1938, Société des produits laitiers La Fleurette janvier 1944, Caucheteux et Desmonts janvier 1963, Bovero, enfin juillet 2003, Association pour le développement de l'aquaculture. [...]
[...] Le Conseil d'État y acceptait pour la première fois d'engager la responsabilité de l'État sur le fondement d'une faute qualifiée, commise lors d'activités des services de police). CE 21 juin 2000, Commune de Roquebrune-Cap-Martin et CE 6 octobre 2000, Commune de Saint-Florent pour un exemple de faute lourde retenue. CE assemblée novembre 2001, Kechichiam. Cette jurisprudence étant susceptible de s'étendre au contrôle exercé par les autres autorités de régulation selon J. Morand-Devillier (in Cours de droit administratif, neuvième édition, édition Monchrestien. [...]
[...] Seuls deux régimes législatifs de responsabilité sans faute existent. Ils concernent les attroupements et manifestations ainsi que les accidents médicaux. Dans le premier cas, le juge administratif admet la réparation de tous dommages aux biens et aux personnes ainsi que les préjudices commerciaux avis avril 1990, Cofiroute) sur le fondement de l'article 92 de la loi du sept janvier 1983. Concernant le régime législatif de responsabilité sans faute de l'Administration dans le domaine médical, celui-ci résulte de deux lois et a été codifié au Code de la Santé Publique, ce que nous allons maintenant voir dans notre dernière sous-partie (B'). [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture