La suppression de la justice administrative supposerait la disparition d'un droit spécifique et des mécanismes particuliers pour traiter les contentieux entre les personnes privées et les administrations publiques. Est-il possible d'envisager la suppression de la justice administrative comme unification des juridictions plutôt que véritable disparition du droit administratif, étant donné que cela entrainerait des conséquences inconcevables aujourd'hui, comme l'absence d'une protection adéquate pour les administrés ou un organe juridictionnel non qualifié à statuer les faits de l'administration ?
[...] Le droit administratif n'existait pas, malgré des velléités en ce sens contenues notamment dans l'Edit de Saint-Germain du Cardinal Richelieu, lequel interdisait aux Parlements et aux cours judiciaires de prendre connaissance des affaires concernant l'Etat et l'administration. Seulement avec la Révolution français apparaît le juge administratif : le texte fondateur est considéré aujourd'hui la loi des 16-24 aout 1790, prévoyant le principe de séparation des juridictions administrative et judiciaire. La loi du 16 fructidor An III réitère l'interdiction, faite par la loi du 1790 aux tribunaux, de s'immiscer dans l'action administrative. [...]
[...] Le débat sur la justice administrative au XIX siècle était fortement lié aux conditions historiques de la création (ou bien des modifications apportées) du Conseil d'Etat. Créé par la Constitution du 22 frimaire an VIII, ce dernier a été chargé du conseil juridique du gouvernement et du service contentieux. Ce qui suscitait les critiques de la doctrine était qu'il s'agissait plus ou moins de la résurrection du Conseil du Roi. Le système de justice retenue présent à l'époque, ne permettait pas de considérer le CE comme une véritable juridiction, et la loi du 24 mai 1872 n'avait pas changé la situation, en se bornant à le reconnaître officiellement comme juridiction. [...]
[...] En effet, il n'est plus question de contester la légitimité de la justice administrative, mais la pertinence de son maintien : le débat se concentre plutôt sur les dysfonctionnements liés au dualisme juridictionnel. Tandis qu'au XIX siècle on envisageait la suppression du Conseil d'Etat, pour son attachement à l'Etat critiquable, aujourd'hui la question qui se pose concerne plutôt une reforme de la justice administrative, une proposition de restructuration sous une approche plus technique. En effet, cela ne signifie pas que les critiques libérales nées en même temps au Conseil d'état ont disparu avec le temps, mais qu'elles se sont adaptées aux circonstances. [...]
[...] En plus, si le juge administratif est amené à appliquer des branches de droit privé, tels que le droit de la concurrence, régissant les personnes privées, c'est pour en faire assurer le respect par les autorités administratives. Pour ce qui concerne la critique à l'indépendance des juges administratifs, certains auteurs ont en premier lieu soutenu que la France n'a jamais été condamné en cette matière (Luxembourg) et que l'indépendance de la juridiction administrative est un principe fondamental reconnu par les lois de la République (Conseil Constitutionnel 22 juillet 1980). [...]
[...] Mais demeure-elle encore utile aujourd'hui ? La réponse n'est pas certaine, surtout en considérant les règles concernant la répartition des compétences entre les deux juridictions, lesquels montrent toujours plus le juge judiciaire comme le protagoniste de la protection des droits des administrés, traditionnellement fonction de la branche administrative de la justice. Est- il possible d'envisager la suppression de la justice administrative comme unification des juridictions plutôt que véritable disparition du droit administratif, étant donné que celle-la entrainerait conséquences pas concevables aujourd'hui, comme l'absence d'une protection adéquate pour les administrés et un organe juridictionnel pas qualifié à statuer pour les faits de l'administration ? [...]
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