La loi constitutionnelle du 28 mars 2003, relative à l'organisation décentralisée de la République, insère dans la Constitution les conditions et les modalités d'application de l'expérimentation normative.
L'expérimentation est l'un des piliers de la réforme de la décentralisation. En effet, l'expérimentation consiste à mettre au point de nouveaux dispositifs normatifs à partir d'essais qui sont réalisés sur des « échantillons ». L'expérimentation est un outil normatif à deux niveaux, définis tous deux par la Constitution : au niveau national, l'article 37-1 de la Constitution indique la possibilité d'introduire dans la loi ou le règlement, pour un objet et une durée limitée, des dispositions à caractère expérimental ; au niveau local, l'article 72 alinéa 4 de la Constitution affirme quant à lui que les collectivités territoriales peuvent, selon le cas et lorsque la loi ou le règlement l'a prévu, déroger à titre expérimental pour un objet et une durée limitée aux dispositions législatives et réglementaires, tant que cette expérimentation n'entre pas en conflit avec les grands principes constitutionnels de la République.
[...] Il était donc nécessaire de l'inscrire dans la Constitution, afin qu'il soit reconnu officiellement. Cependant, pourquoi le reconnaître ? L'explication consiste à affirmer qu'il fallait poser un cadre juridique à ce droit, afin qu'il ne soit pas utilisé de façon abusive et anticonstitutionnelle. La loi organique du 1er août 2003 s'apparente à une notice d'utilisation de ce droit pour l'Etat et les collectivités territoriales. Néanmoins, depuis la reconnaisse de 2003, l'expérimentation semble être un droit délaissé par les collectivités territoriales. [...]
[...] En effet, la généralisation du dispositif a été annoncée alors même que l'expérimentation venait tout juste de débuter. S'il fallait donc dresser le bilan du droit d'expérimentation, ce bilan serait empreint d'une grande déception et d'une incontestable insatisfaction. Il est donc nécessaire de se questionner sur l'effectivité, l'utilité et l'efficacité de ce recours. Actuellement, l'expérimentation n'est pas en adéquation parfaite avec son essence, selon laquelle les collectivités territoriales pouvaient librement déroger aux dispositions législatives et réglementaires, dans l'unique but d'expérimenter. [...]
[...] Le droit d'expérimentation national est donc limité dans le temps, car provisoire. D'autre part, l'objet de l'expérimentation doit aussi être déterminé, tous les objets ne peuvent pas donner lieu à des expérimentations. Au plan local, l'article 72 alinéa 4 de la Constitution est complété par la loi organique du 1er août 2003. Le droit d'expérimentation local est appelé par la Doctrine l'expérimentation-dérogation En effet, la Constitution indique que [ ] les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l'a prévu, déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences. [...]
[...] Tant en matière législative que réglementaire, aucune expérimentation locale n'est autorisée sans l'accord tacite des organes étatiques concernés. On peut donc réellement parler de soumission du droit d'expérimentation à la tutelle étatique. Nous avons observé que l'expérimentation était depuis 2003 un droit rigoureusement encadré. C'est à partir de cet encadrement juridique que la soumission de ce droit à la maîtrise et au contrôle de l'Etat est rendu palpable. Malheureusement, la reconnaissance officielle de ce principe n'a pas contribué à déployer et à développer le recours à l'expérimentation. [...]
[...] Nous avons observé précédemment qu'avant l'inscription de ce droit dans la Constitution, par la loi constitutionnelle de 2003, l'expérimentation était effective ; celle- ci a permis d'aboutir à de grande œuvre législative coïncidant avec l'idée d'intérêt général, telle que l'instauration du revenu minimum d'insertion via la loi du 1er décembre 1988, crée sous l'impulsion expérimentale du Conseil général d'Ille-et-Vilaine. Toutefois, qu'en est-il de l'effectivité du recours à l'expérimentation depuis 2003 ? En réalité, le bilan n'est pas glorieux, et semble ne pas remplir les objectifs escomptés. La révolution n'a pas eu lieu. En effet, aussi bien au plan national que local, les recours à l'expérimentation n'ont pas été au rendez-vous ; on aurait même l'impression que le droit à l'expérimentation se soit volatilisé depuis son insertion dans la Constitution. [...]
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