Force est de constater que le contentieux administratif a largement évolué, et cette tendance n'est sans doute pas prête de s'arrêter. Un des exemples les plus topiques est sans nul doute la distinction des contentieux, exemple dont nous allons tenter de rendre compte ici. Par distinction des contentieux, il faut ici entendre la distinction entre le recours en annulation –appelé communément recours en excès de pouvoir- dont le but est d'obtenir l'annulation d'un acte par l'invocation de moyen de légalité, tendant ainsi à confronter l'acte administratif au droit objectif.
La seconde part de la distinction traditionnelle se fait par le recours de plein contentieux, connu également sous l'appellation de « contentieux de pleine juridiction » dont la définition traditionnelle était donnée par rapport au recours en excès de pouvoir , le juge disposant de pouvoirs plus étendus.
Ce sujet est particulièrement intéressant dans la mesure où il nous permet de mesurer la capacité de cette distinction classique à prendre toute la mesure des enjeux contemporains du contentieux administratif. Ainsi, ici, l'objet du propos est de s'interroger sur la distinction des contentieux, et plus précisément sur l'évolution au sein de la jurisprudence administrative de cette distinction classique. Demeure-t-elle toujours valable ?
[...] A ce titre, force est de constater que la différence avec le pouvoir du juge en matière de pleine juridiction est quasiment inexistante, ce dernier disposant d'un pouvoir d'abrogation des mesures qui ne sont plus nécessaires au jour de la décision juridictionnelle (CE 2002 Société Schweppes France). En outre, pour des raisons liées au respect du principe de la sécurité juridique[21] le juge peut également moduler les conséquences d'une annulation. Il en va ainsi notamment pour une décision mettant fin à la suspension prononcée par voie de référé avant tout début d'exécution d'un acte, prévoyant un délai transitoire écoulé (CE Sect 2006 Société Techna). [...]
[...] Cette distinction est le fruit du travail réalisé par E.Laférrière[4] qui en son temps scindait le contentieux administratif en quatre branches, le juge disposant pour chacune des branches de pouvoirs spécifiques. D'autres ayant essayé de proposer des classifications alternatives[5], la jurisprudence ne semble pas en avoir tenu compte, du moins jusqu'à un certain point. La multiplication des possibilités de recours[6], l'influence de la cour européenne des droits de l'homme par le truchement de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après CESDHLF) à nécessairement conduit la jurisprudence administrative à évoluer remettant en cause cette distinction des contentieux habilement théorisée par Laférrière et rediscutée périodiquement. [...]
[...] Situations rendues possibles parce que le juge n'avait qu'une alternative manichéenne, annuler ou ne pas annuler. L'exemple du contentieux fiscal est topique, dans la mesure où sous l'angle du recours en annulation, le juge pouvait simplement dégrever ou ne pas dégrever, ce qui était à double tranchant tant pour les finances publiques que pour le requérant. Par le biais désormais du plein contentieux, cela permet au juge d'estimer la véritable étendue de la créance, ce qui est incontestablement vecteur d'une plus grande justice. [...]
[...] Effectivement, par une décision du 17 décembre 2009, le juge accepte de se prononcer sur les conclusions portées devant lui aux fins d'annulation alors qu'elles ressortaient de la pleine juridiction. Assurément, cette inflexion jurisprudentielle vise avant tout à protéger les droits des administrés dans le sillage de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme[23]. Une plus grande sécurité juridique Un des plus importants éléments est que le recours en excès de pouvoir conformément aux principes généraux du droit[24] est ouvert à tous, ce qui signifie que le ministère d'avocat n'est pas obligatoire à contrario du recours de pleine juridiction[25]. [...]
[...] En son temps Laferriere distinguait en fonction des pouvoirs du juge, il faut pourtant admettre que la distinction des contentieux a subi une double évolution. Tout d'abord une évolution formelle quant au critère de distinction qui est de moins en moins fondé sur l'objet de la demande, au profit de la constitution de blocs de compétence, mais également une évolution matérielle, dans les pouvoirs du juge, celui-ci disposant désormais de pouvoirs plus importants, élargis dans le cadre du REP (modulation des effets de l'annulation, requalification d'un REP en RPC Par ailleurs, la classification opérée par M.Waline sur la nature du droit en cause ne semble pas spécialement plus pertinente eu égard au développement de contentieux objectif de pleine juridiction[26] où le juge dispose d'un pouvoir d'appréciation des faits, comme du droit. [...]
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