Dans la hiérarchie des normes juridiques de Kelsen, l'Etat doit nécessairement, au même titre que toutes les autres organisations, posséder un statut juridique de personne morale : en effet, l'action de la puissance publique est ainsi soumise au principe de légalité, qui suppose en premier lieu le respect des principes constitutionnels. A fortiori, ce statut de l'Etat supposerait que celui-ci ne jouisse d'aucun privilège de juridiction, ni d'un régime dérogatoire au droit commun ; par suite, cela sous-entendrait que les personnes physiques et morales de droit privé peuvent ainsi contester la puissance publique au nom des normes établies par celles-ci.
Mais il ne s'agit pas ici de contester ou de soutenir l'idée d'un Etat en tant que personne morale, ou de s'attarder sur les détracteurs de la notion de personne morale présentée comme pure fiction, ce qui reviendrait à ne pas traiter le sujet réel ; de même, nous ne traiterons pas ici l'idée générale d'un Etat en tant que personne morale, de façon globale. Au contraire, il convient d'étudier toutes les différentes formes prises par ce concept, les personnes morales administratives, et les problèmes qui en découlent, et ce plus particulièrement en France, où la classification des personnes morales administratives, entre collectivités locales et établissements publics est à elle seule génératrice d'un grand nombre de problématiques juridiques, qui ont été soulevées dès le début du XXe siècle par la jurisprudence du Conseil d'Etat lors d'arrêts sur lesquels nous reviendrons.
Dans un premier point, il semble indispensable de nous pencher sur la classification des différentes personnes morales publiques, et des particularités qui leur sont propres. Par exemple, si en droit privé, la notion de « principe de spécialité » est utilisée pour désigner le la compétence particulière visée par une personne morale (par exemple, pour un syndicat, la défense des travailleurs d'une certaine catégorie socioprofessionnelle), elle est, s'agissant de personnes morales publiques, un outil de distinction entre les collectivités territoriales et les établissements publics, dont les compétences diffèrent. D'autre part, il est nécessaire de s'intéresser aux cas particuliers de l'administration française que constituent les Chambres de Commerce et les associations syndicales, qui ont donné lieu à des divergences entre jurisprudence et doctrine.
Dans un deuxième point, nous tenterons enfin de problématiser la question d'un Etat personne morale à un degré supérieur : une fois que sont définies les différentes formes prises par cette notion dans la réalité, comment la responsabilité de l'Etat peut-elle être engagée selon que l'on se place au niveau communal, départemental ou national, alors même que celui-ci est considéré comme une unité juridique, sans remettre en cause cette dernière ? Il convient tout d'abord de se pencher sur la notion de « dédoublement fonctionnel » dans l'organisation des personnes morales administratives, qui rend parfois complexe cette question de responsabilité de l'Etat ; enfin, nous verrons comment s'applique, dans au sein de ces personnes morales, le contrôle des citoyens, garant du respect des principes démocratiques.
[...] Le contrôle des personnes morales publiques se confond alors, en somme, avec une réelle intervention de l'Etat dans leur gestion comme le note Jean Rivero dans Le régime des entreprises nationalisées et l'évolution du droit administratif (Sirey, 1952). Les différentes mises en pratique de la responsabilité des personnes morales publiques Le rôle de la démocratie au niveau local Il est évident que la première garantie de la responsabilité des dirigeants des collectivités locales et des organismes publics est la sanction périodique que représente le vote des citoyens ; c'est le cas dans le renouvellement des assemblées locales ou professionnelles, où les électeurs peuvent reconduire ou remplacer les dirigeants dans leurs fonctions. [...]
[...] La loi ne prévoit la possibilité de poursuivre les personnes morales que pour les faits de discrimination ordinaire définis par les art. 225-1 et suivants du Code pénal. Elle ne le prévoit ni en matière de harcèlement (art. 222-33-2 du Code pénal) ni en matière de discrimination aggravée (art. 432-7 du Code pénal) imputable à une personne physique dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public. [...]
[...] CE 1931 Martin, qui ne peut dissoudre le Conseil pour faire prévaloir sa volonté. Concernant le contrôle des Conseils municipaux, c'est le Conseil général qui est seul habilité à prononcer la démission d'office de leurs membres, et non le Préfet seul ; c'est là une autre garantie démocratique qui empêche toute décision unilatérale de ce dernier. Le rôle des juridictions administratives En France, tout citoyen dispose de plusieurs recours face à une irrégularité commise par l'Etat : il peut saisir le médiateur de la République, informer les autorités administratives des dysfonctionnements constatés, introduire un recours gracieux devant l'autorité administrative ayant adopté un acte litigieux, faire un recours hiérarchique auprès du supérieur de l'auteur de l'acte constaté. [...]
[...] Casanova de 1901 du Conseil d'Etat, ne doivent pas, sauf circonstances exceptionnelles, concurrencer une profession libérale dotée de la même spécialité au sein de la collectivité concernée. Ces principes ont été rappelés à plusieurs reprises au cours du XXe siècle par le Conseil d'Etat : d'abord, en 1926, avec l'arr. Chambre syndicale du commerce de détail de Nevers, puis en 1938, en affirmant d'une part, que les collectivités territoriales n'étaient pas, en principe, autorisées à mettre en place des services à caractère industriel et commercial, et d'autre part, que les communes pouvaient créer ce type de services uniquement dans le cas d'une carence de l'initiative privée concernant les besoins de la population. [...]
[...] Au niveau départemental, la compétence du Préfet est totalement soumise au Conseil général, dont il ne fait qu'appliquer les délibérations après avoir rendu leur application possible. L'arr. CE 1953 Pensionnat Saint-Louis a affirmé cette obligation juridique du préfet à appliquer ses décisions, même s'il les juge illégales, à moins de demander leur annulation au Président de la République. Le cas particulier du Préfet de la Seine, dans l'arr. CE 1949 Ville de Paris montre la difficulté d'engager la responsabilité de l'Etat tout entier pour une question locale, quand bien même une décision fautive proviendrait du Ministre de l'intérieur. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture