Surpris par la reconnaissance de la qualité d'établissement public à une association syndicale autorisée, Hauriou, écrivait, dans sa note sous la décision Canal de Gignac (TC, 9 décembre 1899), une phrase, souvent utilisée depuis: « On nous change notre Etat ». Le changement n'est-il pas devenu bouleversement avec l'institutionnalisation, par l'ordonnance du 17 juin 2004, des contrats de partenariat, par lesquels, en se référant à la définition quelque peu complexe qu'en donne l'article premier de l'ordonnance, des personnes privées vont pouvoir assurer le financement de la construction et de la gestion d'ouvrages ou d'équipements nécessaires au fonctionnement du service public et participer à d'autres prestations de services concourant à l'exercice par la personne publique contractante de sa mission de service public?
[...] Ainsi, les opérateurs publics sont invités à utiliser ce nouvel outil de leur panoplie contractuelle avec le plus grand discernement. La liberté contractuelle entravée. De plus, avec le dispositif mis en place, le partenariat public-privé amenuise la liberté contractuelle des collectivités publiques constitutionnellement garantie (DC décembre 2000) et considérée comme un principe général du droit dans la jurisprudence administrative (CE février 1983, Union des transports urbains et régionaux). En effet, contraintes par une disposition des plus directives, les collectivités publiques disposent d'un pouvoir d'appréciation très réduit quant à l'opportunité de recourir au contrat de partenariat. [...]
[...] Ainsi, le projet doit présenter des caractéristiques de complexité ou d'urgence. La question avait d'ailleurs été posée à la Haute juridiction de l'ordre administratif, de savoir si le gouvernement avait méconnu la réserve d'interprétation de l'article 6 de la loi d'habilitation posées par les juges de la rue Montpensier (CE octobre 2004, Sueur et autres). Les requérants estimaient que l'ordonnance ne définissait pas avec suffisamment de précision les conditions d'urgence et de complexité justifiant le recours au partenariat. Sans en tirer motif à annulation, le Conseil d'Etat a jugé bon de préciser que l'urgence s'analyse comme la nécessité de rattraper un retard particulièrement grave affectant la réalisation d'équipements collectifs tandis que la condition de complexité serait satisfaite, d'après l'ordonnance de 2004, lorsque la personne publique ne serait pas objectivement en mesure de définir seule et à l'avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique de ce projet . [...]
[...] Quelques dispositions législatives (notamment pour amender la loi MOP et étendre et aménager les lois du 5 janvier 1988 et du 25 juillet 1994) et réglementaires (afin de permettre des exceptions aux principes posés par les articles 10 et 94 du Code des marchés publics) auraient pu faire l'affaire. Pour des raisons d'affichage politique, les pouvoirs publics ont opté pour une réforme prétendument plus ambitieuse. Mais l'ambition n'est qu'apparente, car bien loin de simplifier le droit, il a été encore compliqué au lieu de s'efforcer d'y remettre de l'ordre. [...]
[...] Le partenariat public-privé la nécessaire création d'une nouvelle forme de contrat administratif. Le partenariat public-privé, au sens de l'ordonnance du 17 juillet 2004, ne possède pas de territoire propre. Cependant, afin d'en faciliter le recours, il est sans cesse en cours de clarification Cette nouvelle forme contractuelle, dérogation au droit commun, est donc tout à fait innovante en la matière Un contrat nomade, sans cesse en cours de clarification. Obéissant à une construction panachée, le contrat de partenariat puise donc à la source des marchés publics et des délégations de service public, sans se confondre totalement ni avec les uns, ni avec les autres De plus, afin d'en faciliter le recours et d'éviter tout trouble, le législateur et le gouvernement ne cessent de vouloir l'améliorer Un contrat nomade, entre marché public et délégation de service public. [...]
[...] L'opportunité de recourir ou non à un contrat de partenariat est appréciée au moment de l'évaluation préalable. S'il est sans doute plus intelligent de vérifier en amont qu'on peut passer un contrat de partenariat que d'attendre la censure du juge (Alain Menemenis, Debat dur les contrats de partenariat), l'appréciation sera d'autant plus délicate qu'elle devra intervenir très tôt. Il y a alors nécessité d'évaluer, comme dans le système britannique, les avantages du contrat de partenariat comparativement aux délégations de service public et marchés publics. [...]
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