« Il paraît souhaitable (…) que le personnel des sections administratives ne puisse participer dans le même temps aux formations contentieuses. C'est au sein même du Conseil d'Etat, une sorte de prolongement du principe de séparation des pouvoirs. »
Jean Rivero témoignait alors déjà des questions et des inquiétudes que pouvait entraîner la dualité fonctionnelle du Conseil d'Etat quant à l'exigence d'impartialité requise à toute juridiction.
De nos jours le Conseil d'Etat est la juridiction suprême de l'ordre administratif, à ce titre il est juge de cassation et de manière plus exceptionnelle juge en premier et dernier ressort comme c'est notamment le cas pour les requêtes à l'encontre des décrets et ordonnances. Par ailleurs, le Conseil d'Etat dispose également de compétences administratives allant de la simple consultation jusqu'à la participation à l'élaboration de projet de loi ou de certains décrets. C'est ce cumul entre fonctions administratives et contentieuses que l'on vise par la notion de dualité fonctionnelle.
[...] La contradiction entre d'une part les impératifs d'indépendance et surtout d'impartialité du juge garantie par la Convention, et d'autre part la dualité fonctionnelle au sein même du Conseil d'Etat, apparaît alors inévitable. Toutefois, ce choc prévisible entre Convention et Conseil d'Etat n'a pas eu lieu. En dépit des arrêts sur les Conseils d'Etat luxembourgeois et hollandais, la Cour de Strasbourg ne semble pas viscéralement hostile à la dualité fonctionnelle du Conseil d'Etat. Et cela apparaît bien normal, cette dualité du Conseil constitue, en effet, une richesse, un atout pour la justice administrative et pour les justiciables eux-mêmes. [...]
[...] Il est à noter que la dualité fonctionnelle de la juridiction administrative n'est pas une spécificité française. Ainsi de nombreux pays ont transposé cette dualité au sein même de leur juridiction administrative ; ce fut notamment le cas pour l'Italie, la Turquie ou encore les Pays-Bas au cours du 19e siècle, et plus récemment encore, au cours des années 90 pour quelques Pays d'Europe Centrale et Orientale, tels que la Hongrie, la Pologne ou la Roumanie. Cependant, ce cumul des fonctions contentieuses et non contentieuses au sein même du Conseil d'Etat peut apparaître comme contraire au principe de séparation des pouvoirs et plus particulièrement à l'exigence d'impartialité requise à toute juridiction. [...]
[...] Ainsi cette meilleure qualité du Droit permet une baisse du contentieux lié à des textes obscurs, incomplets ou bien encore inadaptés. Ce rôle du Conseil fut visible pour la première fois pour la rédaction du Code civil en 1804, et plus récemment encore par la loi du 3 juin 1958 habilitant le gouvernant à rédiger un projet constitutionnel pour la France mais imposant une consultation du Conseil sur ce même projet. La consultation du Conseil est aujourd'hui imposée par la Constitution elle- même pour les projets de loi (article pour les ordonnances (article 38) ou encore pour les déqualifications comme règlementaires des lois antérieures à 1958 (article 37-2). [...]
[...] la décentralisation du contentieux administratif à de nouvelles juridictions administratives territoriales Si les attributions administratives constituaient la charge essentielle du Conseil d'Etat au cours du 19e siècle, tel n'était plus le cas au cours du 20e siècle. L'afflux des requêtes devant le Conseil d'Etat, et l'engorgement que celui-ci entraînait (en 1953, un arriéré de 24000 requêtes) ont incité les Pouvoirs Publics à réagir, et à réformer la justice administrative. Ce fut d'abord le cas avec la création des Tribunaux Administratifs par le décret du 30 septembre 1953 qui vinrent remplacer les conseils de préfecture, puis avec la création des Cours Administratives d'Appel par la loi du 31 décembre 1987. [...]
[...] Il est d'ailleurs à noter que la dualité fonctionnelle du Conseil d'Etat a été reproduite, dans une moindre mesure, dans les TA et les CAA. l'accroissement des attributions administratives du Conseil d'Etat La compétence administrative du Conseil, en parallèle aux décentralisations du contentieux, a été développée. Tel fut le cas pour les actes européens communautaires dans le cadre des procédures de l'article 88- 4 de la Constitution issu de la révision constitutionnelle du 25 juin 1992, qui impose au gouvernement de soumettre au Parlement les propositions d'acte communautaire comportant des dispositions de nature législative. [...]
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