Article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790, Conseil d'État, Ancien régime, dualisme juridictionnel, pertinence, France, 1799, juridictions, contentieux administratifs, débats, juge administratif, complexité, illégitimité, loi du 30 juin 2000, loi du 19 décembre 2016, complexification, uniformisation, administration, justice, spécialisation, Cour suprême, Jean-Marc Sauvé, responsabilité médicale
L'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 est fondamental dans le processus de création de l'ordre administratif. Il pose deux principes : la séparation de deux fonctions au sein de l'État, à savoir juger et administrer ; et un principe d'interdiction, avec une administration désormais déliée de toute forme de contrôle juridictionnel. Fruit d'une longue période de méfiance, il s'agit en fait de protéger le pouvoir exécutif du pouvoir judiciaire, alors incarné par le souvenir des Parlements d'Ancien régime. Par la suite, alors que le Conseil d'État, créé en 1799, n'est initialement qu'un organe de conseil du gouvernement, la loi du 24 mai 1872 lui attribue une nouvelle fonction : celle de trancher les contentieux administratifs - et facta est lux. L'ordre administratif est ainsi né. Deux ordres de juridiction séparés cohabitent donc, l'un judiciaire, l'autre administratif, avec à leurs têtes respectivement la Cour de cassation et le Conseil d'État. Pourtant, en dépit de cette longue appartenance au paysage juridictionnel français, et un renforcement des compétences du juge administratif tant par la loi que par la jurisprudence, plus d'un siècle et demi après sa naissance, le dualisme juridictionnel fait l'objet de débats.
[...] L'ordre administratif est ainsi né. Deux ordres de juridiction séparés cohabitent donc, l'un judiciaire, l'autre administratif, avec à leur tête respectivement la Cour de cassation et le Conseil d'État. Pourtant, en dépit de cette longue appartenance au paysage juridictionnel français, et un renforcement des compétences du juge administratif tant par la loi que par la jurisprudence, plus d'un siècle et demi après sa naissance, le dualisme juridictionnel fait l'objet de débats. Les arguments en faveur de la réunion des deux ordres tiennent principalement, en termes de bonne administration de la justice, à la complexité de la répartition des compétences. [...]
[...] Par exemple, par une décision du 22 décembre 2015, le Conseil a estimé, à propos des assignations à résidence, qu'une limitation des droits individuels relevait du juge administratif contrairement à la privation de droits individuels, prise en charge par le juge judiciaire. Cette complexité entraine nécessairement des incertitudes croissantes quant à l'identité de la juridiction compétente. D'un autre côté, au-delà de cette question de confusion des blocs de compétence, il s'avère que le droit international (en particulier économique et pénal), le droit communautaire, le droit européen conventionnel et les jurisprudences associées produisent de plus en plus de règles indifférentes à notre dualisme. [...]
[...] Ainsi, en matière de responsabilité médicale, le juge administratif a progressivement rapproché sa pratique et sa jurisprudence de celles du juge judiciaire, notamment dans le calcul de l'indemnisation et la reconnaissance de certains préjudices, favorisant l'émergence d'un droit plus protecteur des victimes. De même, cette observation réciproque des jurisprudences que mènent les juges administratifs et judiciaires a permis l'émergence, en droit administratif, d'un régime de responsabilité du gardien, dans le cadre des mesures d'assistance éducative. Le mimétisme reproché par les détracteurs du dualisme juridictionnel peut donc aussi être envisagé comme une volonté, dans chaque ordre, de pallier les insuffisances et les vides juridiques par des inspirations réciproques. [...]
[...] Tout d'abord, l'existence en France d'un principe de séparation des autorités administrative et judiciaire peut être regardée, ainsi que le Conseil constitutionnel l'a mentionné comme une traduction de « la conception française de séparation des pouvoirs ». En fait, c'est ainsi que se traduit la méfiance des révolutionnaires à l'égard des juges : séparer les pouvoirs exécutif et judiciaire suppose nécessairement deux ordres distincts. Très vite cependant, ce système fait l'objet de critiques ; il est alors question du traitement privilégié dont il ferait injustement bénéficier l'administration avec ses règles spéciales. [...]
[...] Or, selon Didier Truchet, « le dualisme juridictionnel est un obstacle à la bonne réception des règles nouvelles en droit français et à la qualité de ce dernier ». Le dualisme semble alors peu pertinent face à ce double mouvement de convergence, voire de mimétisme institutionnel, et de complexification des blocs de compétences. Malgré la complexité du dualisme juridictionnel mise en avant par ses détracteurs, il ne faut pas se méprendre sur la portée des effets de la loi et de la jurisprudence sur la répartition des compétences entre les ordres de juridiction : elle est loin d'être aussi complexe qu'elle ne paraît au premier abord, ainsi que l'illustre le très faible nombre de saisines du Tribunal des conflits, qui n'a reçu en 2018 que 38 affaires. [...]
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