M. Potchen, préfet du département du Bas-Rhin, prend un arrêté préfectoral interdisant
sur l'ensemble du département la vente de boissons alcoolisées la nuit dans les stations
services.Cependant, il n'estime pas utile de mentionner l'existence de circonstances locales
précises de nature à justifier la prise de cette mesure. M. Bénitos, propriétaire d'une station
service à Strasbourg et ayant vendu des boissons alcoolisées dans la nuit du 15 au 16 octobre
2003 est poursuivi devant le Tribunal de police de Strasbourg le 2 novembre 2003 pour
infraction à cet arrêté préfectoral.
Quels moyens M. Bénitos pourra-t-il invoquer pour sa défense ?
La société française Négoce a importé le 20 février 2003 des bouteilles de vin en
provenance d'Italie, en accord avec le règlement communautaire n° 24 de la décision du 4
avril 1962, et la a revendues cette même année sur le marché français.
Les services français de répression des fraudes se sont cependant aperçus que ces vins
n'étaient pas conformes à l'article 4 du code français des vins (issu de la loi du 13 octobre
1941).
Poursuivi aujourd'hui devant le Tribunal correctionnel de Nancy pour vente de
produits falsifiés, le patron de la société Négoce avance pour sa défense la conformité des
vins vendus au règlement communautaire n° 24 de la décision du 4 avril 1962 permettant la
vente des vins du fait de leur conformité à la législation italienne.
Le patron peut-il obtenir gain de cause ?
[...] Il s'agit d'un recours en exception porté devant le juge répressif saisi de l'affaire permettant l'interprétation et l'appréciation de la légalité des actes administratifs, actes réglementaires ou individuels, qui se trouvent à l'origine des poursuites pénales. L'exception d'illégalité permet ainsi la discussion sur l'élément légal avant toute défense au fond. L'étendue de cette compétence des juridictions pénales a été incertaine jusqu'au Nouveau Code pénal (NCP). Il existait en effet une divergence entre le Tribunal des conflits et la Chambre criminelle de la Cour de cassation. [...]
[...] En l'espèce, le règlement constitue une loi internationale dont la puissance s'impose en vertu de la loi constitutionnelle C'est la formule adoptée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans l'affaire Société Les Fils Henri Ramel du 22 octobre 1970 (Grands Arrêts par laquelle elle pose en termes non équivoques le principe de la suprématie du droit communautaire. Le raisonnement de la Cour de cassation se fonde sur l'article 55 de la Constitution de 1958 en vertu duquel les traités ou accords régulièrement ratifiés et approuvés ont dès leur publication une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie. [...]
[...] Cas pratiques Le principe de légalité criminelle (l'exception d'illégalité et les sources du droit pénal) Cas pratiques Le principe de légalité criminelle (l'exception d'illégalité et les sources du droit pénal) L'exception d'illégalité Enoncé : M. Potchen, préfet du département du Bas-Rhin, prend un arrêté préfectoral interdisant sur l'ensemble du département la vente de boissons alcoolisées la nuit dans les stations services. Cependant, il n'estime pas utile de mentionner l'existence de circonstances locales précises de nature à justifier la prise de cette mesure. [...]
[...] Les services français de répression avancent la non-conformité des vins au code français des vins issu d'une loi du 13 octobre 1941. Il existe donc un conflit de normes entre droit communautaire et droit interne. Le droit communautaire est issu des traités de Rome de 1957. La portée des règlements communautaires en droit interne obéit à un double principe : l'application directe (les règlements sont opposables aux simples particuliers qui peuvent s'en prévaloir), et l'application immédiate (les règlements s'intègrent au droit interne de manière spontanée et sans intervention quelconque de celui-ci). [...]
[...] En conclusion, Bénitos va pouvoir invoquer l'illégalité de l'arrêté sur la base duquel il a été poursuivi. Si l'acte administratif est déclaré illégal par le Tribunal de police, son application sera écartée en l'espèce, et donc Bénitos sera relaxé. Il est important de noter que le texte restera applicable, et qu'il incombera donc aux futurs plaideurs d'invoquer à leur tour l'exception d'illégalité de façon à créer une paralysie du contentieux et une mise en conformité du texte litigieux par l'autorité administrative compétente. [...]
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