La distinction service public administratif - service public industriel et commercial est-elle dépassée ?

Romain M.

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La distinction service public administratif - service public industriel et commercial est-elle dépassée ?

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Thèmes abordés

SPA Service Public Administratif, SPIC Service Public Industriel et Commercial, arrêt Bac d'Eloka, juge administratif, juge judiciaire, arrêt Terrier, arrêt Blanco, loi du 31 juillet 1963, droit de grève, droit communautaire, SIG Services d'Intérêt Général, arrêt Brindel, arrêt Ordre des avocats du Barreau de Paris

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De ses conclusions de l'arrêt Bac d'Eloka (TC, Société commerciale de l'Ouest africain, 22 janv. 1921), le commissaire du gouvernement Matter marqua un tournant décisif dans la notion de service public, en admettant que certains soient soumis au droit administratif, et d'autres au droit privé, et dont leur contentieux est respectivement connu des juges administratif et judiciaire. Pour saisir cette distinction, il faut d'abord comprendre la notion centrale qu'est le service public. Depuis les conclusions du commissaire Romieu sur l'arrêt Terrier (CE, 6 févr. 1903, Terrier), et la systématisation par les Doyens Duguit et Jèze, le service public est devenu un élément essentiel du droit administratif.

Sommaire

Le droit contemporain inadapté à la distinction du service public
1. L'effacement des régimes du droit
2. La suprématie du droit communautaire
Le service public contemporain inadapté à sa distinction
1. Les visages contraires à la distinction
2. Le juge dépassé

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Extraits

[...] Or, la superposition n'est pas complète : il se peut que certains SPA soient qualifiés dans le droit communautaire de SIEG. C'est par exemple le cas des services hospitaliers, qui sont en droit interne analysés comme des SPA, tandis que la CJUE les considère comme des SIEG (CJCE juill BSM Smits). Dès lors, le juge, garant du respect du droit communautaire au sein de l'ordre interne, rencontre de grandes difficultés : les SIEG ayant la qualité de SPA en droit interne ne répondent alors pas aux exigences du droit communautaire, et il faut alors que le juge décide de la qualification à lui attribuer, à condition qu'on sache quel juge, entre administratif et judiciaire, est compétent. [...]

[...] Au-delà des qualifications impossibles du service public, le juge a pu se montrer très hésitant, voire contradictoire quant à la distinction des services publics. B. Le juge dépassé Dans l'étude de la distinction au cours du temps, on remarque que certains services publics, originellement qualifiés de SPA, sont devenus plus tard des SPIC et inversement. Cette hésitation de qualification décèle un dépassement de la distinction. En effet, si un SPIC peut devenir un SPA, c'est justement parce que la distinction repose sur des critères trop imprécis, fluctuants au gré des interprétations, ce qui nécessairement s'éloigne d'une définition objective, pourtant nécessaire à son effectivité. [...]

[...] C'est ce qui a pu être le cas lors de l'arrêt Brindel (CA adm juin 2002). En l'espèce, le service public de transports urbains de la ville, en principe SPIC, appliquait 2 tarifs : ceux qui en payaient le prix, et ceux qui bénéficiaient de la gratuité. Or, et en reprenant les critères de différenciation des SP, on peut en déduire que ceux qui payent sont les usagers d'un SPIC et que ceux qui sont transportés gratuitement sont les usagers d'un SPA. [...]

[...] Normalement cumulatifs, comme on a pu le voir dans l'arrêt Blanco (TC février 1873, Blanco), ces critères se sont parfois vu s'attacher une fonction supplétive. On cerne déjà certaines incertitudes à cette notion, fluctuante dans le temps et l'espace, comme peut le démontrer l'intérêt général, qui suit l'évolution sociétale. Mais la notion s'est éclatée, dès 1921, par l'arrêt de principe du Bac d'Eloka (Société commerciale de l'Ouest africain, TC janv. 1921). En effet, le commissaire Matter a posé une dichotomie à la notion de SP. Il distinguait le service public administratif (SPA) du service public industriel et commercial (SPIC). [...]

[...] En effet, l'arrêt Bac d'Eloka avait caractérisé le service du bac comme étant un SPIC, tandis que dans les années 70 la perception de ce service n'était plus la même. Ainsi, la Cour suprême de Côte d'Ivoire a pu le qualifier de SPA (14 janv Sté des centaures routiers), tout autant que le juge français pour le bac de l'île de la Ré (TA Poitiers juin 1972). C'est alors un juge qui n'est pas certain dans les qualifications, à cause d'une distinction inadaptée à la réalité. [...]

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