Il y a un problème de la définition du droit administratif; de graves incertitudes existent et se traduisent par des définitions non concordantes des auteurs. Un problème pratique suscita leurs recherches : la délimitation des compétences administrative et judiciaire. Il fallait une règle simple. Cette nécessité s'imposa lorsque fut abandonné la justification primitive de la dualité des juridictions, quand il apparut que la protection de l'Administration ne requérait pas l'élimination du juge judiciaire pour tous les litiges la concernant. Mais le caractère jurisprudentiel du droit administratif limite la portée de l'examen des textes. Même lorsqu'il semble s'attacher à un critère, le juge est un juge, non un théoricien. Comment alors définir le droit administratif et trouver les notions maîtresses capables de rendre compte de ses particularités ?
[...] Voir dans la puissance publique le signe caractéristique du droit administratif, c'est affirmer que ses règles se différencient de celles du droit privé en ce qu'elles confèrent à l'Administration, dans ses rapports avec les particuliers, des prérogatives dont l'équivalent ne se retrouve pas dans les rapports de droit privé. C'est la vieille et simple constatation de l'inégalité juridique qui, à la base du rapport de droit public, s'oppose à l'égalité juridique sur laquelle repose le droit privé. Il faut ici analyser les moyens juridiques par lesquels l'Administration agit. C'est la théorie des actes administratifs qui repose sur la distinction fondamentale entre actes unilatéraux et contrats. [...]
[...] L'acte juridictionnel est intangible ; un acte administratif peut être retiré par son auteur. L'Administration reste ainsi comme la partie de l'appareil exécutif où ne se rencontre pas à la fois cette indépendance des organes et cette réglementation de la procédure d'action. Cette construction complexe et rigoureuse de Charles Eisenmann montre toute la difficulté de définir le droit administratif, souvent opaque et compliqué au point que le doyen Vedel dit: «Après un nombre respectable de décennies passées à m'intéresser à lui, je ne sais pas ce qu'est le droit administratif mais je sais ce que serait une société sans droit administratif.» Cela reflète le vague persistant à définir le droit administratif. [...]
[...] Des principes constitutionnels et des principes généraux du droit sont identiques au fond mais les premiers ont une valeur constitutionnelle et les seconds supradécrétale et infralégale. Cette séparation commence à cesser depuis dix ans: quand aucun principe général du droit ne coexiste avec un principe constitutionnel écrit, le Conseil d'État tend à s'abstenir de consacrer un nouveau principe jurisprudentiel et s'en tient au principe écrit. CE Ass.- 8 avril 1987, Peltier sur la liberté d'aller et venir garantie par la Déclaration de 1789; CE- 16 octobre 1987, Genessiaux sur l'égal accès à l'instruction et à la culture garanti dans le préambule de la Constitution de 1946. [...]
[...] En attendant cet effort, Charles Eisenmann nous donne la définition la plus claire du droit administratif. Son existence correspond à celle d'une Administration, sa définition doit par son objet se fonder sur la notion d'Administration, être assez large pour englober toutes les règles et problèmes juridiques la concernant. Si telles règles ne sont pas spéciales à l'Administration, elles font partie de plusieurs droits, sont les éléments communs au droit administratif et au droit privé, qui sont souvent des règles empruntées par le premier au second. [...]
[...] Dès qu'il y a service public, il doit y avoir application du droit administratif et compétence de la juridiction administrative. C'est par la notion de service public que doivent être définies les notions du droit administratif Dans ses Principes généraux du Droit administratif, Gaston Jèze écrit: droit administratif est l'ensemble des règles spéciales relatives au fonctionnement des services publics.[ . ] Tout pays civilisé a des services publics et, pour leur fonctionnement régulier, il existe nécessairement des règles juridiques spéciales.[ . [...]
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