Contrôle de proportionnalité, juge administratif, état d'urgence, loi du 3 avril 1955, arrêt Heyriès, arrêt Dame Dol et Laurent, restriction des libertés, Covid-19, libertés individuelles, ordre public, protection des libertés, article 15 de la CESDH, loi du 23 mars 2020
"L'état d'urgence ne peut pas être un état permanent", déclarait Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l'Intérieur, le 20 juillet 2016. Au lendemain de l'attentat de Nice, celui-ci s'en prenait à la droite et à l'extrême droite qui voulaient proposer des lois d'exception et s'affranchir de l'État de droit. Pour autant, une telle critique émanant d'une autorité exécutive a de quoi étonner. Utilisée par les juges, la technique du contrôle de proportionnalité s'intègre dans les mécanismes juridictionnels de protection des libertés, quel que soit le contentieux considéré. Le contrôle de proportionnalité vise à vérifier qu'une règle de droit ne porte pas atteinte à un droit garanti.
[...] L'échec de sa constitutionnalisation ne fait que renforcer ce sentiment. Face à cette périlleuse problématique juridique, le juge administratif a dû admettre des dérogations pour les cas de « circonstances exceptionnelles ». Et en même temps, le juge administratif reste l'un des meilleurs garants de la protection des libertés publiques, et notamment au regard de la Constitution. S'il est vrai qu'en principe, l'équilibre entre ordre public et libertés est garanti par l'étendue du contrôle du juge administratif sur les décisions prises dans le cadre de l'état d'urgence, une telle conciliation s'avère difficile, mais non insurmontable. [...]
[...] Le contrôle de proportionnalité permet tant bien que mal de sauvegarder l'État de droit. Sa relative effectivité s'explique en partie par la pression des autorités exécutives à vouloir banaliser l'état d'urgence. Au moins, certaines dérives restent empêchées par le contrôle du juge administratif. Or, toute la difficulté de trouver un compromis entre ordre public et sauvegarde des libertés ne fait que s'accroître par la mutation du contrôle de proportionnalité. Fluctuant et appliqué de manière variable par les juges, l'on peut surtout aisément comprendre que l'avènement d'une redéfinition de l'état d'urgence rende la tâche du juge administratif encore plus difficile. [...]
[...] L'appréciation bien trop permissive du juge administratif au regard de l'état d'urgence a de quoi inquiéter sur son rôle de défenseur des libertés. Une telle crainte ne peut que s'accroître par l'avènement d'une autre forme d'état d'urgence : l'état d'urgence sanitaire. B. Un contrôle de proportionnalité encore instable depuis l'avènement récent de l'état d'urgence sanitaire La crise de la COVID-19 imposait la prise de mesures exceptionnelles. Mais l'état d'urgence n'était pas adapté aux circonstances. C'est pourquoi la loi n°2020-90 du 23 mars 2020 a institué le régime d'exception dénommé « état d'urgence sanitaire », lequel peut être activé en cas de « catastrophe sanitaire mettant en péril, de par sa nature et sa gravité, la santé de la population » (art. [...]
[...] Les mesures qui peuvent être prises par les autorités administratives nuisent fortement aux libertés publiques. De plus en plus nombreuses, plusieurs d'entre elles doivent nous interroger. Il est possible pour le ministre de l'Intérieur de prononcer l'assignation à résidence « de toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre public ». Or, en 2015, les militants de la COP21 ont été la cible de l'état d'urgence. [...]
[...] L'état d'urgence leur octroie des pouvoirs de police administrative étendus aux autorités civiles. Il a été utilisé à plusieurs reprises au cours de la Vème République en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public. Tel fut par exemple le cas en 2005 pour faire face aux violences dans les banlieues. Si effectivement, des circonstances impérieuses portant atteinte à l'intégrité à la Nation exigent le déploiement d'un tel dispositif, il ne doit en aucun cas porter atteinte à l'État de droit. [...]
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