Même si les critères propres du contrat administratif peuvent justifier que lui soit appliqué des règles exorbitantes du droit commun des contrats dans un but de préservation de l'intérêt général (I), force est de constater que l'opposition entre ces deux types de contrats est largement remise en cause tant au niveau de leur contenu que des règles qui leur sont applicables (II)
[...] Dans une matière où les frontières sont floues entre normes privées et publiques, le dualisme juridictionnel français trouve donc ses limites. Tribunal des Conflits, Société Entreprise Peyrot juillet 1963 Tribunal des Conflits, Union des assurances de Paris mars 1983 Conseil d'Etat, Société du Vélodrome du Parc des Princes février 1965 Conseil d'Etat, Société d'exploitation électrique de la rivière du Sant janvier 1973 Cette règle résulte des arrêts du Conseil d'Etat Bertin et Grimouard, du 20 avril 1956. On notera la formulation plus large de l'arrêt Grimouard qui exige que le contrat constitue l'une des modalités de l'exécution même du service public pour être qualifié d'administratif, alors que l'arrêt Bertin demande l'exécution même du service public Conseil d'Etat, Compagnie générale d'éclairage de Bordeaux mars 1916 Georges Vedel, Remarque sur la notion de clause exorbitante l'évolution du droit public. [...]
[...] Il est en effet impossible de changer l'objet du contrat ni de toucher aux clauses financières, et en cas de préjudice causé au cocontractant par la modification, celui-ci à droit à indemnisation. Malgré ces limites, il s'agit d'une dérogation flagrante à l'article 1134 du Code civil, et constitue donc une grande spécificité du contrat administratif par rapport aux contrats privés, même si l'on ne peut pas aller jusqu'à parler d'un principe de mutabilité du contrat administratif. L'Administration dispose aussi d'un pouvoir de contrôle et de direction. [...]
[...] L'arrêt Société du Vélodrome du Parc des Princes[3] exprime parfaitement cette idée : le contrat par lequel la Ville de Paris loue ce stade à une société lui permet de le résilier unilatéralement, de contrôler les résultats financiers de l'exploitation et de s'opposer à tout spectacle différent de ceux énumérés par la convention. On aperçoit derrière ce contrat l'idée d'exercice de prérogatives de puissance publique. Il est alors logique que seul le juge administratif puisse en connaître, donc que le contrat soit administratif. [...]
[...] Via la soumission des personnes publiques au droit de la concurrence, on constate un alignement de plus en plus frappant entre les régimes applicables aux contrats administratifs et aux contrats privés. Plus largement, c'est l'opposition classique de notre droit français entre droit public et droit privé que les instances européennes méconnaissent en grande partie. Par exemple, pour permettre l'application des principes de non discrimination et de libre circulation, quatre directives ont été adoptées en matière de passation des marchés et ont toutes été transposées en droit français[13]. [...]
[...] En transposant une directive européenne, la Loi du 4 janvier 1992 institue la procédure du référé précontractuel devant le juge judiciaire pour les contrats privés, devant le juge administratif pour les contrats publics. Une nouvelle fois, des juges différents appliqueront les mêmes règles à des contrats différents, ce qui fait perdre de sa pertinence au dualisme juridictionnel. Loin de constituer deux branches distinctes du droit s'opposant en tout point, c'est avant tout la similitude entre les contrats publics et privés qui prédomine. Les critères de qualification matériels du contrat administratif ne permettent pas d'établir une distinction claire avec les contrats privés. [...]
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