" La justice nouvelle ne saurait s'arrêter à la porte des prisons " Cour Européenne des Droits de l'Homme, 28 juin 1984.
Par cette déclaration, la Cour Européenne des Droits de l'Homme a affirmé la nécessité de respecter les droits de tout être humain d'accéder à la justice, fût-il sous le coup d'une privation de liberté et donc du besoin de lui maintenir une possibilité de contester pour excès de pouvoir, les mesures prises à son encontre par l'administration carcérale.
Actuellement, le rôle de la prison est défini par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, article 1, qui dispose "le régime d'exécution de la peine de privation de liberté concilie la protection de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de préparer l'insertion ou la réinsertion de la personne détenue afin de lui permettre de mener une vie responsable et de prévenir la commission de nouvelles infractions."
[...] Il s'avère donc que les conditions dans lesquelles le service public pénitentiaire pouvait voir sa responsabilité engagée furent longtemps très restrictives, exigeant par exemple jusqu'en 1958 que le juge administratif puisse constater une faute lourde concernant la surveillance des détenus. Pourtant il devenait de plus en plus difficile pour le Conseil d'État de persister à nier l'importance de certaines mesures de l'administration en se refusant à la contrôler. Ainsi, l'irrecevabilité du recours contentieux était-elle particulièrement critiquable si elle portait préjudice aux droits individuels ou à la situation juridique des prisonniers. Le pouvoir discrétionnaire, voire arbitraire de l'administration pénitentiaire devenait incompatible avec la conception contemporaine de l'état de droit. [...]
[...] Il en résulte que le refus de voir dans les mesures d'ordre intérieur de véritables actes faisant grief aux administrés et dès lors susceptibles d'un contrôle par le juge, était justifié par le Conseil d'État par l'adage de minimis non curat praetor qui veut dire que le juge ne doit pas s'intéresser à ce qui est de faible importance. Le champ extrêmement réduit du recours pour excès de pouvoir La crainte était donc bel et bien qu'il y ait une remise en cause du pouvoir discrétionnaire des chefs d'établissement pénitentiaire à travers une reconnaissance d'un recours contentieux. La contestation d'une décision nuisant à sa légitimité et surtout à son autorité. [...]
[...] De nos jours, il est donc établi que le juge administratif devra procéder à un examen détaillé de l'impact d'une mesure sur la situation d'un détenu ainsi que le bien-fondé de celle-ci. Ce qui évitera le plus souvent possible le rejet d'une requête en contentieux à l'encontre d'une mesure, suite à sa qualification de mesure d'ordre intérieur Malgré ces évolutions ayant mené à un élargissement des possibilités de recours contentieux, il n'y a pas pour autant une disparition totale des mesures d'ordre intérieur. [...]
[...] Ce rapport mit enfin en évidence qu'en plus du non-respect de la hiérarchie des normes dans l'univers carcéral, rien n'était surtout fait pour assurer la garantie des droits. La constatation était claire, il était nécessaire et urgent de codifier le droit en prison et d'approfondir le contrôle de l'administration pénitentiaire en réduisant le plus possible le champ des mesures d'ordre intérieur. Il ne fait nul doute aussi que la Cour de Strasbourg continuait à exercer une forte pression sur les États, parties de la Convention et en 2005 la France fut même condamnée en raison de l'absence de recours ouvert contre les mises à l'isolement, pourtant susceptible de méconnaitre l'article 3 de la Convention compte tenu de l'importance des répercussions d'une mise à l'isolement prolongée pour un détenu, un recours effectif permettant à celui-ci de contester aussi bien la forme que le fond et donc les motifs d'une telle mesure devant une instance juridictionnelle est indispensable Cour Européenne des Droits de l'Homme, janvier 2005, Ramirez Sanchez c/France. [...]
[...] L'argument de l'administration étant que le contact avec la famille reste garanti par le droit de correspondre par écrit. Par ailleurs, les décisions de changements d'affectation entre établissements de même nature ou à destination d'un établissement dont le régime de détention est plus favorable sont, elles, insusceptibles de recours contentieux. Sous réserve toutefois que ne soient pas mis en cause des droits et libertés fondamentales, car bien entendu, comme pour toute mesure d'ordre intérieur désormais, si le détenu démontre que ses droits sont affectés d'une manière qui excède les restrictions traditionnellement observées dans les établissements carcéraux, le juge aura l'obligation d'examiner le bien-fondé de ses arguments. [...]
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