L'arrêt rendu par le Conseil d'État statuant au contentieux en date du 28 mai 1971 illustre ce mouvement précis d'une soumission plus approfondie des actes administratifs au contrôle du juge. Dans cette espèce, un projet de construction urbaine développant une forme d'extension de la ville de Lille était destiné à créer un nouveau complexe universitaire.
Ce projet devait être réalisé au travers d'expropriations et démolitions d'une partie des habitations de la zone concernée. Modifiant le projet, l'administration parvint à réduire le nombre d'habitations concernées par ce funeste sort de deux cent cinquante à quatre-vingt-huit.
Mais la Fédération de défense des personnes concernées par le projet avait émis une hypothèse plus économique encore en logement supprimés, par le déplacement de l'axe routier nord-sud du projet. Cette hypothèse ayant été rejetée par l'administration, le ministre de l'Equipement et du Logement déclara le projet d'utilité publique par un arrêté du 3 avril 1968. La fédération, considérant cet acte entaché de vice d'illégalité interne comme externe, forma un recours en excès de pouvoir à l'encontre de l'arrêté déclaration d'utilité publique.
Le problème juridique ainsi posé au juge de l'excès de pouvoir était de statuer au sujet de la légalité de cette déclaration d'utilité publique. En revanche et au delà de cette simple question d'espèce, le Conseil d'Etat au travers de son dernier considérant a ici signé un arrêt de principe et a plus largement répondu à une problématique plus ouverte : dans quelle mesure le juge administratif peut il évaluer l'expression d'un pouvoir discrétionnaire de l'administration ?
[...] Le problème juridique ainsi posé au juge de l'excès de pouvoir était de statuer au sujet de la légalité de cette déclaration d'utilité publique. Considérant celle-ci comme légale tant au regard de sa procédure d'enquête que du point de vue de sa juste qualification d'utilité publique, le juge rejeta le recours formé à l'encontre de l'acte et censura le jugement du TA de Lille. Si les juges se sont d'abord penchés sur la légalité externe de la décision d'utilité publique, constatant que l'administration avait en quelque sorte scindé la procédure en deux, ils ont admis que cette règle assouplisse l'article 1er du décret du 6 juin 1959, unanimement considéré par la jurisprudence ainsi que la doctrine comme inapplicable. [...]
[...] La qualification matérielle des faits ainsi que leur adéquation à la mesure sont deux outils du juge au cœur d'un mouvement tendant actuellement vers un contrôle de plus en plus poussé et exigent, ceci afin d'assurer une protection croissante des administrés face aux choix des pouvoirs publics. L'arrêt rendu par le Conseil d'Etat statuant au contentieux en date du 28 mai 1971 illustre ce mouvement précis d'une soumission plus approfondie des actes administratifs au contrôle du juge. Dans cette espèce, un projet de construction urbaine développant une forme d'extension de la ville de Lille était destiné à créer un nouveau complexe universitaire. Ce projet devait être réalisé au travers d'expropriations et démolitions d'une partie des habitations de la zone concernée. [...]
[...] Cette hypothèse ayant été rejetée par l'administration, le ministre de l'Équipement et du Logement déclara le projet d'utilité publique par un arrêté du 3 avril 1968. La fédération, considérant cet acte entaché de vice d'illégalité interne comme externe, forma un recours en excès de pouvoir à l'encontre de l'arrêté déclaration d'utilité publique. Le Tribunal administratif de Lille fit droit à la demande en annulant le décret ministériel par un jugement du 30 juillet 1969, fondant cette annulation sur l'article 1er du décret du 6 juin 1959 relatif à la procédure d'enquête préalable. Le ministre forma un pourvoi en cassation devant le CE. [...]
[...] Cette idée connut sa genèse dans l'arrêt : une nouvelle théorie d'évaluation de l'utilité publique était née. II. Un moyen subjectif d'évaluation de l'utilité publique par le juge administratif Le grand apport de l'arrêt Ville Nouvelle Est qu'il permet d'apprécier la légalité de la déclaration d'utilité publique au moyen d'une toute nouvelle théorie dite des balances. Son importance en fait presque un principe général du droit selon Lemasurier, c'est pourquoi il semble nécessaire d'en expliquer le principe de fonctionnement avant de se pencher sur ses modalités d'utilisation a. [...]
[...] Bien que démenties aussitôt, celles-ci avaient également pour rôle d'orienter la haute juridiction administrative sur le rôle futur de ce bilan et sur ses modalités d'usage. b. Une utilisation nécessairement mesurée de la théorie des balances Dans les conclusions de cet arrêt, Braibant mesurait lui-même la puissance que pouvait avoir la nouvelle théorie proposée. C'est pourquoi il précisait que son usage devait être limité, comme le Code de déontologie médicale le préconisait dans un autre domaine, à un exercice avec tact et mesure Ainsi, un tel outil devait, selon son créateur même, demeurer bridé et assez étroit pour ne pas substituer à la subjectivité de l'administration celle du juge. [...]
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