Juridictions administratives, formations à juge unique, évolution de la juridiction, célérité des jugements, Olivier le Bot, voies de recours, procédures contentieuses, CE 1995 affaire Hardouin et Marie, CE 2002 affaire Duvignères, CE 2016 affaire Fairvesta et Numericable, ouverture de l'ordre administratif, Loi du 30 juin 2000, procédures d'urgences, référé suspension L 521-1 CJA, référé liberté L. 521-2 CJA, décret du 17 juillet 2018, jurisprudence Tropiques de 2007, injonctions d'exécution, loi du 8 février 1995, CE 2001 Vassilikiotis, critères de recevabilité des requêtes, décret du 24 juin 2003, vices de légalité externe, jurisprudence Affaires économique de la CFDT, accès au juge
Au cours des dernières décennies, la juridiction administrative a été profondément modernisée, aussi bien sur le plan de l'instruction que de l'organisation des voies de recours. Pourtant, certains de ces changements ne font pas consensus dans leur totalité. L'augmentation exponentielle des requêtes a bouleversé les conditions d'exercice du juge administratif, aujourd'hui soumis à des logiques toujours plus flagrantes de productivité et d'efficacité. Au nom de la célérité des jugements, aussi bien la jurisprudence que les textes sont venus revoir les exigences en matière de légalité et de recevabilité, tendance, qui, pour beaucoup d'universitaires, doit être considérée avec prudence. Ainsi, la juridiction semble-t-elle aujourd'hui faire l'objet d'un paradoxe : renforcée dans sa légitimité et dans ces principes, la juridiction administrative n'en est pas moins l'objet d'interrogations et de doutes quant à sa capacité à faire face aux vagues continues de requêtes auxquelles celle-ci est confrontée.
[...] Comment le degré d'ouverture de la juridiction administrative a-t-il évolué au cours de ces dernières décennies ? « La juridiction administrative a su s'adapter et même se métamorphoser au cours des dernières décennies ( . ) en vue de mieux répondre aux attentes des justiciables ( . ) Cette évolution n'est toutefois pas linéaire. Des régressions ( . ) contrebalancent le mouvement général d'amélioration ». Par ces mots, Olivier le Bot livre une vision mitigée de l'évolution de la juridiction administrative, qu'il estime à la fois empreinte de progrès et de dérives. [...]
[...] Le décret de Justice administrative pour demain (JAD) et l'ordonnance du 18 juillet 2013 rendent ainsi compte de cette tendance en imposant respectivement aux justiciables des conditions strictes d'accès au juge (notamment concernant le recours à un avocat) et des mécanismes dissuasifs (dommages et intérêts dans le cadre d'un REP dirigé contre un permis de construire). L'accès à la juridiction administrative est d'autant plus limité que le dépôt de la requête devient aujourd'hui conditionné au respect d'un certain nombre de procédures de résolution des conflits. En premier lieu, les requérants doivent dans de nombreux cas effectuer, préalablement à leur recours contentieux, un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) adressé à l'administration concernée. [...]
[...] Le contrôle de l'exécution des décisions de justice est aujourd'hui plus approfondi. La jurisprudence récente permet en effet aux juridictions de mobiliser des outils novateurs, leur permettant d'influencer la portée réelle de leurs décisions. Depuis la jurisprudence Association AC de 2004, les juges administratifs peuvent différer dans le temps les effets d'une annulation contentieuse au nom de la sécurité juridique - la jurisprudence Tropiques de 2007 a montré de même la capacité du juge à moduler les effets d'un revirement de sa ligne jurisprudentielle. [...]
[...] De même, il est possible de constater aujourd'hui une valorisation de la médiation préalable obligatoire, dont l'objectif est de favoriser la négociation (notamment par la transaction). Ces deux méthodes de résolution des conflits constituent en elles-mêmes de véritables filtres visant à réduire par la dissuasion et la résolution non juridictionnelle des conflits le nombre de requêtes déposées devant les juridictions, allant ainsi à l'encontre des attentes des justiciables. Un contrôle atténué par le juge administratif L'impératif d'efficacité de la justice administrative se traduit à la fois par un resserrement du contrôle du juge administratif au profit de la sécurité juridique et par de nouvelles méthodes de traitement du contentieux qui le rendent moins accessible. [...]
[...] Cette pratique, aujourd'hui fortement répandue dans le domaine des contentieux de masse comme le contentieux des étrangers ou fiscaux (R-222-13 CJA) n'est pas sans conséquences sur la qualité des décisions de justice. Outre le problème de légitimité qu'elle implique, la formation à juge unique peut aboutir à une décision fragilisée, ne pouvant être contredite par un autre magistrat. De même, le rôle du rapporteur public se voit amoindri en raison de son absence dans l'instruction et le traitement des dossiers : sa vision ne peut donc pas éclairer le public souhaitant connaître les tenants et les aboutissants de ces affaires. [...]
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