La très ancienne tradition centralisatrice de la France est souvent évoquée pour expliquer les différences dans l'organisation politico administrative entre notre pays et ses voisins. Toutefois, dès les premières années de la Ille République, une autonomie non négligeable était reconnue aux départements (par la loi du 10 août 1871) et aux communes (par la loi du 5 avril 1884). À partir de l'entre-deux-guerres, ces dernières s'efforcèrent, avec des fortunes diverses, d'accroître le champ de leurs compétences ("socialisme municipal"). Néanmoins, cette autonomie s'exerçait dans le cadre étroit du régime de la tutelle étatique, qui était à la fois d'ordre juridique, financier et technique, en dépit de l'allégement sensible de la tutelle sur les communes, mise en oeuvre par la loi du 31 décembre 1970.
Il est clair que le mouvement de décentralisation a davantage accru l'autonomie des collectivités territoriales, d'une double manière : d'une part, en modifiant le rapport des pouvoirs entre l'autorité étatique et les autorités locales, et d'autre part, en déplaçant la ligne de partage des compétences administratives en faveur des collectivités territoriales. C'est ainsi que la tutelle est supprimée, l'exécutif départemental transféré au président du conseil général, et la région érigée en collectivité territoriale de plein exercice à partir de l'élection des conseils régionaux au suffrage universel direct le 16 mars 1986. En outre, des pans entiers de l'action administrative sont transférés aux collectivités territoriales, qui, aux termes de la loi, doivent également bénéficier d'un transfert de ressources correspondantes. La réforme constitutionnelle du 28 mars 2003 ajoute une nouvelle pierre à l'édifice en approfondissant la démocratie locale et l'autonomie financière des collectivités locales.
Toutefois, l'autonomie accrue des collectivités territoriales continue à s'exercer dans le cadre strictement défini par l'État. Conformément au principe d'autonomie, ce dernier détermine seul les conditions d'exercice des compétences de celles-là. De plus, le transfert des compétences est restreint, dans sa portée, par la limitation des ressources financières et humaines des collectivités territoriales.
Si l'autonomie des collectivités territoriales a donc été accrue par la décentralisation (I), elle demeure strictement encadrée par l'État et limitée dans ses moyens (II).
[...] Le principe de l'autonomie des collectivités territoriales signifie que, désormais, celles-ci sont libres d'agir dans le respect de la légalité. Cette autonomie accrue aurait toutefois été d'une portée limitée sans le transfert des pouvoirs exécutifs locaux aux présidents des conseils généraux et régionaux. Avant la mise en vigueur de la loi du 2 mars 1982, les communes étaient les seules collectivités locales qui disposaient de la maîtrise de leur exécutif. En effet, l'exécutif du département était confié au préfet, en contradiction d'ailleurs avec les dispositions de l'article 87 de la Constitution de la IVe République. [...]
[...] La possibilité -actuelle ou future- pour les collectivités locales de fixer le taux de ces droits et taxes librement engendre inévitablement des disparités, ce qui constitue une certaine atteinte à l'égalité des citoyens devant l'impôt. Le constituant a fixé en 2003 le principe de la libre disposition des ressources des collectivités locales. À cet égard, l'autonomie des collectivités territoriales ne doit pas remettre en cause les principes de légalité, d'unité de la Nation et d'égalité des citoyens devant les charges publiques. [...]
[...] Si l'autonomie des collectivités territoriales s'est accrue incontestablement vis-à-vis de l'État, tout en étant maintenue dans de strictes limites, il n'est pas inconcevable que les régions tentent, à l'avenir, d'exploiter leurs nouvelles compétences dans le domaine économique pour imposer leur rôle directeur à l'égard des autres échelons locaux.) Les divergences potentielles entre les diverses collectivités locales conduiraient alors à valoriser le rôle des préfets en tant qu'arbitres. L'évolution institutionnelle particulièrement marquée pour l'outre-mer (articles 73 et 74 de la Constitution) peut constituer une source de fragilisation ou d'émiettement du concept d'État unitaire décentralisé, mais aussi un nouveau moyen de faire vivre une communauté d'histoire, de culture et d'intérêts, dépassant l'État Nation pour mieux faire face au contexte de la mondialisation. [...]
[...] Un transfert de ressources correspondantes doit conférer sa pleine effectivité au transfert de compétences. Ce sont les lois des 7 janvier et 22 juillet 1983 qui déterminent la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État. L'article 3 de la loi du 7 janvier 1983 pose le principe de blocs de compétences dévolues à chaque collectivité. Cependant, ce principe se combine avec des articulations qui permettent à chaque niveau de collectivité de conserver un certain rôle à l'intérieur d'un même secteur. [...]
[...] La décentralisation a permis un élargissement sensible de l'autonomie des collectivités territoriales à l'égard de l'État. Ce phénomène est illustré par un double transfert de pouvoirs et de compétences de l'État aux collectivités territoriales. A. La décentralisation modifie la répartition entre pouvoirs étatiques et locaux au profit de ces derniers La modification du rapport des pouvoirs entre l'État et les collectivités territoriales s'est opérée au travers de la suppression du régime de la tutelle, du transfert du pouvoir exécutif des départements et des régions aux dépens de l'autorité étatique déconcentrée et au profit de présidents élus par les conseils généraux et régionaux, et enfin par la transformation des régions en collectivités territoriales de plein exercice. [...]
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