Ordre public matériel, ordre public extérieur, arrêt Morsang sur Orge, Maurice Hauriou, liberté, jurisprudence administrative, dignité, moralité publique, police administrative, ordre moral, arrêt Lutétia, Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, Dieudonné
L'ordre public, état dans lequel s'exercent au mieux les libertés, est communément défini comme la réunion de quatre éléments que la police administrative est chargée de protéger et de faire respecter en imposant aux citoyens les restrictions aux droits et libertés qu'exige la vie en société. Ainsi, l'article L2212-2 du Code des relations entre le public et l'administration, tout en évoquant la notion abstraite et générale de « bon ordre », prévoit que les trois premières composantes de l'ordre public sont la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique : elles forment ce qu'Hauriou appelle « l'ordre public matériel et extérieur ». L'autorité de police administrative doit ainsi s'assurer de la sauvegarde physique des personnes et de l'intégrité matérielle des biens, veiller à l'absence de trouble susceptible de porter atteinte au repos des habitants et contrôler l'hygiène et la santé publique. Il s'agit de la conception traditionnelle de l'ordre public.
Puisque censé répondre à l'intérêt général, l'ordre public est changeant et varie selon les besoins de population, qui, par nature, évoluent. Ainsi, à ces trois éléments, le Conseil d'État est venu élargir la définition d'ordre public et compléter la série en intégrant la notion de « respect à la dignité de la personne humaine » par l'arrêt Commune de Morsang-sur-Orge rendu en 1995.
[...] Celle-ci est-elle une composante de l'ordre public ? Si l'ordre public tend à élargir sa définition en devenant un prétexte pour dicter un nouvel ordre moral il est avant tout l'état dans lequel s'exercent au mieux les libertés, définition excluant ainsi toute notion d'ordre moral (II). L'ordre public comme moyen d'instauration d'un nouvel ordre moral Au XXème siècle, la notion d'ordre public s'est vue peu à peu recouvrir des notions immatérielles jusqu'alors ignorées : si la jurisprudence a d'abord consacré une forme de moralité publique implicitement le Conseil d'État a explicitement reconnu le respect de la dignité humaine comme composante de l'ordre public La reconnaissance implicite de la moralité publique comme composante de l'ordre public à travers l'étude de la jurisprudence La morale est une notion qui désigne l'ensemble des règles ou préceptes, obligations ou interdictions relatifs à la conformation de l'action humaine aux mœurs et aux usages d'une société donnée. [...]
[...] Enfin, en pratique, il peut être observé que le Conseil d'État - quand la question est en cause - ne fait pas toujours de la moralité publique une composante de l'ordre publique. Il s'oriente parfois vers plus de neutralité et remet au centre de ses préoccupations l'idée de protection des libertés publiques. De manière générale, les jugent évitent d'élargir l'ordre en public : en 1971, est refusé l'idée d'un ordre public esthétique ; en 2004, l'interdiction de sortie de mineurs dans des quartiers sensibles n'est acceptée qu'à des conditions très particulières de temps et de lieux. [...]
[...] Il en fait, certes, mais il met néanmoins un point d'honneur à le faire uniquement selon conditions. Il prend en effet compte de « circonstances locales ». Ainsi, dans l'arrêt Société Les Films Lutétia, la juridiction administrative évalue le caractère immoral du film litigieux mais observe également la situation du lieu dans lequel le film est projeté. Dans l'arrêt Commune d'Arcueil de 1997, dans lequel des publicités de « messageries roses » avaient fait l'objet d'une interdiction par le maire, elle précise à ce propos qu'une publicité ne peut être interdite qu'en présence de circonstances locales particulières, que « le caractère immoral ne peut fonder une interdiction ». [...]
[...] La vie en société ne requiert pas la perfection chez ses membres et pareille perfection ne peut d'ailleurs s'imposer par la contrainte. Les travaux préparatoires du Code civil attestent de cette dissemblance. Les lois, dit Portalis, « s'occupent plus du bien politique de la société que de la perfection morale de l'homme ». Et ajoute : « la vertu est l'objet de la morale, la loi a plus pour objet la paix que la vertu ». Les évolutions récentes poussent ainsi à se poser les questions suivantes : l'autorité de police administrative peut-elle agir dans un but de moralité publique ? [...]
[...] Ni consacré constitutionnellement, ni légalement, la moralité publique ne peut être placée au même rang que la sécurité, la salubrité et la tranquillité par les pouvoirs de police. Si l'ordre public comprend comme élément une certaine moralité publique, celle-ci est néanmoins marginale par rapport aux autres missions de la police administrative, et en pratique, le Conseil d'État fait de moins en moins de la moralité publique une composante de l'ordre public. L'exclusion de la moralité publique dans la pratique jurisprudentielle actuelle Il s'agit dans un premier de nuancer et tempérer les affirmations consistant à soutenir que le Conseil d'État fait de la moralité publique de façon excessive. [...]
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