L'acte normal de gestion est une notion qui combine deux définitions contradictoires : elle permet à l'administration fiscale d'exercer un contrôle sur le contribuable, mais aussi de reprocher aux entreprises d'aller contre leur propre intérêt. C'est ce qu'elle fait dans cet arrêt.
Un contribuable exerçait la profession de remisier de bourse et de gérant de portefeuille boursier. Sans y être tenu par contrat, le contribuable indemnisait les clients dont il gérait le portefeuille, des pertes que leur avait occasionné sa gestion et déduisait en charges les indemnités qu'il avait versées, les intérêts des emprunts qu'il avait contracté pour financer les indemnités ainsi que les primes d'assurance vie sur les contrats d'emprunt.
L'administration fiscale contestait ces opérations et le fait condamner à des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1977, 1978, 1979, 1980 à raison de la réintégration dans ses revenus des sommes de remboursement et celles qui en découlaient.
Il forme donc un pourvoi devant le Conseil D'Etat.
Quand est-ce que peux ton considérer qu'il y a acte de gestion anormale ? Quand est-ce que le risque que le chef d'entreprise prend pour préserver son sa société devient-t-il excessif ?
La cour rappelle que s'agissant d'opération traduite dans la comptabilité par des écritures de charges, l'administration est considérée comme apportant la preuve de la gestion anormale, à moins que le contribuable ne puisse les justifier d'un intérêt pour son entreprise.
Elle rappelle également que les sommes de remboursement et celles en découlant (intérêt, assurance vie) étaient plusieurs fois supérieurs à ses recettes professionnelles, alors même qu'il n'y avait pas de contrat, donc pas d'obligation juridique de remboursement. Et que si le contribuable avait pu dans l'intérêt de l'entreprise accorder cette garantie pendant les deux premières années, eu égard à l'expérience acquise, et à l'importance des pertes, il a manifestement excédé les risques qu'un chef d'entreprise peut être conduit à prendre pour améliorer les résultats de son exploitation en persistant à offrir cette garantie.
La cour fait donc une différence entre les années 1978/1977 et 1979/1980 et ne caractérise l'acte de gestion anormale que pour les deux dernières années.
Elle rejette donc l'arrêt sur une partie seulement le 17 octobre 1990.
Dans cet arrêt, les juges se prononcent pour une liberté de gestion encadrée (I), quitte à créer une jurisprudence critiquable, tant en ce qu'elle s'appuie sur des critères objectifs qu'en ce qu'elle permet l'immixtion du juge dans l'entreprise (II).
[...] L'atteinte à la liberté de gestion est le but de la théorie de l'acte normal de gestion. ( Mais on peut répondre à cela que le principe de non-immixtion n'a jamais été consacré, seulement évoqué dans une jurisprudence de 1958. ( La garantie donnée par le contribuable, qui est certes risquée, dans le but d'attirer des clients, est très avantageuse pour le tiers, et de bonnes intentions. Il est rare que le droit n'encourage pas ce qui protège le tiers. [...]
[...] L'acte anormal de gestion - Commentaire : CE 17/10/1990 Loiseau L'acte normal de gestion est une notion qui combine deux définitions contradictoires : elle permet à l'administration fiscale d'exercer un contrôle sur le contribuable, mais aussi de reprocher aux entreprises d'aller contre leur propre intérêt. C'est ce qu'elle fait dans cet arrêt. Un contribuable exerçait la profession de remisier de bourse et de gérant de portefeuille boursier. Sans y être tenu par contrat, le contribuable indemnisait les clients dont il gérait le portefeuille, des pertes que leur avait occasionnées sa gestion et déduisaient en charges les indemnités qu'il avait versées, les intérêts des emprunts qu'il avait contractés pour financer les indemnités ainsi que les primes d'assurance vie sur les contrats d'emprunt. [...]
[...] Cela laisse à l'administration une plus grande possibilité de considérer l'acte anormal, en ce sens que la charge de la preuve revient au contribuable. Mais la cour s'encadre elle-même aussi, elle encadre la limitation de liberté elle-même. L'absence de caractère usuel de la garantie donnée et l'absence de stipulation contractuelle expresse de la garantie ne suffisent pas à prouver l'anormalité de l'acte. Elle rend par là moins facile la caractérisation d'acte anormal de gestion. Mais cet encadrement est critiquable car le critère d'excessivité est subjectif et que l'immixtion du juge dans la gestion de l'entreprise est redoutée. [...]
[...] L'expérience des deux premières années aurait dû montrer au contribuable que la garantie de ses remboursements était excessive. ( Cette subjectivité met le contribuable dans une situation d'insécurité juridique. Et permet à l'administration d'ouvrir le champ des comportements fiscaux condamnables. ( La cour examine ici bien le critère de proportionnalité, comme le fait la cour de justice européenne. Le risque pris n'était pas proportionné aux gains espérés. Mais la solution est critiquable car même si on peut évaluer une situation comme risquée dans l´après-coup, à l'origine elle peut paraître ne pas l'être. [...]
[...] ( Ici l'acte anormal sert excessivement le tiers. ( Le but est aussi d'assurer l'égalité de traitement fiscal des entreprises, mais en l'espèce, ce n'est pas le cas. Ici, le contribuable se voit reprocher d'aller contre son propre intérêt et c'est pour cela que l'administration ne veut pas accorder la déduction. L'administration n'a pas à assumer les risques pris par le contribuable, ni à l'encourager C'est critiquable en ce que ce genre de considération n'est pas du devoir de l'administration. [...]
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