Le recours le plus emblématique du contentieux administratif est le recours pour excès de pouvoir. Parfois surnommé « recours guillotine », c'est un recours par lequel le requérant demande au juge administratif de contrôler la légalité d'une décision administrative et d'en prononcer l'annulation si elle est illégale. Soumis à différentes conditions tenant au requérant, à la nature de l'acte attaqué, à des délais de recours et à l'absence de recours parallèle, ce procès fait à un acte a connu un élargissement considérable de ses moyens d'ouverture, assurant alors une plus grande protection des libertés. Gaston Jèze ira même jusqu'à dire que le recours pour excès de pouvoir est « l'arme la plus efficace, la plus pratique, la plus économique qui existe au monde pour défendre les libertés ».
Dans son article Le Huron au Palais-Royal, publié en 1962, le professeur Riveiro montre par un dialogue fictif entre un Huron juriste et lui-même, combien le recours pour excès de pouvoir est perçu comme le fleuron du contentieux administratif : le Huron juriste le conçoit comme « la plus merveilleuse création des juristes ». Cependant, Jean Riveiro cherche tout au long de l'article à relativiser l'idéalisation de ce recours en faisant deux principales critiques que sont l'absence du caractère suspensif et le refus par le juge de se reconnaître un pouvoir d'injonction face à l'administration. Ainsi, le professeur préconise implicitement et de façon humoristique des réformes pour mettre fin à une sorte d'arbitraire de l'administration. Ces critiques semblent aujourd'hui dépassées avec l'intervention de la loi du 30 juin 2000, de la loi du 8 février 1995 et avec l'évolution de la jurisprudence du Conseil d'État (...)
[...] dans le contentieux de l'excès de pouvoir, il lui est interdit d'aller au delà de la pure et simple annulation de l'acte Alors que le Huron pensait que l'annulation de la décision administrative par le juge administratif effaçait toutes ses conséquences, le professeur Riveiro l'interrompt en lui précisant qu'en aucun cas le juge administratif ne dispose d'un pouvoir d'injonction face à l'administration. En effet, son seul pouvoir est l'annulation de la décision illégale mais il ne peut en ordonner les conséquences en dictant à l'administration ce qu'elle doit faire ou ne pas faire et il ne peut, à fortiori, prendre une nouvelle décision à la place de l'administration. Cela tient au privilège du préalable de l'administration. [...]
[...] C'est ce que critique en partie l'article du professeur Riveiro. Codifiée aux articles L 911-1 à L 911-4 du Code de justice administrative, la loi de 1995 permet au Conseil d'État, aux cours administratives et aux tribunaux administratifs d'assortir leur décision d'une injonction et d'une astreinte. Ainsi, le juge administratif peut ordonner à l'administration de prendre une mesure d'exécution lorsqu'elle annule un acte. Il peut aussi lui ordonner de prendre une nouvelle décision afin de satisfaire à la demande du requérant. [...]
[...] En effet, si le recours pour excès de pouvoir permet d'annuler un acte illégal de l'administration, il ne permet pas de suspendre les effets de cette décision lorsqu'elle est frappée d'un recours: les décisions administratives restent en principe exécutoires comme le précise le Conseil d'État dans un arrêt Huglo du 2 juillet 1983. Face à l'intervention de Jean Riveiro, le Huron ne se laisse pas surprendre et invoque le fait que le juge possède le pouvoir d'ordonner le sursis a exécution. Là encore, le professeur vient critiquer cette mesure d'urgence. [...]
[...] Tout cela s'enferme dans des délais qui, s'ils ne sont pas respectés, donneront lieu à l'injonction d'une astreinte prononcée par le juge. Selon l'article L 911-4, le juge peut même assurer l'exécution d'un jugement ou d'un arrêt en cas d'inexécution. Cette évolution vient parer les effets néfastes qu'avaient l'absence d'un pouvoir d'injonction confié au juge administratif. En effet, l'annulation n'est plus la seule mesure que peut prendre le juge comme le critiquait Jean Riveiro. Désormais, il doit dire ce qui découle de cette annulation. Le requérant verra alors réparés les dommages qu'il a subit à cause de l'acte administratif illégal. [...]
[...] AUGAGNEUR Laurie Contentieux Administratif Commentaire de l'article du professeur Riveiro, Le Huron au Palais Royal Le recours le plus emblématique du contentieux administratif est le recours pour excès de pouvoir. Parfois surnommé recours guillotine c'est un recours par lequel le requérant demande au juge administratif de contrôler la légalité d'une décision administrative et d'en prononcer l'annulation si elle est illégale. Soumis à différentes conditions tenant au requérant, à la nature de l'acte attaqué, à des délais de recours et à l'absence de recours parallèle, ce procès fait à un acte a connu un élargissement considérable de ses moyens d'ouverture, assurant alors une plus grande protection des libertés. [...]
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