Si la responsabilité de l'Administration pour faute est consacrée par la loi, la responsabilité sans faute constitue en partie une innovation du juge administratif. Ce type de responsabilité peut paraître à première vue surprenant, car rien ne justifie juridiquement de faire supporter à l'Administration les conséquences d'un acte qu'elle était en droit d'accomplir. En effet, l'article 5 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen confirme que « la loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché ». Dans certaines situations, cependant, l'équité incite à ne pas laisser à la charge des tiers les conséquences de l'activité dommageable de l'État, notamment lorsqu'elle a créé un risque ou, comme nous allons le voir, lorsqu'elle a causé une rupture d'égalité devant les charges publiques au détriment d'un administré.
[...] Pour vérifier s'il ne peut pas condamner la commune à réparer le préjudice du demandeur, le Conseil d'Etat va devoir constater la présence des conditions de la responsabilité sans faute. II. La reconnaissance d'une responsabilité fondée sur l'absence de faute de la collectivité locale : Ayant soulevé d'office le moyen de responsabilité sans faute de la commune, le juge est alors tenu de vérifier l'existence des conditions de son engagement pouvant donné lieu à une indemnité A. L'appréciation d'un préjudice anormal et spécial et d'un lien de causalité avec l'activité de la commune : La poursuite de l'intérêt général se traduit fréquemment par l'édiction d'actes aux conséquences parfois néfastes pour certains individus. [...]
[...] Ce cas de figure est notamment illustré par l'arrêt Couitéas rendu par le Conseil d'Etat le 30 novembre 1923. Mais, la responsabilité sans faute a été élargie aux conséquences néfastes des décisions réglementaires légales comme c'est le cas dans l'arrêt Commune de Gavarnie où le propriétaire d'un magasin de souvenir a assigné la commune en réparation de son préjudice subi du fait de l'édiction par celle-ci d'un arrêté interdisant le passage des piétons sur le chemin où se situe son fonds de commerce. [...]
[...] En effet, il serait inéquitable que le dommage subi par un administré du fait de l'activité de la puissance publique reste à sa charge. L'octroi en l'espèce d'une indemnité par la commune en réparation du préjudice subi par le propriétaire du magasin du fait du caractère dommageable de sa décision réglementaire légale est donc justifié. [...]
[...] En effet, il est plus logique, d'un point de vue moral, que la charge incombe à l'auteur du dommage, même non fautif du dommage, plutôt qu'à la victime. De plus, pour l'Administration, il est plus acceptable de verser une indemnité pour une activité légale plutôt que de devoir répondre d'une action fautive, car la responsabilité sans faute, étant dénuée de tout jugement de valeur, est moins infamante que la responsabilité pour faute. La préoccupation qui fonde alors la responsabilité n'est pas, à la différence de la responsabilité pour faute, de sanctionner un comportement inadapté mais un simple sentiment de justice. [...]
[...] Cependant, dans l'arrêt, le Conseil d'Etat statue tout de même sur les droits à indemnité du demandeur. La raison vient du fait que le juge administratif est tenu, après avoir écarté la responsabilité fondée sur la faute, de s'assurer qu'il n'est pas dans l'hypothèse de mise en oeuvre de la responsabilité sans faute. Le juge a l'obligation de procéder à cette vérification car c'est un moyen d'ordre public, et en tant que tel, il doit être soulevé d'office par le juge, c'est-à-dire, sans que les parties ne l'est invoqué. [...]
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