Responsabilité de l'État du fait des lois, Parlement, compensation, arrêt La Fleurette, intérêt général, responsabilité sans faute, article 92 de la Constitution, droit communautaire
Il y a quelque paradoxe à admettre que l'existence d'une loi puisse donner lieu à l'engagement d'une quelconque responsabilité. En effet, selon les propos de Laferrière, "la loi est un acte de souveraineté et le propre de la souveraineté est de s'imposer à tous sans qu'on puisse ne réclamer d'elle aucune compensation". Or, admettre la responsabilité du fait des lois, c'est reconnaître que l'État et lui seul, puisqu'il est l'unique détenteur du pouvoir législatif, puisse être condamné à réparer les préjudices subis par les administrés à raison de l'usage d'une de ses prérogatives régaliennes, la plus importante peut-être : le pouvoir du Parlement, représentant du peuple souverain, d'édicter des règles générales et absolues.
[...] Les conditions de la responsabilité du fait des lois La première condition résulte du principe d'égalité devant les charges publiques. Comme tous les régimes de responsabilité sans faute fondés sur ce principe, elle suppose que le préjudice subi revête des caractères d'anormalité et de spécialité. La spécialité, tout d'abord, est celle des deux caractères qui se conçoit le plus aisément : si le préjudice n'était propre à certains administrés, il n'existerait pas en effet de rupture d'égalité devant les charges publiques. [...]
[...] C'est ainsi que deux catégories de lois excluent toute indemnisation à raison de leur objet. Il s'agit, en premier lieu, des lois délibérément discriminatoires, c'est-à-dire de celles qui impliquent nécessairement une différence de traitement entre les administrés (CE janv Commune de Blanquefort, à propos d'un mécanisme de péréquation financière). En second lieu, sont considérés comme non indemnisables les préjudices qui résultent d'une loi poursuivant un objectif d'intérêt général prééminent : par cette expression tenant quelque peu du pléonasme sont désignés des objectifs d'intérêt général particulièrement importants, qui priment sur toute autre considération : c'est ainsi, pour prendre des exemples majeurs, que constituent des intérêts généraux prééminents la santé publique, la protection de la nature (CE déc Rouillon), ou encore l'économie nationale (CE juill Ville d'Elbeuf). [...]
[...] Selon la Cour de justice des Communautés européennes, cette méconnaissance entraîne la responsabilité de l'État (CJCE, 19déc Francovitch), y compris lorsque cette méconnaissance résulte de l'activité ou de l'inactivité du législateur (CJCE mars 1996, Brasserie du pêcheur). Le juge administratif ne voit guère d'obstacle à le reconnaître. Néanmoins, la totalité des espèces dans lesquelles le juge a eu à se prononcer concerne une méconnaissance résultant de règlements : en pareille espèce, la méconnaissance du droit communautaire étant une illégalité, c'est pour faute que le juge a condamné l'administration Ass févr Société Arizona Tobacco Products). [...]
[...] Or, admettre la responsabilité du fait des lois, c'est reconnaître que l'État et lui seul, puisqu'il est l'unique détenteur du pouvoir législatif, puisse être condamné à réparer les préjudices subis par les administrés à raison de l'usage d'une de ses prérogatives régaliennes, la plus importante peut-être : le pouvoir du Parlement, représentant du peuple souverain, d'édicter des règles générales et absolues. I. Une responsabilité restrictive Les fondements de la responsabilité du fait des lois entraînent pour conséquence l'exigence de conditions rigoureuses A. Les fondements de la responsabilité du fait des lois Traditionnellement, il est admis que la responsabilité du fait des lois est engagée, sans faute, pour rupture de l'égalité devant les charges publiques. C'est la solution énoncée par l'arrêt La Fleurette. [...]
[...] L'extension de la responsabilité sans faute La jurisprudence La Fleurette ne s'applique pas aux seules lois ordinaires. Déjà, le 30 mars 1966, le Conseil d'État, dans un arrêt d'Assemblée Compagnie générale d'énergie radioélectrique, l'avait étendue à la responsabilité du fait des conventions internationales, qui présentent avec les lois ce point commun que l'appréciation de leur validité échappe au juge administratif. De même, les ordonnances prises sur le fondement de l'article 92 de la Constitution de 1958, qui ont force de loi, sont soumises à un régime identique Sect janv Bovero). [...]
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