La France possède une tradition plutôt interventionniste en matière économique, avec une parenthèse libérale que l'on peut faire aller de 1789 à 1914. En effet, la Révolution met en exergue la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre, en insistant sur le droit de propriété. La France va alors connaître une période d'Etat minimum en matière économique. C'est à partir de Napoléon III que se manifeste une certaine volonté sociale de l'Etat : apparaît alors le terme d'Etat Providence, dans un sens péjoratif. Au XIXe siècle, le dogme de l'équilibre budgétaire prévaut, l'Etat intervient dans les domaines régaliens par le biais de méthodes comme la concession. Des failles s'ouvrent dans les années vingt avec des dispositifs de réglementation des prix et de protection de l'épargne. En 1936 arrive au pouvoir une nouvelle génération d'hommes politiques pour qui l'interventionnisme est une conséquence normale de l'évolution économique. A partir de la Libération, l'Etat devient interventionniste et a recours à des mécanismes de réglementation de l'économie, à la planification et aux nationalisations. Ces méthodes de gestion vont être remises en cause à partir des années soixante-dix, au motif que la réglementation économique serait porteuse de rigidités et freinerait le développement économique. On opposera ainsi le modèle français au modèle anglo-saxon qui encouragerait plus l'initiative privée, par le biais de réglementations plus souples et d'autorités de contrôle moins dépendantes de l'Etat ...
[...] Le droit français repose en effet sur les principes de 1789 qui affirment la liberté, exigence qui peut entrer en conflit avec celle d'égalité. Le caractère social de la République signifie que les pouvoirs publics peuvent intervenir dans le domaine économique pour limiter les excès résultant du principe de libre entreprise affirmé par le Conseil Constitutionnel, leur action va donc consister à concilier égalité et exercice des libertés. Ici, le débat est ancien : est-ce que cette fonction de limitation des inconvénients du libéralisme incombe à l'Etat ? [...]
[...] Pour les libéraux, la réglementation est une activité dangereuse qui s'oppose à l'intérêt du consommateur et à la productivité. Ainsi, la protection par l'Etat d'une entreprise peut conduire à des abus nuisibles à la concurrence et donc à l'intérêt du consommateur : selon le raisonnement libéral, la situation de non-concurrence incite à maintenir des prix élevés. La réglementation peut aussi provoquer des phénomènes de corruption, utilisée par les acteurs privés afin de contourner la réglementation : pour les libéraux, la réglementation risque toujours d'aboutir à des contournements. [...]
[...] Pour Keynes, la crise économique de 1929 trouve son origine dans le manque d'intervention des Etats. L'Etat doit donc gérer la conjoncture économique et en période de crise recourir à la dépense publique, même au risque du déficit budgétaire, afin de relancer consommation et production. Après la parenthèse du Front Populaire, la Libération voit l'arrivée au pouvoir d'hommes acquis à l'interventionnisme, dans une visée de justice sociale et de relèvement de la Nation. Ainsi, jusqu'au milieu des années soixante-dix environ durant ce que l'on a appelé les Trente Glorieuses, on observe un large consensus sur la nécessité d'un Etat régulateur, chargé d'encadrer l'initiative privée et de la pallier parfois afin d'assurer la cohésion sociale et le progrès économique. [...]
[...] Est-il possible alors de concilier réglementation économique et libéralisme ? Tout dépend de ce que l'on entend par réglementation : une réglementation minimale pour encadrer le marché et lui permettre de fonctionner ou une réglementation plus ambitieuse dans un but de justice sociale ? Quels sont les ajustements opérés par le modèle français face aux critiques libérales de la réglementation économique ? Ainsi, les critiques libérales de la réglementation économique conduisent à un changement de paradigme économique et à la remise en cause du modèle français qui entraîne des changements en matière d'institutions et de réglementation. [...]
[...] Face aux critiques dont il faisait l'objet, le modèle français de réglementation économique a évolué dans le sens d'une plus grande compatibilité avec le libéralisme économique ambiant. Cependant, la remise en cause de l'Etat n'a pas été totale et depuis la mise en évidence de certaines carences de la réglementation face à la mondialisation libérale, un plus large consensus se fait autour de la nécessité de réglementation. L'Etat français conserve ainsi plusieurs prérogatives : il reste le mieux à même de protéger le bon fonctionnement du marché, il demeure le garant de la cohésion sociale et garde des fonctions d'entrepreneur par le biais du secteur public. [...]
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