L'intitulé de ce cours peut surprendre, ce qui conduit à apporter, tout de suite, quelques précisions sur la réalité juridique qu'il désigne (d'autant plus qu'il n'existe pas de manuels ou d'ouvrages préexistants traitant des procédés juridiques d'intervention de l'administration).
L'ambition de ce cours est de montrer que les relations juridiques que l'administration française entretient avec la société connaissent, depuis quelques années, des mouvements d'une grande ampleur qui l'obligent à se redéployer et se restructurer. Mais ces évolutions indiquent aussi que, malgré les nombreuses critiques dont elle est l'objet au plan des idées (et qui confinent parfois à la caricature lorsqu'elles vont jusqu'à remettre en cause son existence même), l'administration conserve toute son utilité.
Seulement, l'importance des bouleversements qui affectent les modes d'organisation et d'action publics traditionnels, aussi bien en France qu'à l'étranger, justifie que l'on prenne la mesure de la véritable mutation de l'État qui se dessine sous nos yeux. Il y a une quarantaine d'années, on pouvait encore parler d'un État compact, dépendant d'un pouvoir politique exclusivement national et soumis au contrôle du seul juge administratif. Les enseignants qui ont connu cette époque se souviennent, avec un brin de nostalgie, de la simplicité, la cohérence et la robustesse du droit du système administratif et politique dont ils avaient à rendre compte.
Or, c'est toute la conception classique du rôle et de la place qu'occupe cet État dans la société qui est actuellement remise en cause par des facteurs divers et multiples. Dans un pays très décentralisé, voire en voie de régionalisation, régi de plus en plus par le droit communautaire et le droit international (compte tenu du processus de mondialisation en cours), et dans lequel la frontière entre droit public et droit privé devient de plus en plus perméable, l'État, s'il veut survivre, doit impérativement s'adapter et se réformer.
Le droit administratif, pris d'abord comme le système juridique que l'administration a pour habitude d'appliquer -même si, comme on sait, le droit privé tient une place de plus en plus importante dans les affaires publiques-, a beaucoup évolué ces dernières années. Traditionnellement, on définit le droit public comme un ensemble de règles juridiques (écrites ou jurisprudentielles) qui régit l'organisation et le fonctionnement des institutions publiques et qui encadre les relations qu'elles entretiennent avec les autres sujets de droit, qu'il s'agisse de personnes publiques ou privées, nationales ou étrangères, physiques ou morales. Comme la plupart des autres droits administratifs, le nôtre se déploie, principalement, dans trois directions (...)
[...] Il est ensuite question des compétences dévolues aux acteurs : quels actes juridiques les autorités publiques édictent-elles ? Dans quels domaines et selon quelles modalités juridiques interviennent-elles ? (théorie des actes unilatéraux ou contractuels et théorie des activités de police administrative ou de service public). Se pose, enfin, la question des structures et des organes qui composent l'administration : Existe-t-il des critères qui permettent de les définir juridiquement ? Comment les différencier par rapport aux autres organismes, et quelles relations juridiques entretiennent-ils entre eux ou avec leur environnement ? [...]
[...] Pour ce qui est du régime juridique de l'intervention publique, deux évolutions de grande ampleur concernent notre droit administratif : l'une touche plus précisément les notions qui définissent le champ d'intervention de l'État par rapport au marché. Sous cet aspect, on relève une évidente crise du concept de service public L'autre concerne les actes juridiques auxquels peut recourir l'administration pour satisfaire les différents besoins -ou intérêts- collectifs. De ce point de vue-là, il apparaît que la décision unilatérale se trouve parfois contestée en tant que méthode régalienne de l'action publique ; d'où la préférence accordée de nos jours aux démarches contractuelles, présentées, à plus ou moins juste titre, comme des indicateurs d'une modernisation de l'État La crise de la notion de service public Dans la conception juridique française, l'État est le dépositaire de la souveraineté nationale qui appartient au peuple et qu'il exerce par l'intermédiaire de ses représentants, conformément aux "règles du jeu" institutionnel fixées dans la Constitution. [...]
[...] En outre, ces évolutions institutionnelles ont beaucoup modifié l'appareil de contrôle de l'État sur les institutions locales, confiant aux tribunaux administratifs et aux chambres régionales des comptes le soin de vérifier le respect de la légalité (administrative et financière). L'unité du système normatif n'a pas été battue en brèche, bien que des concessions aient été faites au régionalisme, concessions qui ne font plus rimer unité avec uniformité mais avec diversité (institutionnelle), l'acceptation des différences n'étant plus considérée comme susceptible de porter atteinte au principe d'égalité. C'est dans un esprit d'ouverture républicaine que le législateur a récemment doté certaines collectivités territoriales d'un statut juridique d'autonomie parfois très poussée. [...]
[...] Mais cette constatation ne permet pas, à elle seule, de comprendre les arguments profonds qui ont justifié la volonté du Conseil d'État d'élaborer des règles particulières. D'autres explications méritent l'attention. Il faut déjà rappeler que le Conseil d'État a très vite joué le rôle d'une juridiction, alors qu'il n'en avait, à l'origine, ni le statut ni les attributions officielles. Ensuite, l'élaboration de règles juridiques différentes du droit commun tenait, pour beaucoup, à l'ambiguïté des liens qui unissaient cette création napoléonienne au pouvoir politique. [...]
[...] Identifié indépendamment de la nature de la structure qui l'assure et des règles de droit qui lui sont appliquées, le service public se définit désormais à partir d'un troisième élément : le but de satisfaction d'intérêt général (critère matériel). Or, il s'agit, par nature, du critère le moins objectif et le moins facile à cerner (ce qui explique pourquoi le juge doit très souvent raisonner au cas par cas). S'appuyant, de son côté, sur la logique du libre échange et du marché concurrentiel, le droit communautaire n'en contient pas moins certaines dispositions qui évoquent, notamment dans le Traité de Maastricht, une action de la Communauté "tendant au renforcement de la cohésion économique et sociale", ou des "actions spécifiques en vue de protéger la santé, la sécurité et les intérêts économiques (des consommateurs)", ou encore une contribution de celle-ci à la création et au développement de réseaux transeuropéens. [...]
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