La circulaire est un acte unilatéral destiné à être diffusé au sein de l'administration pour diriger et guider l'application d'un texte. On la trouve parfois rangée dans la catégorie des mesures d'ordre intérieur. Cette dénomination, quoique expressive, n'est pas très précise du point de vue juridique.
Parmi les actes à visée interne, la circulaire occupe une place particulière. Elle est caractérisée, outre son cadre d'édiction et d'application, par sa fonction. Située dans le sillage d'une norme juridique telle qu'une loi ou un acte administratif, la circulaire n'a pas pour objet d'affecter l'état du droit - elle n'est pas décisoire - mais seulement d'expliquer le sens des normes qu'il contient. Elle émane d'une autorité administrative non nécessairement dotée d'un pouvoir normatif en la matière, puisqu'il s'agit de décrire et non de prescrire, mais en charge du bon fonctionnement du service concerné par les textes visés.
Si elle s'adresse, par principe, aux agents de l'administration, la circulaire suscite aussi l'intérêt des administrés qui seront concernés indirectement par l'interprétation qu'elle donne des textes et souhaiteront, le cas échéant, en contester la légalité.
Le juge administratif saisi d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte non décisoire le considère comme irrecevable. Cette position théorique n'a pu être tenue vis-à-vis des circulaires en raison des inconvénients qu'elle comporte.
Il apparaît, tout d'abord, que refuser d'admettre la recevabilité d'un recours contre une circulaire en se fondant uniquement sur le fait qu'elle est donnée comme telle n'est pas satisfaisant. En effet, l'adoption d'une circulaire peut être, pour son auteur, l'occasion de produire en réalité une décision administrative dont on dira qu'elle fait grief. Le juge a perçu, dès le début du XXè siècle, la nécessité de s'interroger sur la portée juridique réelle de l'acte présenté comme une circulaire et de tirer les conséquences contentieuses d'une inexacte dénomination. Sa position sera arrêtée nettement en 1954 avec l'arrêt Institution Notre-Dame-du-Kreisker, Rec. p. 64) qui constitue un premier jalon dans l'analyse de cette jurisprudence.
Il semble possible, ensuite, de mettre en doute la pertinence d'une limitation de la recevabilité du recours au cas où la circulaire n'en est pas une. Cette approche fait trop peu de cas de la fonction assurée par ce type d'acte au sein de l'administration, de la manière dont elle est perçue par ses destinataires directs ou indirects. Le juge administratif n'est pas resté étranger à cette préoccupation comme en témoigne l'élaboration progressive d'un critère de recevabilité du recours propre à la circulaire et non calqué sur la distinction posée entre acte décisoire et non décisoire. L'arrêt Duvignères (CE, Sect., 18 déc. 2002, Duvignères, req. n°233618) constitue une étape significative de cette recherche.
La voie ainsi ouverte a, de surcroît, permis au juge de faire évoluer l'examen de la légalité qui suit l'admission du recours.
La jurisprudence administrative n'a pas épuisé toutes les interrogations quant aux critères et principes qui gouvernent le contentieux des circulaires. Mais un point d'équilibre a été trouvé entre le souhait des administrateurs de voir préserver la spécificité de celle-ci (I) et celui des requérants de pouvoir mettre en cause pleinement la légalité de cette "doctrine" interne de l'administration (II).
[...] Il semble possible, ensuite, de mettre en doute la pertinence d'une limitation de la recevabilité du recours au cas où la circulaire n'en est pas une. Cette approche fait trop peu de cas de la fonction assurée par ce type d'acte au sein de l'administration, de la manière dont elle est perçue par ses destinataires directs ou indirects. Le juge administratif n'est pas resté étranger à cette préoccupation comme en témoigne l'élaboration progressive d'un critère de recevabilité du recours propre à la circulaire et non calqué sur la distinction posée entre acte décisoire et non décisoire. [...]
[...] Le recours pour excès de pouvoir serait alors possible. Tout dépend la manière dont le juge appréciera ce critère de l'impérativité. Or, il faut reconnaître que celui-ci n'est pas nettement déterminé. Le commissaire du gouvernement Pascale Fombeur admet que "l'hésitation est permise" face à certaines circulaires mais propose des repères de cette impérativité. Présentent ce caractère les dispositions au moyen desquelles une autorité administrative vise "soit à créer des droits ou des obligations, soit à imposer une interprétation du droit applicable en vue de l'édiction de décisions". [...]
[...] Le fait que la circulaire n'affecte pas l'ordonnancement juridique n'est plus un obstacle à la recevabilité, le critère de l'impérativité se situant sur le terrain des effets pratiques et non des stricts effets juridiques. Le juge se donne ainsi la possibilité d'admettre plus largement le recours. Cette orientation jurisprudentielle procède d'une approche pragmatique de la gestion administrative et en particulier de ses modes d'interventions internes. Elle prend acte de l'autorité de fait des circulaires. Elles sont conçues pour guider l'application des textes législatifs et réglementaires et constituent bien la "doctrine" qui prévaut auprès des agents de l'administration mais aussi des administrés. Ces derniers ayant connaissance des circulaires publiées (cf. [...]
[...] Tricot -CE mai 1987, Ordre des avocats à la Cour de Paris, Rec. p Sect déc Duvignères, req. n°233618 Sect déc Mme Duvignères, req. n°233618, concl. P. Fombeur -article 7 de la loi 78-753 du 17 juillet 1978 -CE juin 2002, Villemain, req -CE févr SARL Auberge-ferme des Genets, req. [...]
[...] L'interprétation incorrecte du texte peut être assimilé à une violation de celui-ci ou à une erreur de droit. L'apport de la jurisprudence Duvignères se manifeste ici de façon très intéressante. En effet, le critère du caractère impératif des termes de la circulaire permettra au juge administratif de juger la légalité de circulaires qui n'auraient peut-être pas franchi le seuil du prétoire auparavant. Il pourra ainsi relever une erreur de droit qui lui est parvenue parce que rédigée en termes impératifs alors même qu'elle n'aurait pas justifié la recevabilité du recours sous l'empire de la jurisprudence antérieure. [...]
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