Résurgences de l'adage régalien selon lequel « Le Roi ne peut mal faire », les conditions d'engagement de la responsabilité des autorités publiques en France se sont longtemps caractérisées par le souci exacerbé de protection de ces dernières au détriment des intérêts des particuliers. Puisque « Le propre de la souveraineté est de s'imposer sans justification ni compensation » selon Edouard Laferrière, les dommages causés par les personnes publiques ne donnaient lieu au versement d'aucune indemnité mais étaient plutôt perçus comme la contrepartie inéluctable de la satisfaction de l'intérêt général.
Une telle consécration de toute immunité juridictionnelle et financière fut toutefois affectée pour la première fois, le 8 février 1873, par le célèbre arrêt Blanco du Tribunal des conflits initiant la reconnaissance jurisprudentielle de la responsabilité extracontractuelle étatique (en matière de responsabilité contractuelle, le principe était déjà posé) (...)
[...] Pour autant, il serait erroné de conclure à une généralisation de la responsabilité étatique dans la mesure où des «îlots d'irresponsabilité» perdurent toujours telle la naissance d'un enfant qui ne saurait donner lieu au versement de dommages-intérêts, malgré une stérilisation effectuée sur la mère par un praticien hospitalier (CE Ass juillet 1982, Mlle R.; confirmé par le Tribunal administratif de Strasbourg le 21 avril 1994, Mme M. Hospices civils de Colmar). La Cour de cassation s'est démarquée du Conseil d'Etat sur ce point en consacrant le principe de la «vie préjudiciable» (Cass. [...]
[...] À cette construction purement jurisprudentielle s'ajoutent des interventions législatives qui substituent la responsabilité de l'Etat à celle de ses agents dans des situations d'une particulière gravité. B - Une dynamique législative de responsabilisation Le législateur a mis en place des cas de substitution de responsabilité Il est aussi intervenu en matière de dommages sériels - Les cas de substitution de responsabilité. La loi du 5 avril 1937 substitue la responsabilité de l'Etat à celle de l'enseignant dans l'hypothèse de dommages causés à ou par un élève. [...]
[...] 1er juillet 1977, Commune de Coggia, et CE 22 juin 1984, Mme Nicolaï). Tout au plus exige-t-on que leur concours ait été justifié par une «urgente nécessité» (CE Sect octobre 1970, Gaillard) et qu'ils collaborent à un service public dont l'acception est largement entendue (CE Sect septembre 1970, Commune de Batz-sur-mer). Les collaborateurs d'un organisme privé gérant un service public à l'étranger (CE Sect janvier 1993, Mme Galtié) et les collaborateurs occasionnels du service public hospitalier (CE 31 mars 1999, Hospices civils de Lyon) bénéficient de ce régime. [...]
[...] La responsabilité de l'Etat s'étend par ailleurs aux dommages causés par le fonctionnement administratif du service pénitentiaire (faute simple: CE 23 mai 2003, Mme Chabba), au fonctionnement défectueux du service public de la justice administrative (CE Ass décembre 1978, Darmont) et de la justice judiciaire (article 11 loi du 5 juillet 1972) en cas de faute lourde ou de déni de justice. L'exigence de la faute lourde tend toutefois à disparaître et se cantonne désormais à quelques contentieux visant des activités administratives soit en relation directe avec la souveraineté nationale, soit d'une particulière difficulté ou technicité pour lesquelles le juge administratif maintient une «franchise de responsabilité» (activités de tutelle, activités de justice, certaines activités de police). Dans toutes ces situations envisagées, l'Etat doit assumer et supporter financièrement les dommages subis par des particuliers, alors même qu'il n'en est pas forcément l'auteur. [...]
[...] Cette tendance certaine se double en outre d'un assouplissement des conditions d'engagement de la responsabilité des autorités publiques. II - L'assouplissement des conditions d'engagement de la responsabilité administrative Le juge administratif effectue depuis quelques années un véritable aggiornamento en accueillant très largement les requêtes des victimes de comportements administratifs fautifs Au surplus, le Droit administratif est agité par le passage continu du système de responsabilité pour faute (lourde) au système de responsabilité sans faute assez symptomatique des efforts protecteurs déployés. [...]
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