[....] Auparavant, la jurisprudence fondée sur la garde admettait la responsabilité pour faute de la puissance publique (A). Puis, la jurisprudence de la Cour de cassation s'est assouplie (B).
A- L'ancienne jurisprudence fondée sur la garde: la responsabilité pour faute de la puissance publique
Avant 1991, lorsque la Cour de cassation avait à connaître d'un préjudice causé par une personne à risque placé dans un établissement privé en régime de liberté, elle appliquait un régime de responsabilité pour faute de la part de celui qui a la garde d'autrui. Il en résultait toutefois que si le malade mental était placé dans un établissement public, le juge administratif appliquait un régime de responsabilité sans faute. S'il était placé dans un établissement privé, le juge judiciaire appliquait un régime, moins favorable, de responsabilité pour faute.
Le but majeur de la jurisprudence étant semble-t-il de réparer au mieux, et de façon la plus simple possible, les dommages subis par une personne, même sans faute de la part de la puissance publique, un assouplissement de la notion de garde était devenue, alors, nécessaire.
La Cour de cassation opérera l'évolution, donnant ainsi l'exemple au Conseil d'Etat.
[...] Le Conseil d'Etat va passer à un régime de responsabilité sans faute, avec alors un fondement original : la garde (A). De plus, le Conseil d'Etat n'a pas choisi une substitution de responsabilité mais un cumul (B).
A- Le passage d'un régime de responsabilité sans faute avec un fondement original : la garde
L'évolution opérée par la Cour de cassation a donc, à son tour, inspiré au Conseil d'Etat une inflexion de sa jurisprudence. (...)
[...] Ainsi, par cet arrêt du 11 février 2005, non seulement le Conseil d'Etat va passer à un régime de responsabilité sans faute, mais avec un fondement original, la garde. Il affaire que la décision par laquelle le juge des enfants confie la garde d'un mineur, dans le cadre d'une mesure d'assistance éducative ( ) transfère à la personne qui en est chargée la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur C'est en raison des pouvoirs dont l'Etat se trouve investi lorsque le mineur a été confié à un service ou établissement qui relève de son autorité que sa responsabilité est engagée même sans faute, pour des dommages causés aux tiers par ce mineur Le parallèle s'impose avec la jurisprudence de la Cour de cassation: la décision du juge des enfants confiant à une personne physique ou morale la garde d'un mineur en danger, par application des articles 375 et suivants du code civil, transfère au gardien la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler le mode de vie du mineur et donc la responsabilité de ses actes, celle-ci n'étant pas fondée sur la responsabilité parentale mais sur la garde (Crim octobre 1996, Association le foyer de Saint Joseph). [...]
[...] Il paraît donc intéressant de se demander pourquoi et comment la responsabilité de la puissance publique, fondée sur la garde, s'est développée progressivement. L'acceptation de la notion de garde s'est, en effet, effectuée progressivement Peu à peu, le juge administratif a assouplie sa jurisprudence vis-à-vis de responsabilité de la puissance publique fondée sur la garde (II). La mise en œuvre progressive de la notion de garde Auparavant, la jurisprudence fondée sur la garde admettait la responsabilité pour faute de la puissance publique Puis, la jurisprudence de la Cour de cassation s'est assouplie L'ancienne jurisprudence fondée sur la garde: la responsabilité pour faute de la puissance publique Avant 1991, lorsque la Cour de cassation avait à connaître d'un préjudice causé par une personne à risque placé dans un établissement privé en régime de liberté, elle appliquait un régime de responsabilité pour faute de la part de celui qui a la garde d'autrui. [...]
[...] Le fondement jurisprudentiel de la responsabilité sans faute de l'administration est controversé. La présentation classique, binaire et non exempte de défauts, est critiquée. Selon certains auteurs, c'est en réalité l'anormalité du dommage subi par la victime qui fonde la responsabilité sans faute (P. Amselek). D'autres soulignent qu'il s'agit avant tout pour le juge administratif de satisfaire une exigence d'équité (Truchet, Braibant). Il faut à ce sujet remarquer que le point commun de ces régimes de responsabilité sans faute de l'administration est de n'être applicable que si le dommage allégué est à la fois anormal et spécial. [...]
[...] Dans l'affaire Blieck, un handicapé mental placé dans un centre d'aide par le travail avait mis le feu à une forêt. La responsabilité du centre est engagée sans qu'il soit nécessaire de prouver qu'il a commis une faute. Ce régime de responsabilité sans faute permet à la Cour de cassation de s'aligner sur la jurisprudence favorable du Conseil d'Etat. Le juge judiciaire a ensuite appliqué cette responsabilité sans faute dans tous les cas ou une personne a la garde d'autrui: associations sportives, mineurs sous l'autorité de leurs parents. [...]
[...] Le Conseil d'Etat rappelle alors, tout d'abord, que la responsabilité de la personne qui a obtenu la garde d'un enfant mineur délinquant peut être recherchée sans faute. Mais l'action ainsi ouverte ne fait pas obstacle à ce que soit également recherchée devant la juridiction administrative, la responsabilité de l'Etat en raison du risque spécial créé pour les tiers du fait de la mise en œuvre d'une des mesures de libertés surveillée prévue par l'ordonnance de 1945 (CE juillet 2007, Garde des Sceaux M. [...]
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