L'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, posant le principe du droit à un procès équitable, dispose également que le procès doit être tenu dans un délai raisonnable. Ainsi, le Conseil d'Etat, dans son arrêt Ville de Brest du 3 juillet 2009, réaffirme que cette disposition est un principe général du droit (règle de portée générale ayant le statut de norme) ; mais si cet article ne donne pas de délai concret, car l'appréciation doit se faire au cas par cas par le juge, il le pose comme une nécessité car il en va de l'intérêt des parties. En effet, il peut résulter de la lenteur des procédures juridictionnelles des préjudices financiers comme moraux subis par ces parties.
En l'espèce, il s'agit d'une personne publique, la ville de Brest, ayant conclu un contrat de marché public avec deux personnes privées le 7 octobre 1988, afin d'édifier un ouvrage public. Cependant, un glissement de terrain endommageant la construction de l'ouvrage public a conduit les entreprises privées à saisir le juge des référés le 5 juin 1989 d'une demande de désignation d'un expert chargé de déterminer la nature des travaux supplémentaires rendus nécessaires par ce glissement de terrain et d'évaluer les responsabilités dans sa survenance, expert qui a rendu son rapport le 15 août 1991 (...)
[...] En l'espèce, le Conseil d'Etat ne reconnait que le préjudice financier. Toutefois, il n'est fait mention ni dans l'article 6 de la CEDH, ni dans le principe général du droit, d'un délai concret, qui est laissé à la libre appréciation du juge Une nuance à ce principe apportée par le Conseil d'Etat : la non incidence d'un délai excessif sur l'issue du jugement Si le Conseil d'Etat reconnait les conséquences d'un délai de jugement excessif sur les intérêts des parties, il admet aussi que ce dernier n'a aucune incidence sur l'issue du jugement, ( . [...]
[...] Un principe général du droit établi l'article 6 de la CEDH repris par le Conseil d'Etat L'article 6 de la CEDH dispose que «Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable ( . Ainsi, cet article impose un délai raisonnable de procédure juridictionnelle, ce que le droit français a repris en tant que principe général du droit, c'est-à-dire une règle générale ayant une force normative. En l'espèce, le Conseil d'Etat réaffirme ce principe dans son premier considérant concernant la responsabilité, «Considérant qu'il résulte des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives que les justiciables ont droit à ce que les requêtes soient jugées dans un délai raisonnable». [...]
[...] Ainsi, le Conseil revoit à la baisse la demande de la ville de Brest en condamnant l'Etat à lui verser la somme de euros en réparation de son préjudice. Ceci illustre bien l'appréciation concreto» faite par le Conseil, dans la mesure où il prend en compte toutes les conditions de la procédure afin de rendre une décision équitable : s'il admet le préjudice subit, il modère la proportionnalité des réparations en tenant compte des avantages financiers tirés par la ville de Brest. [...]
[...] Les sociétés ont alors formé un recours en cassation devant le Conseil d'Etat le 12 février 2000 qui a cassé les précédentes décisions et condamné le 29 septembre 2004 la Ville de Brest à verser les sommes dues assorties des intérêts prévus par le code des marchés publics. Toutefois, la ville de Brest à son tour, saisi le Conseil d'Etat le 19 juillet 2006 en réparation du préjudice subit résultant de la durée excessive de la procédure engagée à son encontre, et par conséquent de la lenteur de jugement des juridictions administratives, mettant en cause la responsabilité de l'Etat en lui demandant directement des dommages et intérêts. Ainsi, la responsabilité de l'Etat peut-elle être engagée compte tenu de la durée excessive de la procédure administrative? [...]
[...] Ainsi, il résulte de l'appréciation effectuée par le Conseil d'Etat du cas d'espèce que le délai de la procédure engagée contre la Ville de Brest en règlement des impayés revêt un caractère excessif, dans la mesure où elle excède de trois ans le délai considéré raisonnable en l'espèce compte tenu des circonstances du litige. La reconnaissance de la durée excessive du délai ouvre la voie à l'admission, puis la réparation du préjudice subit par la ville de Brest, engageant alors la responsabilité de l'Etat. II. La reconnaissance par le Conseil d'Etat d'un préjudice, moral comme financier, résultant du dépassement du délai raisonnable engageant la responsabilité de l'Etat Le Conseil d'Etat admet en théorie deux types de préjudice, un préjudice financier et un préjudice moral Toutefois, il rejette en l'espèce le préjudice moral. A. [...]
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