Alain Ménémis, conseiller d'Etat disait récemment : "Le paysage des contentieux des contrats publics apparaît aujourd'hui foisonnant et, à biens des égards, en pleine évolution". On constate en effet ces derniers temps que les pouvoirs du juge des contrats administratifs se sont renforcés. En effet, depuis le début du XXIe siècle, le contentieux des contrats a fait l'objet de plusieurs décisions fondamentales de la part du juge administratif. Dans l'arrêt du 21 mars 2011, Commune de Béziers, le Conseil d'Etat continue d'instituer un nouveau recours de plein contentieux, et ce, dans la continuité des arrêts de juillet 2007, Société Tropic Travaux Signalisations et de 2009, Commune de Béziers.
L'arrêt de 2011, Commune de Béziers, concerne une convention établie entre les communes de Béziers et de Villeneuve-lès-Béziers dans le cadre d'un syndicat intercommunal à vocation multiple. Par cette convention, la ville de Villeneuve-lès-Béziers s'engageait à reverser à la commune de Béziers une fraction de la taxe professionnelle perçue. Or, elle décida de ne plus exécuter cette convention dès le 1er septembre 1996. La commune de Béziers saisit alors le tribunal administratif de Montpellier afin de faire annuler cette décision. Ce dernier rejette la requête. Un appel est formé devant la cour administrative d'appel de Marseille qui rejette de même le recours. Le Conseil d'Etat est alors saisi par la commune de Béziers.
L'intérêt de cette décision est de voir comment le Conseil d'Etat tente depuis quelques années d'améliorer l'office du juge des contrats, en particulier dans le contentieux de la résiliation. Ainsi, pour quelles raisons le Conseil d'Etat renforce-t-il les pouvoirs du juge du contrat administratif ? Si le juge du contrat a vu ses pouvoirs s'élargir (I), il semblerait que cela soit dû à une évolution de la perception de la relation entre l'administration et l'administré (II) (...)
[...] Désormais, le juge du contrat souhaite s'adapter aux situations. On a constaté par ailleurs cette évolution de la volonté du juge administratif dès lors qu'il a introduit dans la jurisprudence la possibilité de moduler les effets de ses décisions dans le temps ou l'espace. Cela démontre encore sa volonté de la prise en compte des situations subjectives. Ainsi, avec l'arrêt Titran[12] a-t-il permit de moduler dans le temps le prononcé d'une annulation, ou encore avec l'arrêt Association AC et autres[13] a-t-il reconnu qu'à titre exceptionnel, on pouvait moduler dans le temps les effets de l'annulation contentieuse d'un acte administratif. [...]
[...] Le Conseil d'Etat est alors saisi par la commune de Béziers. L'intérêt de cette décision est de voir comment le Conseil d'Etat tente depuis quelques années d'améliorer l'office du juge des contrats, en particulier dans le contentieux de la résiliation. Ainsi, pour quelles raisons le Conseil d'Etat renforce-t-il les pouvoirs du juge du contrat administratif ? Si le juge du contrat a vu ses pouvoirs s'élargir il semblerait que cela soit dû à une évolution de la perception de la relation entre l'administration et l'administré (II). [...]
[...] traduisant l'évolution de la relation entre administration et administrés Une perception renouvelée de l'administré en tant que partie au procès Le contentieux administratif tente actuellement, par des décisions et arrêts, de faire face à une demande nouvelle de la part des administrés ou encore des tiers au procès qui n'acceptent plus de voir leur situation subjective remise en cause par le juge administratif. En effet, cette population souhaite que le juge administratif prenne en compte leurs particularités, leurs droits subjectifs. Le juge administratif, qui à l'origine était un juge de la légalité est devenu progressivement un juge de la situation litigieuse. Désormais, il prend en compte les droits subjectifs des administrés. En effet, l'administré qui agit devant le juge administratif n'est plus perçu comme un défendeur du principe de légalité et ce, dans un but d'intérêt général. [...]
[...] Avec l'arrêt du Conseil d'Etat, Tropic, Travaux, Signalisation[9], on constate une évolution notable dans la prise en compte des intérêts des particuliers. En effet, on accepte l'idée qu'un administré bénéficie de droits alors même qu'il n'est qu'un tiers lésé. Cette jurisprudence est un avancement en ce qu'on prend en considération les intérêts d'un particulier qui est extérieur au contrat mais qui néanmoins estime avoir été lésé. Une évolution du juge du contrat administratif L'évolution de l'office du juge du contrat est mue par sa volonté de s'intéresser davantage aux conséquences de ses décisions sur les administrés. [...]
[...] Dans la décision du Conseil d'Etat, Commune de Béziers II, le juge administratif, après avoir constaté l'illégalité de la mesure de résiliation se voit donner la possibilité soit de faire droit à la reprise des relations contractuelles à compter d'une date donnée soit de rejeter le recours si les vices constatés sont seulement susceptibles de permettre une indemnité. Dans le premier cas, la reprise des relations contractuelles sera alors ordonnée et assortie d'une indemnité en réparation du préjudice causé entre la date de la résiliation du contrat et la date de la reprise. Pour le second cas, comme auparavant, il faudra saisir le juge du contrat d'une requête en indemnité. Finalement, avec sa décision Commune de Béziers II, le Conseil d'Etat poursuit sa démarche de remodelage de l'office du juge des contrats. [...]
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