Compétences locales, collectivité-chef de file, loi du 4 février 1995, aménagement du territoire, Conseil constitutionnel, article 72 de la Constitution, loi du 2 janvier 2002, arbitrage
L'article 72 alinéa 5 prévoit que "lorsque l'exercice d'une compétence nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales, la loi peut autoriser l'une d'entre elles ou un de leurs groupements à organiser les modalités de leur action commune". Cette disposition consacre la notion de collectivité chef de file notamment à l'oeuvre dans la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement du territoire (art. 65-II), mais invalidée à l'époque par le Conseil constitutionnel (Conseil constitutionnel, n° 94-358 DC, 26 janvier 1995). Pour autant, l'inscription de la notion de collectivité-chef de file dans la Constitution ne change pas grand-chose à la teneur du débat.
[...] D'abord, la division des compétences n'est jamais totalement étanche : où s'arrête l'action sociale ? Où commence la politique sanitaire ? De sorte que les autorités locales peuvent solliciter leurs compétences légales pour mener des actions parallèles à celles d'autres collectivités. Si le partage des compétences n'est pas dans son principe condamnable, la pratique locale a montré qu'il pouvait être la cause de sérieux dysfonctionnements. Or c'est précisément l'objet de la notion de collectivité-chef de file que de remédier au brouillage des compétences en permettant à une collectivité d'orienter l'action de l'ensemble des collectivités concernées par l'exercice d'une même compétence. [...]
[...] La détermination de la collectivité-chef de file ne devrait pas poser trop de problèmes. La Constitution laisse un large éventail au législateur : il s'agira surtout de savoir si la formule l'une d'entre elles ou un de leurs groupements exclut ou non les formes de droit privé (SEML, association) voire GIP ou GEIE. Pour le reste, plusieurs options restent toutefois ouvertes au législateur. Dans ces conditions, il est permis de se demander si le texte constitutionnel ne conduira pas à une vision kaléidoscopique de la décentralisation qui, comme l'évoquait en 1996 le doyen Yves Madiot verrait se multiplier les collectivités-chefs de file en fonction de la nature des compétences partagées , empêchant de la sorte de constituer face à l'État des pouvoirs locaux suffisamment puissants et maintenant dès lors, voire renforçant, les pouvoirs du centre face à la périphérie. [...]
[...] Pour autant, l'inscription de la notion de collectivité-chef de file dans la Constitution ne change pas grand-chose à la teneur du débat. Les parlementaires ont en effet cru bon de préciser en tête de ce même alinéa 5 qu' aucune collectivité locale ne peut exercer une tutelle sur une autre . Certes, l'expérience espagnole de régionalisation montre que l'introduction d'une telle interdiction dans le texte constitutionnel n'est pas totalement inutile. Mais c'est la conjugaison de cette disposition avec la notion de collectivité-chef de file qui peut s'avérer problématique dès lors qu'une telle désignation ne manquera pas de renforcer des rapports de dépendance sinon en droit du moins en fait. [...]
[...] Mais la conclusion d'un contrat ne résoudra pas toutes les difficultés. Il est à craindre que la pratique du chef de file vienne renforcer des tutelles indirectes. [...]
[...] Si l'idée de spécialisation des compétences autour de l'affirmation de vocation dominante pour chaque échelon reste un objectif, la Constitution prend acte de ce que la plupart des domaines de l'action locale donneront lieu, même dans le cadre des nouveaux transferts, à l'exercice de compétences partagées. Plusieurs situations peuvent conduire en effet à un partage des responsabilités administratives au plan local. On sait que les textes de répartition des compétences ont eux-mêmes contribué à cet éclatement des responsabilités. Et même si les nouveaux transferts de compétence devraient s'affranchir de ces travers, d'autres facteurs contribueront à agir en sens inverse. [...]
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