L'entrée en vigueur récente d'une loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public au nom de la laïcité et de l'ordre public, accompagnée du débat qu'elle a suscitée, n'est pas sans rappeler à quel point il devient courant de faire d'un cas d'espèce une généralité...
Le même débat avait déchaîné les passions au début des années 1990 avec le port du foulard islamique par des collégiennes.
En effet, suite à un cas, précis, où trois élèves du collège de Creil avaient porté le "foulard islamique", au sein du collège, le ministre de l'éducation nationale avait jugé utile de prendre position de façon nationale sur ce sujet. Il a demandé l'avis du Conseil d'Etat à propos d'une loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 qui, notamment, posait clairement le principe de neutralité et de laïcité que les élèves des collèges et lycées doivent respecter. Ce principe, commun au fonctionnement du service public, coexiste avec d'autres, tels le principe de continuité du service public ou celui d'égalité.
Le principe de neutralité est l'interdiction de fonder les décisions du service public sur l'appartenance politique, philosophique ou encore religieuse. De ce principe ressort l'élément de "laïcité" qui semblait ici menacé. La laïcité est l'indépendance eu égard des caractères religieux dont doit faire part le service public.
La loi de 1989 avait l'ambition de faire savoir si le port de signe d'appartenance à une communauté religieuse dans l'enseignement est ou non compatible avec le principe de laïcité.
Dans son avis du 27 novembre 1989, le Conseil d'Etat a estimé que le port de signes par lesquels des élèves expriment leurs convictions religieuses n'est pas incompatible avec le principe de laïcité.
Il a néanmoins posé des limites (la provocation de ces signes religieux, la propagande, l'atteinte à l'ordre public...) et a estimé qu'il appartenait aux établissements scolaires de décider des modalités d'application de ces principes, par une réglementation qui leur sera propre.
Ce choix est essentiel compte-tenu du contexte dans lequel la loi a vu le jour, ce que nous verrons plus tard (...)
[...] Les nouvelles limites Une loi du 15 mars 2004 au nom du principe de laïcité, limité le port de signes religieux dans le secondaire aux signes ne manifestant pas ostensiblement une appartenance religieuse. Autrement dit, le port du voile a implicitement été interdit, tout comme celui du keshi sikh (Conseil d'Etat décembre 2007). Le Conseil d'Etat a donc revu sa position suite à cette loi, devant différencier désormais les signes discrets de ceux qui le sont moins. L'autorisation de porter des signes discrets apparaît désormais dans ses arrêts. C'est beaucoup plus une stigmatisation des signes religieux qui a découlé de l'application de cette loi et on ne peut que le déplorer . [...]
[...] Une appréciation de la licéité du port d'un signe religieux au cas par cas Le principe du port de signes religieux est admis par le Conseil d'Etat mais il y a des exceptions. En l'espèce, le jugement du Tribunal administratif de Paris a été annulé, car il n'avait pas examiné précisément le fait d'espèce. En effet, le Conseil d'Etat relève que dans cette situation précise, les jeunes filles n'ont pas porté un voile à caractère religieux dans un but de provocation, de propagande, sous une forme d'atteinte à la liberté ou à la sécurité mais dans un seul sentiment d'expression de leurs convictions. [...]
[...] Conseil d'Etat novembre 1992 M. Kherouaa L'entrée en vigueur récente d'une loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public au nom de la laïcité et de l'ordre public, accompagnée du débat qu'elle a suscitée, n'est pas sans rappeler à quel point il devient courant de faire d'un cas d'espèce une généralité . Le même débat avait déchaîné les passions au début des années 1990 avec le port du foulard islamique par des collégiennes. En effet, suite à un cas, précis, où trois élèves du collège de Creil avaient porté le foulard islamique au sein du collège, le ministre de l'éducation nationale avait jugé utile de prendre position de façon nationale sur ce sujet. [...]
[...] C'est sur la base de ce règlement que le Conseil de discipline du collège a décidé, le 16 décembre 1990, d'exclure définitivement des collégiennes portant le foulard en salles de classe et pendant les cours de sport. Il s'agissait de Mlles. S. Kherouaa, H. et A. Balo. Le recteur de l'académie de Créteil a confirmé cette décision le 11 mars 1991. Les parents des jeunes filles ont demandé l'annulation de la décision du Conseil d'administration, modifiant le règlement intérieur et celle du recteur confirmant la décision du Conseil de discipline. [...]
[...] En effet, il a appliqué les préconisations apparaissant dans son avis rendu le 27 novembre 1989, en estimant que le port du voile n'était pas contraire au principe de laïcité. Ce principe est applicable à l'ensemble du service public et il faut s'en réjouir ; ainsi, porter le voile en allant à la mairie reste, à ce jour, légal . La seule limite au port du voile est l'acte de pression ou de provocation qu'il susciterait. Mais cette limite s'apprécie selon chaque espèce, assurant le principe de laïcité à tous les élèves et par la même, apaisant les tensions de l'époque. [...]
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