Le recours pour excès de pouvoir (REP) est classiquement défini comme un recours objectif de légalité d'un acte administratif unilatéral décisoire. Le juge administratif ne se voit alors conférer que le pouvoir d'annuler ou de ne pas annuler l'acte, en fonction de la pertinence des moyens soulevés. Mais le Conseil d'État tend dans le cadre de ce recours à accroître les pouvoirs du juge administratif, comme c'est le cas dans cet arrêt Vassilikiotis.
La loi du 13 juillet 2002 pose un principe d'habilitation spéciale pour être autorisé à conduire des visites commentées dans les musées et les monuments historiques, habilitation mise en place par voie réglementaire. Le décret du 15 juin 1994 précise ainsi les personnes devront être titulaires d'une « carte professionnelle » justifiant d'un des titres ou diplômes français énumérés dans le décret. Et pour les ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne (CE, devenue depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne l'Union européenne), ainsi que le modèle de la carte, ce décret renvoie à un arrêté ministériel des ministres chargés du tourisme et de la culture. Cet arrêté, qui est un acte administratif unilatéral réglementaire, intervient le 15 avril 1999, et donne la liste des diplômes français visés dans le décret précédant.
Le 17 août 1999, Monsieur Vassilikiotis, citoyen grec résidant en Grèce, dépose un REP contre cet arrêté interministériel au greffe du tribunal administratif de Paris, demandant son annulation au motif que l'arrêté, en limitant les diplômes ouvrant droit à la délivrance d'une « cartes professionnelles » aux diplômes français uniquement. En effet, le requérant affirme que cette limitation à des diplômes français est contraire aux dispositions des articles 49 et 50 du traité de Rome de 1957 instituant la Communauté européenne, qui prévoient que les autorités administratives saisies d'une demande d'autorisation professionnelle d'un ressortissant de la CE doivent prendre en compte les diplômes obtenus dans le pays d'origine. En outre, cette limitation est contraire aux directives 89/48/CEE et 92/51/CEE relatives à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur, et qui « imposent aux autorités nationales de prendre des mesures permettant d'assurer la prise en compte de certaines formations acquises dans d'autres États membres » (...)
[...] En cela cet arrêt est prémonitoire de l'arrêt de 2004 Association AC Dans lequel le Conseil d'État va jusqu'à retarder l'effet de l'annulation dans le temps, qui plus est en conservant les situations définitives. [...]
[...] I L'annulation de l'arrêté en tant qu'il ne tient pas compte des dispositions communautaires. Le Conseil d'État rappelle les dispositions du traité de la communauté européenne qui imposent une des diplômes obtenus dans les États de la communauté pour pouvoir exercer des activités de service réglementés Et puisque l'arrêté interministériel du 15 avril 1999 ne prend pas en compte cette réglementation, le Conseil l'annule en tant qu'il ne prévoit pas les mesures prescrites par le droit communautaire de prise en compte des diplômes étrangers A L'obligation de prise en compte des formations étrangères posées par le traité CE Le traité de Rome de 1957 prévoit dans ses articles 49 et 50 une obligation de prise en compte des diplômes obtenus au sein de la communauté pour les autorisations d'exercer des activités soumises à autorisation. [...]
[...] Commentaire de l'arrêt CE Ass 29 juin 2001, Vassilikiotis Le recours pour excès de pouvoir (REP) est classiquement défini comme un recours objectif de légalité d'un acte administratif unilatéral décisoire. Le juge administratif ne se voit alors conférer que le pouvoir d'annuler ou de ne pas annuler l'acte, en fonction de la pertinence des moyens soulevés. Mais le Conseil d'État tend dans le cadre de ce recours à accroître les pouvoirs du juge administratif, comme c'est le cas dans cet arrêt Vassilikiotis. [...]
[...] Or il entre en vigueur un jour franc après sa publication, soit le 17 avril. Ainsi la requête enregistrée le 17 août 1999, soit quatre mois après l'entrée en vigueur, est recevable. Ce premier point ne sera d'ailleurs pas évoqué plus dans les développements suivant, le problème de droit nous intéressant ici étant tout autre. Le Conseil d'État se prononce ensuite sur la légalité de l'arrêté interministériel. Après avoir rappelé les articles 49 et 50 du traité CE de 1957 qui prévoient une prise en considération des formations acquises à l'étranger pour obtenir une autorisation exigée pour l'exercice d'une activité professionnelle, ainsi que les deux directives communautaires 89/48/CEE et 92/51/CEE relatives à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur, le Conseil d'État constate que les décrets du 15 juin 1994 et du 15 avril 1999 donnent compétence au ministre de l'intérieur et au ministre du tourisme d'adopter les mesures nécessaires. [...]
[...] La première question traitée par le Conseil d'État concerne la fin de non recevoir du ministre de l'intérieur, basé sur le fait que la requête aurait été déposée tardivement. Mais le Conseil d'État écarte cet argument. En effet, M. Vassilikiotis réside à l'étranger, il bénéficie donc d'un délai de recours de quatre mois conformément à l'article R 421-7 du code de justice administrative (CJA). L'arrêté attaqué date du 15 avril 1999, et est publié au journal officiel le 16 avril. [...]
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