La responsabilité de la puissance publique à raison de ses activités médicales et hospitalières a évolué, comme l'ensemble du contentieux de la responsabilité, vers une meilleure prise en compte des aspirations des administrés, et vers une plus large prise en charge des victimes.
Madame V., à l'occasion d'une césarienne pratiquée le 9 mai 1979 sous anesthésie péridurale, avait été victime d'une succession d'erreurs médicales et d'imprudences de la part des divers intervenants médicaux, comprenant notamment l'administration de produits contre-indiqués (...)
[...] Il étendra même sa jurisprudence aux services de transfusion sanguine (Conseil d'Etat, avril 1993 : ces services étant, depuis 1995, passés sous le régime de la responsabilité sans faute) et aux services d'intervention d'urgence (Conseil d‘Etat, «Theux» juin 1997). Dans ses conclusions sur l'affaire Theux, le commissaire du gouvernement Stahl justifiait ainsi le renoncement à l'exigence de la faute lourde : s'agit de faire disparaître la qualification quasi tautologique de faute lourde, qui intègre la difficulté intrinsèque de l'action administrative à un double degré : par principe dans la définition du régime de responsabilité, puis ensuite au cas d'espèce lorsqu'on recherche si une faute lourde a été commise. [...]
[...] Dans cette décision de 1988, le Conseil d'Etat établit que la faute lourde n'est pas avérée en l'espèce avant de déduire, de la simple disproportion entre l'état du patient avant l'intervention et la nature de l'acte médical d'une part, et l'état du patient après l'intervention d'autre part, la présomption d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service. On quittait donc l'acte médical et la faute lourde pour rejoindre le service, et donc la faute simple. En l'espèce, les faits ne se prêtaient pas à la caractérisation d'une faute lourde. De nombreuses fautes avaient certes été commises, mais aucune d'entre elles prise isolément ne pouvait être qualifiée de faute lourde. En se référant à la jurisprudence classique, le Conseil d'Etat aurait dû rejeter la responsabilité de la personne publique. [...]
[...] Dans son texte du 4 mars 2002, le législateur a rappelé le caractère nécessairement fautif de cette responsabilité, qu'il limite à la faute caractérisée, qui évoque une faute intense et évidente. Cette dernière notion a été mise en œuvre par le Conseil d'Etat dans l'arrêt et Madame Maurice» du 19 février 2003, dans lequel il considère qu'est constitutive d'une faute caractérisée l'inversion des résultats d'examen de deux patientes, ayant eu pour conséquence de priver la requérante de la possibilité de recourir à l'interruption volontaire de grossesse. [...]
[...] L'arrêt du 10 avril 1992 s'inscrit également dans une évolution générale de la jurisprudence, qui tend à admettre de plus en plus fréquemment qu'une faute simple suffise à engager la responsabilité des personnes publiques. C'est ainsi que le Conseil d'État réserve désormais l'exigence d'une faute lourde, en matière fiscale, aux opérations d'établissement et de recouvrement de l'impôt qui comportent des difficultés particulières (Conseil d'Etat, «Bourgeois» juillet 1990). L'exigence de la faute lourde a été abandonnée ou limitée dans d'autres domaines, comme les services de tutelle ou de contrôle (Conseil d'Etat, «Caisse départementale d'assurances sociales de Meurthe-et-Moselle» mars 1946), les services pénitentiaires, et les établissements psychiatriques recourant à des méthodes thérapeutiques créant un risque spécial pour les tiers. [...]
[...] «constituent une faute médicale de nature à engager la responsabilité de l'hôpital») ne font pas référence à la faute simple. Le commissaire du gouvernement Legal estimait dans ses conclusions sur l'affaire que l'abandon de la faute lourde pour les dommages résultant d'actes médicaux n'aurait pas pour effet «d'assimiler la faute médicale à d'autres fautes Il s'agit d'une faute spécifique régie par les lois particulières de la discipline en cause». Le juge adapte en effet son raisonnement aux particularités de chaque type d'acte, afin de faciliter l'indemnisation des victimes. [...]
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