Droit des collectivités locales, spécificités des territoires, modernisation de l'Etat, décentralisation, article 72 de la Constitution, Conseil constitutionnel, Conseil d'Etat, article 21 de la Constitution, libertés publiques, expérimentation, statut de la Corse
Le recours à l'expérimentation est présenté comme une méthode irremplaçable de modernisation de l'État. L'expérimentation est ainsi aujourd'hui devenue un mode de gouvernement assez répandu. De nombreuses lois récentes ont en effet offert la possibilité à des autorités décentralisées de déroger par voie d'expérimentation au droit en vigueur. L'essentiel de ces textes portait comme on l'a vu sur la répartition matérielle des compétences. Mais ce type d'expérimentations s'est toujours réalisé dans le cadre des lois et des textes réglementaires qui enserrent l'exercice des compétences administratives.
[...] En second lieu, l'objet de l'expérimentation ne peut être que limité : il ne peut porter que sur les dispositions qui régissent l'exercice des compétences locales. Le pouvoir d'adaptation offert aux autorités locales devrait concerner en priorité les textes de répartition des compétences. C'est d'ailleurs à ce titre que l'expérimentation est expressément évoquée par les travaux parlementaires. Exemple : une région pourrait se voir confier la gestion des collèges. Mais doit-on considérer que les dispositions qui régissent l'exercice de leurs compétences s'entendent plus largement des dispositions du Code général des collectivités territoriales qui intéressent l'organisation des collectivités locales, mais aussi leurs ressources. [...]
[...] Un droit à demander une expérimentation davantage qu'un droit à l'expérimentation Si le juge constitutionnel, rejoignant sur ce point le Conseil d'État, a admis le principe de règles à caractère expérimental, il s'est efforcé d'en limiter la portée : exigeant de l'expérimentation qu'elle soit limitée dans le temps, qu'elle porte sur un objet précis et du législateur qu'il précise les conditions et les procédures d'évaluation conduisant au maintien, à la modification, à la généralisation ou à l'abandon de l'expérience. En premier lieu, l'article 72 prévoit que la loi ne peut porter atteinte aux conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnel garanti. À dire vrai, la dissociation n'est guère heureuse : on ne connaît guère de libertés publiques qui n'aient été constitutionnalisées. Mais là n'est pas l'essentiel. [...]
[...] C'est dans un premier temps, ce type d'expérimentation normative que tend à généraliser la loi constitutionnelle à l'ensemble des collectivités territoriales. En l'espèce, le Conseil constitutionnel n'oppose qu'une seule réserve : le pouvoir ainsi accordé à l'autorité locale ne doit porter atteinte ni à la compétence réglementaire générale du Premier ministre ni aux conditions essentielles d'exercice des libertés publiques ; ce qui sera le cas chaque fois que la mise en œuvre des garanties attachées à l'exercice d'une liberté pourrait ne pas être les mêmes sur l'ensemble de la République. [...]
[...] Le raisonnement du Conseil constitutionnel s'appuie ici sur une interprétation restrictive du principe de libre administration. Ignorant la problématique de l'expérimentation, dont le législateur avait pourtant cru pouvoir se prévaloir en se fondant sur la jurisprudence de 1993, le juge constitutionnel assimile en l'espèce l'habilitation à déroger à la loi à une délégation de pouvoir législatif, objectant alors que la seule procédure prévue en ce sens par la Constitution était celle de l'article 38 évidemment inapplicable aux collectivités locales. De la sorte, le Conseil constitutionnel oppose un refus de principe à l'idée même d'adaptation des lois nationales. [...]
[...] L'adaptation des lois qui régissent le statut des collectivités locales pourrait encore permettre aux collectivités locales qui en feraient la demande de confier l'exercice d'une ou de plusieurs de leurs compétences légales à une autre collectivité. De telles expérimentations pourraient servir alors de tremplin à une modification à terme de la carte administrative par fusion ou absorption des collectivités partenaires. Au titre d'une réorganisation des compétences territoriales, les structures intercommunales -spécialement visés par la Constitution à la suite d'un amendement parlementaire- pourraient encore se voir investies de compétences non prévues par la loi. [...]
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