Si le juge administratif est le juge de l'administration, sa fonction devrait donc se limiter à juger l'activité administrative, et notamment son activité à produire des normes juridiques. Soumis pour des raisons historiques au dogme révolutionnaire de la loi expression de la volonté générale, le juge administratif a très longtemps fait preuve envers celle-ci d'une déférence presque servile. Certes, il pourrait être avancé qu'en tant que juge du respect de la loi par les actes administratifs, le juge administratif est souvent amené à interpréter celle-ci, et à cette occasion à lui donner peut-être un sens qui n'était pas celui voulu par le législateur (CE, ass., 17 fevr. 1950, "Ministre de l'agriculture contre Dame Lamotte").
[...] Cette position du juge constitutionnel s'explique en raison de la particularité de son intervention, a priori et absolue, alors que la supériorité du traité est conditionnée par sa ratification régulière et son application par l'autre partie. Le Conseil constitutionnel a donc implicitement mais nécessairement invité les juridictions administratives et judiciaires à assurer l'application de cet article 55, c'est-à-dire à se faire les garants de la supériorité des traités sur les lois. Répondant à cet appel, la Cour de cassation acceptait d'écarter l'application des dispositions de la loi nationale pour faire prévaloir les stipulations d'un traité (Cass., ch . mixte mai 1975, Sté des cafés Jacques Vabre AJDA concl. Touffait). [...]
[...] Ce n'est qu'avec l'arrêt Nicolo ass oct : GAJA, n°102) que le Conseil d'État va opérer un revirement de jurisprudence afin de donner sa pleine signification à l'article 55 de la Constitution, en instaurant un véritable contrôle de la conventionnalité internationale des lois Ainsi, la loi est contrôlée par le juge administratif qui s'autorise donc à vérifier la conformité de cette dernière à la norme internationale. Si le juge limite son contrôle, comme l'y invite la lettre de l'article 55 de la Constitution, aux traités et accords, et ne reconnaît donc aucune valeur supra-législative à la coutume internationale ass juin 1996, Aquarone : Rec. CE, p.206, concl. Bachelier : AJDA 1997, p.630, chron. Chavaux et Giradot ; RFD adm p.1068, concl. ; RGDIP 1997, p.1053, note Alland ; JCP G. 1997.II.22945, note Teboul ; L. [...]
[...] Le juge administratif est-il juge de la loi ? La loi du 24 mai 1872, qui instituait définitivement la justice déléguée, précisait dans son article 9 : La Conseil d'Etat statue souverainement sur les recours en matière contentieuse administrative, et sur les demandes en annulation pour excès de pouvoir formées contre les actes des diverses autorités administratives.» Depuis lors, sont effectivement séparées les administrations actives et contentieuses, l'activité de la première étant soumise au contrôle de la seconde. Si le juge administratif est le juge de l'administration, sa fonction devrait donc se limiter à juger l'activité administrative, et notamment son activité à produire des normes juridiques. [...]
[...] Letourneur, note Waline), ce respect s'entendait dans l'hypothèse où aucune loi ne s'intercalait entre l'acte administratif dont il avait à apprécier la validité et le traité, ou si cette loi était antérieure au traité international. Dans le cas où la loi était postérieure au traité, le juge administratif faisait prévaloir la loi sect. 1er mars 1968, Syndicat général des fabricants de semoule de France D note M.L.). Pour le juge, admettre l'inverse signifiait qu'il s'autorisait à exercer un contrôle sur la loi, ce qu'il va refuser, l'invitation faite par le Conseil constitutionnel en 1975, à laquelle avait immédiatement répondu la Cour de cassation. [...]
[...] Ensuite, et peut-être surtout, le juge administratif n'hésite plus à contrôler la constitutionnalité des traités. Ainsi, dès 1996, le Conseil d'Etat a fait prévaloir sur le traité la norme constitutionnelle (CE ass juill Koné). Le juge a d'ailleurs récemment confirmé sa jurisprudence, puisque ont été opposées aux normes internationales dont les requérant demandaient l'application par le Conseil d'Etat, les dispositions de l'article 76 de la Constitution (CE ass oct Sarran, Levacher et autres ; confirmé par Cass. Ass. Plén juin 2000, Mlle Fraisse ; D.2000.IR.180). [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture