Tribunal des conflits, 7 avril 2014 - Qui de la juridiction judiciaire ou de la juridiction administrative est apte à intervenir ?

Extraits

[...] En d'autres termes, les clauses exorbitantes du droit commun sont les clauses qui diffèrent par leur nature de celles qui peuvent être stipulées dans un contrat analogue de droit privé. Dans cette affaire, le Tribunal va juger que le contrat litigieux ne comporte aucune clause exorbitante du droit commun On peut déduire rationnellement de tout cela que nous ne sommes pas en présence d'un contrat administratif. Aucun des deux critères permettant de caractériser le contrat administratif n'est présent en l'espèce. [...]

[...] Par ricochet, l'ensemble des contrats entrant dans le Code des marchés publics sont des contrats administratifs. Pour le Tribunal des conflits, prouver que le contrat passé par l'office du tourisme est un marché public, reviendrait à promouvoir le fait que ce contrat est bel et bien un contrat administratif et par conséquent, que ce n'est pas un contrat de droit privé. Or, le Tribunal va juger qu'« eu égard à son objet et à son équilibre financier, un tel contrat ne constitue pas un marché public En outre, il n'est pas un contrat administratif par détermination de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier Par cette décision, le juge estime que le contrat conclu qui avait pour objet l'édition de guides touristiques et qui permettait à la société éditrice de profiter des bienfaits économiques liés aux bénéfices publicitaires n'est pas un marché public. [...]

[...] Ce critère fut posé par un arrêt très ancien du Conseil d'État, du 31 juillet 1912, Société des granits porphyroïdes des Vosges Cette jurisprudence se déroule sur la commune de Lille. La ville envisage de repaver les ruelles du quartier du Vieux Lille. Elle conclut pour se faire, un contrat de fourniture de pavés avec la société des granits porphyroïdes des Vosges. Le juge va considérer que ce contrat avait pour objet la fourniture de pavés selon les règles et les conditions des contrats intervenus entre personnes publiques. [...]

[...] Il s'agit de se demander qui de la juridiction judiciaire ou de la juridiction administrative est apte à intervenir dans cette affaire. La position du Tribunal des conflits est parfaitement limpide et ne donne pas lieu à diverses interprétations. Il va estimer que le contrat ici présent constitue une convention de droit privé, dont le contentieux relève de la compétence de la juridiction judiciaire Par conséquent, la juridiction administrative n'est nullement compétente pour répondre de cette affaire. Le juge du Tribunal des conflits va tout naturellement déterminer que le préfet des Yvelines n'était pas légitime dans sa démarche d'élévation du conflit. [...]

[...] Trois critères de distinction furent mis en lumière par cet arrêt : le but recherché par l'activité, l'origine des ressources et les modalités d'organisation et de fonctionnement du service public en cause. Si l'activité a un but commercial et lucratif et si les ressources proviennent de redevances payées par les usagers, alors il y a de fortes chances que l'activité concernée soit un service public industriel et commercial. Dans la majorité des cas, ce sont des règles de droit privé qui s'appliquent à la gestion des services publics industriels et commerciaux. [...]