Tribunal des conflits 4 novembre 2019, arrêt M. Hassou B, règles traditionnelles, attribution de la compétence, indemnisation, préjudice, ouvrage public, arrêt Blanco, jurisprudence, loi du 20 avril 2005, juge judiciaire, commentaire d'arrêt
Le 16 septembre 2014, l'employé d'une compagnie aérienne a fait une chute en s'asseyant sur une chaise d'une banque d'enregistrement de l'aéroport d'Orly. L'employé a assigné la société Aéroport de Paris et son assureur devant le TGI de Paris (après la réforme de 2020 du tribunal judiciaire) en vue d'obtenir l'indemnisation du préjudice subi à la suite de cet accident. Le juge judiciaire a décliné sa compétence. Par conséquent, le requérant saisit pour la même raison le tribunal administratif de Melun. Ce dernier a renvoyé l'affaire au Tribunal des conflits.
La société Aéroport de Paris a déposé un mémoire devant les juges du tribunal administratif, tendant à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente, par les motifs que le bien litigieux est un ouvrage public et que la victime était un tiers au service public industriel et commercial assuré par la société Aéroports de Paris au bénéfice de la compagnie aérienne qui l'emploie.
Dans cette affaire, il appartenait au Tribunal des conflits de déterminer si la réparation des dommages causés à un tiers par le fonctionnement d'une société anonyme étant chargée de l'exécution de missions de service public relève de la compétence du juge judiciaire ou c'est plutôt le juge administratif qui devient compétent si le dommage trouve sa cause dans l'existence d'un ouvrage public.
[...] Dans l'espèce de l'affaire Hassou, l'employé soutient qu'une indemnité en réparation des dommages résultant de l'accident qu'il a subi lui est due. En appliquant le raisonnement de l'arrêt Blanco : si le litige se rapporte à l'activité d'un service public, cela entraine la compétence du juge administratif et l'application du droit public, la juridiction administrative est évidemment compétente. Or, ce raisonnement maintenu jusqu'à l'étape actuelle a subi différentes bifurcations. À partir de la jurisprudence du Tribunal des conflits du 22 janvier 1921, Sté commerciale de l'Ouest africain, la notion de service public n'était pas plus jugée comme le seul critère de répartition des compétences entre les deux ordres de juridictions, à celle-ci s'ajoute la nature de l'activité de personne morale ou privée que les litiges nés du fonctionnement d'un service public industriel et commercial devaient en principe relever de la juridiction judiciaire . [...]
[...] - Quelle est la position des règles traditionnelles dans l'attribution de la compétence ? Considérant que, sauf dispositions législatives contraires, la responsabilité qui peut incomber à l'État ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative ; que cette compétence, qui découle du principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires posé par l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et par le décret du fructidor an III, ne vaut toutefois que sous réserve des matières dévolues à l'autorité judiciaire par des règles ou principes de valeur constitutionnelle . [...]
[...] Le Tribunal des conflits répond à cette question en énonçant que même si la société Aéroports de Paris est chargée de l'exécution de missions de service public, le dommage causé à l'employé n'est pas survenu dans l'exercice des prérogatives de puissance publique de la société. En dehors de cela, les juges du Tribunal de conflits indiquent que la chaise ayant causé le dommage n'est pas un bien immobilier et par conséquent n'est pas un ouvrage public. La réponse donnée par les juges du Tribunal des conflits résulte de l'état actuel des critères généraux de répartition des compétences qui reflète une jurisprudence construite progressivement au fil des années (Tribunal des conflits : arrêt Blanco 1873, Société commerciale de l'Ouest africain). [...]
[...] Par ce raisonnement, les juges du Tribunal des Conflits, écarte à nouveau la compétence du juge administratif, parce que, lorsque l'administration fait usage de ces prérogatives, il aura une forte présomption en faveur de la compétence du juge administratif. Inversement, il y a aura une présomption que la question relève de l'ordre judiciaire. Bien que ce critère paraisse décisif à cause d'une forte présomption, ces circonstances ne suffisaient pas à exclure la compétence du juge administratif dès lors que le dommage provenait de l'ouvrage public . [...]
[...] Les juges du Tribunal des conflits la positionnent comme une sorte de règle spécifique qui est autonome du premier considérant. De plus, cette chronologie du raisonnement permet de comprendre le parcours fait par le juge pour déterminer la juridiction compétente. C'est un raisonnement classique qui vérifie les critères préétablis, mais dans lequel la qualification d'ouvrage public a joué le rôle décisif. Ainsi, l'idée fondamentale qui est dégagée par les juges du Tribunal des conflits est la suivante : si l'action en responsabilité en réparation des dommages causés à un tiers par le fonctionnement d'un organisme privé, chargé de l'exécution de missions de service public, concerne en principe le juge judiciaire, il en va autrement lorsque les dommages sont causés par le fonctionnement d'un ouvrage public. [...]
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