Jusqu'à la fin du 19ème siècle, et les arrêts « Blanco », « Terrier » et « Feutry », le règlement des litiges concernant la responsabilité de l'Etat, de ses collectivités et des ses agents pouvait être régit par le Droit civil qui est applicable par le juge judiciaire. Or, les articles 10, 12 et 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 sont destinés à empêcher le pouvoir judiciaire d'empiéter sur les deux autres. C'est pourquoi l'article 10 défend aux juges de fixer des règles législatives et l'article 12 de faire des règlements. L'article 13 défend aux juges de s'intéresser aux actes du pouvoir exécutif et de mettre en cause les pouvoirs publics. C'est cet article qui a justifié et permet encore aujourd'hui la résolution des conflits d'attribution entre l'ordre judiciaire et l'ordre administratif. L'arrêt « Feutry » du tribunal des conflits en date du 29 février 1908, poursuit l'évolution débutée quelques années plus tôt, en refusant l'application des articles 1382 et suivants du code civil pour la faute des agents de l'administration.
Dans les faits, M.Baudry, un aliéné dangereux interné à l'asile départemental de Clermont, s'échappe de celui-ci. Quelques jours plus tard, il met le feu à deux meules de blé et de seigle appartenant à M.Feutry. La victime de ces incendies poursuit devant le tribunal civil de Clermont, le Département de l'Oise qui était chargé du service des aliénés et de la gestion de l'asile de Clermont. Il demandait le versement de dommages et intérêts en vertu des articles 1382, 1383, 1384 du code civil, en affirmant que le département était responsable de la mauvaise organisation de l'asile et du défaut de surveillance de ces agents qui avait permis l'évasion de l'aliéné. Le 22 mars 1907, le tribunal de Clermont reconnaît sous visa de l'article 1383 du code civil la responsabilité du département qui fit appel de ce jugement devant la Cour d'Amiens. Le préfet adressa à la Cour un déclinatoire de compétence qu'elle rejeta.
Le 10 décembre 1907, le préfet de l'Oise prenait donc un arrêté de conflit pour que le tribunal des conflits réponde à la question de savoir qui de l'autorité administrative ou judiciaire était compétente pour connaître de l'action en dommages et intérêts, intentée par un particulier contre une collectivité, au sujet de la gestion d'un service public.
Le tribunal des conflits considéra que cette assignation ne visait aucune faute personnelle d'un agent de l'Administration et se détachant de sa fonction, qu'elle incrimine l'organisation et le fonctionnement d'un service à la charge du département et d'intérêt public, que l'appréciation des fautes qui auraient pu se produire dans l'exécution de ce service n'appartenait pas à l'autorité judiciaire. En commentant cet arrêt, on peut penser que l'on s'intéresse au mouvement de création du Droit Administratif, conforme aux dispositions de l'article de13 de la loi des 16 et 24 août 1790, qui affirme l'impossibilité pour l'autorité judiciaire de remettre en cause les actes de l'administration.
Cette solution se place dans la continuité de l'arrêt du tribunal des conflits «Blanco» du 8 février 1873 qui reconnaissait la compétence du tribunal administratif pour connaître des litiges entre l'Etat et un particulier. C'est dans une logique d'affirmation voir de confirmation que statut d'abord le tribunal des conflits (I). On peut dès lors parler de la création d'une sorte d'équation liant les notions de service public, de droit administratif et de l'autorité administrative (II).
[...] La gestion privée d'un service public, au départ notion érigée en tant qu'exception a pris tellement d'importance sur différents plans qu'elle a fini par remettre en cause le principe. L'Etat aujourd'hui massivement recourt à des structures de Droit privé pour gérer des activités de service public, le critère de service public est donc dépasse mais il reste fort utile. On ne pas considérer que toute la jurisprudence qui a permis d'ériger ce principe est inutile et fausse. L'arrêt Feutry a permis, comme d'autres affaires, de faire évoluer le Droit Administratif, voire le Droit français. [...]
[...] Mais est-ce que cette mauvaise organisation est détachable d'une faute de service d'un agent quelconque. Une faute a forcément été commise quelque part, c'est pourquoi il était important de s'attacher à celle ci dans la partie précédente. On peut penser que cette précision tenait son importance dans le fait qu'elle contredisait une théorie que l'on ne voulait plus appliquer. Pendant un certain temps on opérait une distinction entre acte d'autorité apprécié par juge administratif et acte de gestion évalué par Juge judiciaire. [...]
[...] Il n'était pas possible d'engager la responsabilité personnelle des agents de surveillance de l'asile car il n'avait aucun lien direct avec le préjudice. Par contre c'est bien ce défaut de surveillance ou d'organisation qui a permis l'évasion de l'aliéné. On peut penser qu'il n'y a donc aucun intérêt pour nous à rechercher l'agent responsable de cette faute de service puisque ce n'est plus qui est directement impliqué. En affirmant qu'aucune faute personnelle détachable de la fonction d'agent de l'administration n'avait été commise, on peut considérer que le tribunal des conflits opérait d'ores et déjà une distinction entre faute de service et faute personnelle. [...]
[...] C'est la notion de service public qui était déjà le principe applicable. En effet depuis un arrêt Rotschild du 6 décembre 1855 repris par l'arrêt Blanco du 8 février 1873, on peut penser qu'il apparaît un lien, établit dans les arrêts, entre le service public et le droit administratif avec l'idée d'une administration autonome et dotée d'une compétence du juge administratif en la matière. En l'espèce les fautes commises dans l'activité de gestion du service sont d'intérêt public et concerne donc le Droit public. [...]
[...] Quelques jours plus tard, il met le feu à deux meules de blé et de seigle appartenant à M.Feutry. La victime de ces incendies poursuit devant le tribunal civil de Clermont, le Département de l'Oise qui était chargé du service des aliénés et de la gestion de l'asile de Clermont. Il demandait le versement de dommages et intérêts en vertu des articles du code civil, en affirmant que le département était responsable de la mauvaise organisation de l'asile et du défaut de surveillance de ces agents qui avait permis l'évasion de l'aliéné. [...]
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