En l'espèce, la Société EGTL, entreprise de transport, avait demandé à la Société ESCOTA la restitution du montant de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle s'était acquittée entre le 1er janvier 1996 et le 31 décembre 2000. Suite au refus du concessionnaire, la société saisit alors le juge des référés du Tribunal de Commerce de Cannes.
Contestant la compétence de la juridiction judiciaire, le préfet des Alpes-Maritimes a alors présenté, le 15 février 2006, un déclinatoire démontrant que « les usagers d'une autoroute concédée sont dans une situation unilatérale et règlementaire à l'égard d'un service public administratif ». Celui-ci fut toutefois rejeté par ordonnance du juge des référés, le 16 mars 2006. Le préfet décida alors d'élever le conflit. Le 10 mai 2006, le ministre de la Justice transmit le dossier au Tribunal des Conflits afin qu'il détermine l'ordre juridique compétent.
Les litiges opposant les sociétés concessionnaires et leurs usagers relèvent-ils de la juridiction administrative ou de l'ordre judiciaire ?
[...] Tribunal des conflits novembre 2006 - la distinction entre le service public administratif et le service public industriel et commercial Rendu le 28 novembre 2006, l'arrêt Société EGTL Société ESCOTA s'annonce comme l'un des bouleversements majeurs de la jurisprudence administrative actuelle. Le Tribunal des Conflits vient en effet de confirmer que la construction et l'exploitation des autoroutes constituaient un service public administratif et que, par voie de conséquence, les litiges opposant les sociétés concessionnaires et leurs usagers, même titulaires d'abonnements, relevaient de la juridiction administrative. [...]
[...] La Haute juridiction va donc contrôler si l'objet et les modalités de financement et de fonctionnement du service correspondent à ceux d'une entreprise ordinaire. Un recours classique à la méthode du faisceau d'indices Le Tribunal des Conflits recherche tout d'abord si la mission remplie par l'organisme public se rattache aux fonctions normales de l'administration ou si, au contraire, elles peuvent être comparées à celles d'une entreprise privée. Aussi, lorsque l'activité de l'établissement est purement désintéressée et/ou relève des missions traditionnelles de la puissance publique, l'objet du service présente alors un caractère administratif. [...]
[...] En l'absence de toute précision législative, le Tribunal des Conflits s'est donc fondé sur la méthode du faisceau d'indices. Il considère ainsi qu' une société concessionnaire de la construction et de l'exploitation d'une autoroute a pour activité l'exécution d'une mission de service public administratif mais que les péages, qui ont le caractère de redevance pour service rendu, sont assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée Le juge en conclut donc que les usagers de l'autoroute, même abonnés, sont dans une situation unilatérale et règlementaire à l'égard du concessionnaire et que, par conséquent, les litiges opposant les deux sociétés et leurs usagers ( ) relèvent de la compétence de la juridiction administrative Suite à une application stricte de la jurisprudence du 16 novembre 1956 le Tribunal des Conflit retient finalement la qualification de service public administratif (II). [...]
[...] Le législateur a-t-il expressément qualifié la nature de la mission de l'établissement ? À défaut de toute qualification législative, l'organisme est présumé exercer une activité de service public administratif. Le juge peut toutefois renverser cette présomption s'il démontre que les trois critères cumulatifs posés par la jurisprudence CE novembre 1956, Union Syndicale des Industries Aéronautiques sont satisfaits. La mission remplie par le service se rattache-t-elle aux fonctions normales de l'administration ou au contraire, est-elle proche de celles d'une entreprise privée ? [...]
[...] La Haute juridiction semble en effet considérer que le service public autoroutier correspond à une mission traditionnelle de l'Etat. L'objet du service tendrait donc vers la qualification de service public administratif. La dernière condition cumulative, posée par l'arrêt Union Syndicale des Industries Aéronautiques, n'étant pas remplie, celle-ci fait donc obstacle à ce dont la qualification de service public industriel et commercial soit retenue. La juridiction administrative est, par conséquent, le seul ordre juridique compétent pour connaître des litiges opposant les sociétés EGTL et ESCOTA ainsi que leurs usagers. [...]
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