Construction prétorienne consacrée notamment par l'arrêt Action Français rendu par le Conseil d'Etat le 8 avril 1935, la notion de voie de fait, qui est une atteinte grave portée par l'Administration au droit de propriété ou à une liberté fondamentale, relève de la compétence du juge judiciaire.
En l'espèce, les services de la police de l'air et des frontières ont interpellé une personne à l'aéroport de Roissy au motif que le certificat de nationalité française et le passeport français au nom de Maoulida Ali M. de celle-ci étaient susceptibles d'être des faux.
La personne soupçonnée de fraude a alors été placée en zone d'attente et ses papiers ont été confisqués par l'Administration qui s'est fondée sur l'ordonnance du 2 novembre 1945. Ensuite, quelques jours après, un juge délégué du TGI de Paris a mis fin à sa rétention en zone d'attente tandis que l'Administration n'a ni restitué le passeport (malgré l'expiration du délai nécessaire pour les vérifications) ni donné une suite telle que des poursuites pénales.
Il s'agissait pour le Tribunal des Conflits de savoir si la confiscation du passeport au-delà du délai nécessaire à la vérification d'identité constitue une voie de fait et relève ainsi de la compétence du juge judiciaire.
[...] Il explique ensuite que si l'autorité administrative est habilitée à procéder à la rétention du passeport de l'intéressé le temps strictement nécessaire à l'exercice du contrôle d'identité et de sa nationalité (5ème considérant), elle commet une voie de fait dès lors que les vérifications ont été opérées et, sans entamer de poursuites pénales, qu'elle ne rend pas le passeport un tel comportement cesse alors de se rattacher à l'exercice par l'Administration de ses pouvoirs La liberté en cause est la liberté d'aller et venir. Le TC confirme donc le TGI de Paris (sur la constatation de la voie de fait) et dès lors, confirme la compétence de la juridiction judiciaire. [...]
[...] Le champ d'application de ce référé paraît toutefois plus restreint que la voie de fait et de plus, le référé concerne les cas où l'administration est restée dans le cadre de ses pouvoirs. Mais, le juge administratif, agissant rapidement et disposant d'un pouvoir d'injonction efficace, la question s'est tout de même posée de savoir si la voie de fait, notion redécouverte mais toujours fragile (dans le sens où elle essuie constamment de nombreuses critiques) allait survivre L'ordonnance du TGI et surtout, l'arrêt étudié, ont été rendus courant 2001. [...]
[...] On remarque aussi que l'ordonnance de référé du 7 février 2001 rendu par le TGI de Paris a statué au fond sans même avoir attendu les 15 jours que le juge judiciaire doit normalement laisser au Préfet. En raison de ce non-respect du délai, le TC, même s'il a approuvé en l'espèce la compétence du juge judiciaire, a censuré l'ordonnance. En tout cas, si cette décision du Préfet est justifiable, on ne peut ne pas constater que Mlle M. a subi 11 mois de procédure pour simplement savoir vers quel juge elle doit se tourner. Elle n'a donc a priori toujours pas récupéré son passeport, ce qui peut sembler aberrant. [...]
[...] Ainsi, malgré la loi du 30 juin 2000, le TC réaffirme l'existence effective de la voie de fait (en ce sens, l'arrêt étudié est une confirmation de TC octobre 2000, Boussadar Ministre des affaires étrangères). Au regard des règles de valeur constitutionnelle, la conservation de la voie de fait semble nécessaire, ou du moins, le TC l'a conservée afin de garantir la compétence du juge judiciaire en matière d'atteinte à la liberté individuelle ou à la propriété Toutefois, si, avec la redécouverte de la notion, la voie de fait est promis à un avenir meilleur que celui qui avait été attendu pendant un moment, la question de la distinction du référé-liberté et de la voie de fait, avec deux notions de libertés fondamentales, peut poser problème. [...]
[...] Le tribunal, par ordonnance de référé du 7 février 2001, a rejeté le déclinatoire de compétence déposé par le Préfet de Police et a statué au fond en faisant droit, après avoir constaté que la confiscation du passeport, en la circonstance, était constitutive de voie de fait (compétence du juge judiciaire), à la demande de restitution du passeport de la requérante. Le préfet a alors élevé le conflit. Il s'agissait pour le TC de savoir si la confiscation du passeport au-delà du délai nécessaire à la vérification d'identité constitue une voie de fait et relève ainsi de la compétence du juge judiciaire. [...]
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