L'objectif premier du dualisme juridictionnel français est la volonté d'empêcher le juge judiciaire de s'immiscer dans les questions de l'administration, dans le cadre de la séparation des pouvoirs chère à la Révolution (la dualité de juridictions résulte de la loi des 16 et 24 août 1790).
Inscrite dans le contexte d'hésitation quant à l'attribution des compétences entre les deux ordres juridictionnels français, la question du pouvoir d'appréciation d'un acte administratif réglementaire par le juge judiciaire fut soulevée le 16 juin 1923 par l'arrêt Septfonds du Tribunal des Conflits.
En témoigne l'ancienneté de cet arrêt, le débat portant sur la répartition des compétences entre l'ordre administratif et l'ordre judiciaire n'est pas récent. Ici s'opposent deux principes : celui qui fait prévaloir la séparation stricte entre les deux ordres en déniant toute compétence au juge judiciaire pour connaître de l'interprétation des actes administratifs; et celui qui voit en le juge de l'action le juge de l'exception, incitant au contraire à reconnaître au juge judiciaire le pouvoir d'interprétation des actes administratifs à l'occasion de litiges dont il est complètement saisi.
[...] Le second argument de Matter est que comme le règlement s'applique à tout un ensemble de personnes de manière permanente : il se rapproche très nettement d'une loi. Or le juge judiciaire, s'il refusait de juger une affaire sous prétexte qu'un règlement est obscur et qu'il ne peut pas l'interpréter, commettrait un déni de justice. L'arrêt Septfonds dispose que le juge judiciaire est compétent pour interpréter un acte réglementaire, mais uniquement par le biais de la question préalable. En effet, il faut que l'interprétation du règlement soit nécessaire à la résolution de l'affaire pour laquelle il a été saisi (art 115 Code Pénal). [...]
[...] La question de la compétence d'interprétation du juge judiciaire La compétence du juge judiciaire concernant l'interprétation des actes administratifs à portée règlementaire (arrêt Septfonds) Le principe général est que le juge judiciaire est incompétent pour interpréter tout acte réglementaire. L'arrêt Septfonds vient modifier cet état de fait en reconnaissant la compétence du juge judiciaire pour ce qui est de l'interprétation des actes règlementaires de portée générale et impersonnelle. Le Tribunal des Conflits a basé sa décision sur l'idée selon laquelle le règlement, par son caractère général, participe de la loi, et que donc, le juge judiciaire est compétent pour en interpréter le contenu ou le sens. [...]
[...] Cela va dans le sens d'une séparation stricte des compétences des deux ordres juridictionnels. Cette incompétence connaît cependant des limites. Les limites de l'incompétence du juge judiciaire en matière d'appréciation de la légalité : la compétence exclusive du juge judiciaire et la voie de fait L'arrêt Septfonds prévoit une limite à l'interdiction faite au juge judiciaire d'apprécier la légalité des actes administratifs réglementaires et individuels. Le commissaire du gouvernement affirmait qu'il était nécessaire de reconnaître au juge judiciaire la compétence d'apprécier la légalité de règlements administratifs s'agissant de questions qui relevaient déjà exclusivement de l'autorité judiciaire. [...]
[...] On prétend en réalité que l'appréciation de légalité doit être catégoriquement distinguée de l'annulation d'un acte. Du point de vue de la Cour de Cassation, l'appréciation de légalité d'un règlement par le juge judiciaire, ne l'annule pas; il se contente d'en écarter l'application dans une espèce donnée. Par ailleurs, elle précise aussi que la compétence du juge judiciaire ne pourrait être retenue dans le cas d'un acte individuel, car écarter l'application d'un acte individuel dans une espèce donnée équivaut à une annulation : cela fonctionne uniquement pour l'acte réglementaire. [...]
[...] Ici s'opposent deux principes : celui qui fait prévaloir la séparation stricte entre les deux ordres en déniant toute compétence au juge judiciaire pour connaître de l'interprétation des actes administratifs; et celui qui voit en le juge de l'action le juge de l'exception, incitant au contraire à reconnaître au juge judiciaire le pouvoir d'interprétation des actes administratifs à l'occasion de litiges dont il est complètement saisi. En 1817, la Cour de cassation avait posé la distinction entre les actes administratifs individuels et les actes règlementaires pour concilier ces exigences contradictoires, en suivant à l'époque les réquisitions du procureur général Merlin. Le Tribunal des Conflits a lui combiné cette distinction avec celle entre interprétation des actes administratifs et appréciation de leur légalité. A l'origine de l'affaire, le Tribunal de Commerce avait été saisi par M. [...]
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