La société "Le Profil" exploite une usine et fait assurer la protection des transferts de fonds par la police administrative. Une caissière, sa mallette à la main, sort de la banque ou elle vient de retirer des fonds pour la paye du personnel. Comme à l'ordinaire, elle est escortée de gardiens de la paix, des agents de la police judiciaire. Pourtant, leur présence ne va pas empêcher les malfaiteurs de réussir le coup qu'ils avaient fomenté : ils lui arrachent la mallette et prennent la poudre d'escampette sans que les agents n'interviennent.
Par conséquent, ce 8 décembre 1972, les malfaiteurs s'emparent de la somme de 274 051,90 francs. La société intente une action contre l'État pour "fautes lourdes susceptibles d'engager la responsabilité de l'État". Il est reproché aux agents de police de ne pas avoir mis en place un dispositif de protection adéquat et de ne pas avoir fait obstacle aux agissements des agresseurs.
La question est de déterminer à quelle police – administrative ou judiciaire – l'affaire se rattache. En l'espèce, faut-il se fonder sur l'intention préventive ou les faits intervenus qui auraient supposé une intervention répressive de la part des autorités de police en vue de déterminer quelle juridiction est compétente ?
[...] II La décision du Tribunal des conflits: application du critère finaliste et unification juridique des faits Malgré la dichotomie qui existe entre prévention et répression, il convient de relativiser la portée de ce critère. La plupart des missions de police ont un caractère mixte, notamment dans la mission de police concernée (cf I). Nous verrons que le critère finaliste décidé en 1951 cherche à répondre à cette ambiguïté : statuer sur la compétence juridictionnelle des missions de police à caractère mixte. [...]
[...] Le TC considère en l'espèce qu'il y a une très nette césure entre la situation existante avant le franchissement du barrage et ce qui est survenu après. Initialement, il s'agissait d'une opération de prévention relevant donc de la police administrative, qui suite au franchissement du barrage se transforme en mission répressive. Selon le TC, c'est précisément le décalage spatio-temporel qui permet de conclure sur la transformation de la nature de la mission: le juge des conflits conclut sur la compétence du juge judiciaire. Transition : Cet arrêt motive l'hésitation du CE quant à sa compétence pour juger de l'affaire. [...]
[...] En effet, en l'espèce, il s'agit plus précisément d'un conflit sur renvoi d'une juridiction statuant souverainement, qui permet au Conseil d'État et à la Cour de cassation de saisir préventivement le Tribunal des conflits en cas de difficulté sérieuse sur une question de compétence entre les deux ordres. Requête enregistrée au secrétariat du TC en date du 14 mars 1978 et aboutit par la décision du TC du 12 juin 1978. Question de droit La question est de déterminer à quelle police administrative ou judiciaire l'affaire se rattache. En l'espèce, faut-il se fonder sur l'intention préventive ou les faits intervenus qui auraient supposé une intervention répressive de la part des autorités de police en vue de déterminer quelle juridiction est compétente? [...]
[...] Autrement dit, le critère de distinction entre police administrative et police judiciaire ne peut se fonder sur des considérations organiques et procédurales. Ainsi, avant les arrêts de 1951, aucun critère n'était fourni par la législation ni par la jurisprudence. C'est en 1951 que le critère finaliste est consacré par deux arrêts. D'une part, par le CE : CE Section mai 1951, Baud: en l'espèce, affaire dans laquelle une personne avait été mortellement blessée au cours des opérations de police accomplies en vue de rechercher des malfaiteurs. [...]
[...] Le critère finaliste peut se définir ainsi: ce qui est déterminant, c'est le but de la décision ou de l'opération à qualifier; ou, plus précisément, c'est l'intention dans laquelle les autorités ou personnels de police ont agi. D'une manière générale, le juge recherche quelle est la cause essentielle du dommage : le contentieux sera judiciaire si cette cause est une opération de PJ, administratif si cette cause est une opération de PA. Cependant, dans l'affaire qui nous concerne, plus qu'une opération ayant un caractère mixte, c'est une mission qui connait à la fois une phase de prévention et une phase de répression (cf I). [...]
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